|
|
CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
|
Nouvelle production de Macbeth de Verdi dans une mise en scène de Francisco Negrin et sous la direction d’Enrique Mazzola à l’Opéra du Rhin.
La noirceur de Macbeth
Bruno Caproni (Macbeth) et Elisabete Matos (Lady Macbeth)
Avec un appréciable souci d’authenticité dramatique, Francisco Negrin signe à l’Opéra du Rhin un Macbeth qui rend totalement justice à Verdi comme à Shakespeare et se refuse aux actualisations à la mode un peu partout. Un spectacle exemplaire, vivement dirigé et dominé par la Lady Macbeth engagée et vibrante d'Elisabete Matos.
|
|
Bons baisers d’Eltsine
RĂ©gal ramiste
L'Étrange Noël de Mrs Cendrillon
[ Tous les concerts ]
|
Puissamment évocateur, le décor unique de Louis Désiré – qui signe aussi des costumes en situation respectant à la fois l’époque et l’Écosse – est l’élément essentiel du Macbeth noir et sauvage proposé par l’Opéra du Rhin. D’emblée, la fosse profonde, sorte d’égout symbolique des turpitudes humaines, où se déroule cette tragédie sanguinaire, nous installe dans une atmosphère glauque et malsaine.
À l’opposé des relectures modernes – Richard Jones à Glyndebourne comme Dimitri Tcherniakov à la Bastille –, évacuant le caractère fantastique de l’œuvre shakespearienne respecté par Verdi, Francisco Negrin privilégie le rôle des sorcières, omniprésentes ici et personnifiées par trois comédiennes acrobates qui se déplacent sur les parois du puits, accrochées à des filins, comme de maléfiques insectes géants. L’antre du couple diabolique, avec un lit dont le rôle est déterminant, se situe au fond de ce trou béant.
En référence à la tragédie grecque, les choristes demeurent immobiles dans des loggias situées à chaque côté du cratère. La nuit règne le plus souvent, avec des éclairages judicieux de Bruno Poet pour exprimer toute la noirceur ambiante.
De facture classique, la mise en scène n’est jamais conventionnelle mais plutôt au contraire souvent inattendue et même innovante. Ainsi, le récit de la rencontre de Macbeth avec les sorcières et leur prédiction n’est pas la lecture de la lettre reçue par sa femme : c’est Macbeth lui-même qui, retrouvant son épouse, lui raconte son aventure dans une scène décisive, mettant déjà le couple en présence. Ainsi également de la scène de somnambulisme où Lady Macbeth exprime ses remords avant de se poignarder face à l’homme de sa vie.
Donnée dans la version de Paris mais en langue italienne, la représentation fait entendre la musique du ballet, prétexte à une vision explicité des cauchemars et hallucination d’une femme en mal d’enfant. On pourrait donner dix autres exemples significatifs de l’intelligence dramatique d’un spectacle servi par une direction d’acteurs efficace.
À tous égards, la distribution est dominée par la Lady explosive d’Elisabete Matos, aussi impressionnante ici que dans sa mémorable Cassandre des Troyens de Berlioz à Valence à l’automne dernier. La meurtrière tessiture ne pose aucun problème à la soprano portugaise, à l’aise dans tous les registres et capable de magnifiques nuances.
Sans être indigne, le baryton irlandais d’origine italienne Bruno Caproni, qui assume le rôle-titre, est l’unique faiblesse d’une distribution exemplaire, aussi peu expressif par son jeu scénique que par un timbre uniforme, sans couleurs, un chant peu raffiné et une voix courte d’aigu et manquant de projection. Wojtek Smilek est un solide Banco, Enrico Casani ne passe pas inaperçu en Malcolm, et Sebastian Na est un Macduff de premier ordre.
Superbe prestation des chœurs, très sollicités par l’ouvrage. Enfin et surtout, sous la direction passionnée, vive et souple d’Enrique Mazzola, l’Orchestre symphonique de Mulhouse donne son meilleur au service d’une grande soirée verdienne.
| | |
|
Opéra du Rhin, Strasbourg Le 27/04/2010 Monique BARICHELLA |
| Nouvelle production de Macbeth de Verdi dans une mise en scène de Francisco Negrin et sous la direction d’Enrique Mazzola à l’Opéra du Rhin. | Giuseppe Verdi (1813-1901)
Macbeth, opéra en quatre actes
Version de Paris, 1865, en langue italienne
Livret de Francesco Maria Piave, d’après Shakespeare
Maîtrise et Chœurs de l’Opéra national du Rhin
Orchestre symphonique de Mulhouse
direction : Enrique Mazzola
mise en scène : Francisco Negrin
décors et costumes : Louisé Désiré
Ă©clairages : Bruno Poet
préparation des chœurs : Michel Capperon & Philippe Utard
Avec :
Bruno Caproni (Macbeth), Elisabete Matos (Lady Macbeth), Wojtek Smilek (Banco), Sebastian Na (Macduff), Enrico Casari (Malcolm), Fan Xie (une servante), Mario Brazitzov (un assassin), Young-Min Suk (un serviteur), Aline Gozlan (Lady Macduff), Gregory Kozely (Duncan), Marion Cenki, Marie Le Roy, Ximena Zalazar Firpo (trois sorcières). | |
| |
| | |
|