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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Martha Argerich et le festival de Lugano Ă la salle Pleyel, Paris.
Erreur de transmission
Transposer dans une vaste salle parisienne l’esprit intime et le charme d’un festival est toujours risqué. Dans la grande salle Pleyel, ce programme importé de Lugano par Martha Argerich aura semblé quoi qu’il en soit inégal, décousu et pour tout dire souvent ennuyeux, sauf aux moments où la grande Martha sera elle-même aux commandes.
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Martha Argerich, on le sait, ne se contente pas d’être l’une des plus grandes pianistes de notre temps. Elle met son immense notoriété au service de ses collègues, jeunes ou moins jeunes, de tous ceux avec lesquels elle prend plaisir à partager les joies du concert. Au festival de Lugano en particulier, elle propose des programmes éclectiques tant dans le choix des œuvres que des interprètes. Une série de publications EMI en rend d’ailleurs compte régulièrement.
La salle Pleyel est naturellement comble pour écouter ce que la fabuleuse pianiste propose lors du premier de ces deux concerts, le deuxième étant consacré au tango sous toutes ses formes. A priori, un très grand plaisir devait être au rendez-vous. D’où vient donc cette relative déception qui, surtout en première partie, est celle d’un bon nombre d’auditeurs ?
Du choix des œuvres, d’abord, sans aucun doute. Composé par un tout jeune Beethoven, le Quatuor avec piano n° 3 en ut majeur ne présente pas vraiment d’autre intérêt de proposer les prémices de ce qui sera ensuite traité avec une tout autre envergure par le même compositeur. Une interprétation magistrale aurait peut-être convaincu davantage. Ce n’est pas le cas, le piano très mécanique d’Akané Sakaï s’accordant mal avec la belle sonorité du violoniste Geza Hosszu-Legocky, l’alto de Lyda Chen-Argerich et le violoncelle de Mark Drobinsky restant trop discrets.
La Fantaisie bétique de Manuel de Falla vient ensuite, guère plus convaincante. Sans doute eût-il fallu l’inspiration et le tempérament d’une Alicia de Larrocha au lieu de la virtuosité assez sèche de Nelson Goerner. Avec comme partenaire Lilya Silberstein, Martha Argerich entre finalement en scène pour la Suite pour deux pianos n° 1 op. 5 de Rachmaninov.
On monte alors très nettement de plusieurs niveaux dans le domaine de l’interprétation avec ces deux musiciennes d’exception dont les doigts magiques tirent un maximum d’effets de ces pages aux sonorités étranges d’un Rachmaninov de vingt ans, pas encore au sommet de sa maturité expressive.
Après la Sonate pour violon et piano de Debussy qui ouvre la deuxième partie du concert où l’on retrouve la sonorité soyeuse de Geza Hosszu-Legocky et le piano sans âme d’Akané Sakaï, Lilya Zilberstein donne une interprétation brillante, personnelle, généreuse, de Prélude et fugue de Taneïev, compositeur que le public français n’a que peu d’occasions de fréquenter.
Et pour terminer, la Sonate pour deux pianos et percussion de Bartók vient enfin combler pleinement notre attente. Martha Argerich et Nelsson Goerner, Camille Baslé et Jean-Claude Gengembre allient virtuosité et extrême musicalité, intelligence, imagination, pour cette œuvre dont l’impact reste toujours fort, surtout dans une interprétation aussi indiscutable.
Alors, on se dit en sortant que cet inégal concert manifeste peut-être simplement le risque représenté par ce désir de faire goûter à un plus large public, et parisien de surcroît, les agréments d’une programmation festivalière qui perd forcément de son charme et révèle davantage ses faiblesses hors de son cadre, sauf, sans doute, pour les habitués de la manifestation.
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Salle Pleyel, Paris Le 06/03/2010 GĂ©rard MANNONI |
| Martha Argerich et le festival de Lugano Ă la salle Pleyel, Paris. | Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Quatuor avec piano n° 3 en ut majeur WoO 36 (1785)
Manuel De Falla (1876-1946)
FantasĂa baetica (1920)
Sergei Rachmaninov (1873-1943)
Suite pour deux pianos n° 1 op. 5 (1893)
Claude Debussy (1862-1918)
Sonate n° 3 pour violon et piano en sol mineur (1917)
Sergei TaneĂŻev (1856-1915)
Prélude et fugue pour piano en sol# mineur op. 29 (1910)
BĂ©la BartĂłk (1881-1945)
Sonate pour deux pianos et percussion Sz 110 (1938)
Martha Argerich, piano
Akaké Sakaï, piano
Lilya Zilberstein, piano
Nelson Goerner, piano
Lyda Chen-Argerich, alto
Mark Drobinsky, violoncelle
Jean-Claude Gengembre, percussion
Camille Baslé, percussion | |
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