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CRITIQUES DE CONCERTS 21 décembre 2024

Le Vagabond ensorcelé de Rodion Chtchedrine par la troupe du Théâtre Mariinski de Saint-Pétersbourg sous la direction de Valery Gergiev au Théâtre du Châtelet, Paris.

Éternelle Russie
© N. Razina

Avec cet opéra pour salle de concert créé en 2002 et donné ici en version scénique au Châtelet, Rodion Chtchedrine revisite les thèmes fondamentaux de la culture et de la civilisation russes. Une œuvre forte, originale, remarquablement servie par les forces vocales et musicales du Mariinski dirigées par Valery Gergiev.
 

Théatre du Châtelet, Paris
Le 02/11/2010
GĂ©rard MANNONI
 



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    Louons donc tout d’abord les artisans de cette réussite visuelle, Alexeï Stepaniuk pour la mise en scène, Alexander Orlov pour les décors, Irina Cherednikova pour les costumes, Evgeni Ganzbourg pour les lumières et même Dmitri Korneïev pour la chorégraphie.

    On connaît bien l’écriture musicale de Rodion Chtchedrine, personnelle, riche de couleurs, appuyée sur une orchestration complexe, jouant sur les contrastes de timbres et opposant toujours très habilement la douceur des cordes et des bois à la violence des cuivres et des percussions. C’est d’une facture libre, ne se référant à aucune chapelle précise, mais utilisant avec instinct et talent les meilleurs apports du XXe siècle.

    Même constatation pour ce qui est de l’écriture vocale, lyrique sans excès, respectueuse du texte et de son intelligibilité, sans effets inutiles. Et il faut bien que le spectacle et la musique aient autant de qualités pour que le très complexe contenu de l’œuvre inspirée par le récit éponyme de Nikolaï Leskov soit intelligible pour nous et garde assez de clarté pour retenir notre attention sans faiblesse une heure trente minutes d’affilée.

    Nous ne sommes en effet pas loin d’un monde à la Dostoïevski avec ce Vagabond de Leskov, auteur de la fin du XIXe siècle à qui Chostakovitch avait déjà emprunté le sujet de sa Lady Macbeth de Msenzk. Mysticisme, cruauté, sentiment profond, obsédant, du péché, irrésistibles pulsions des sens qui poussent l’homme vers sa déchéance, magie, présence quasi panthéiste de la nature, rédemption par le sacrifice de la vie mais impossibilité d’échapper à son destin, tels dont les thèmes fondamentaux de l’œuvre et de presque toute la littérature et la musique russes, rassemblés ici dans l’histoire d’Ivan Sévérianovitch Fliaguine, novice au monastère de Valaam.

    Trois chanteurs y suffisent, chacun incarnant plusieurs personnages. Dans le rôle-titre et celui d’un narrateur, Sergueï Alexashkin est excellent vocalement et dramatiquement, tout comme Andreï Popov qui n’incarne pas moins de cinq personnages et Kristina Kapoustinskaïa, double incarnation féminine à la belle voix harmonieuse, égale et bien en place. Le Chœur du Mariinski, disposé en frise au lointain, quelques danseurs-figurants aux élégantes silhouettes complètent ce plateau de haut niveau.

    Et bien sûr, à la tête de l’Orchestre du Mariinski, Valery Gergiev mène l’ensemble avec énergie, lucidité, un engagement profond en tous domaines, achevant ainsi de permettre à cette partition de nous toucher malgré sa complexité et son refus de toute complaisance.




    Théatre du Châtelet, Paris
    Le 02/11/2010
    GĂ©rard MANNONI

    Le Vagabond ensorcelé de Rodion Chtchedrine par la troupe du Théâtre Mariinski de Saint-Pétersbourg sous la direction de Valery Gergiev au Théâtre du Châtelet, Paris.
    Rodion Chtchedrine (*1932)
    Le Vagabond ensorcelé, opéra-concert (2002)
    Livret du compositeur d’après le récit éponyme de Nikolaï Leskov

    Chœur et Orchestre du Théâtre Mariinski
    direction : Valery Gergiev
    mise en scène : Alexei Stepanyuk
    décors : Alexander Orlov
    costumes : Irina Cherednikova
    Ă©clairages : Evgeni Ganzburg

    Avec :
    Sergeï Alexashkin (Ivan Sévérianovitch Fliaguine / un narrateur), Andreï Popov (Le Moine fouetté / le Prince / le Magnétiseur / le Vieil homme dans les bois / un narrateur), Kristina Kapoustinskaïa (Griucha la Tzigane / une narratrice).

     


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