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CRITIQUES DE CONCERTS |
30 octobre 2024 |
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Suite de l’intégrale Mahler de Valery Gergiev à la salle Pleyel, Paris.
Boulimie et inégalités
La deuxième partie de l’intégrale des symphonies de Mahler, dirigée par Valery Gergiev à la tête de l’Orchestre du Théâtre Mariinsky a suscité des triomphes lors de trois soirées bien remplies. La suite aura lieu en mars prochain avec le London Symphony Orchestra et l’ensemble sera donné aussi au Carnegie Hall de New York.
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Complicité artistique
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Hommage au réalisme poétique
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Valery Gergiev est très présent sur la scène parisienne en ce début de saison, un front qu’il semble affectionner particulièrement. En deux mois, on l’y aura vu donner deux œuvres de Rodion Chedrine au Théâtre du Châtelet (dont il dirigera la production actuelle du musical My Fair Lady par Robert Carsen au Théâtre Mariinski l’an prochain) et cinq symphonies de Mahler en trois jours à Pleyel. Véritable boulimie certes, partagée par un public enthousiaste et disposé à écouter durant ce deuxième volet jusqu’à deux symphonies dans le même concert.
On connaissait l’intégrale de ce monument symphonique par le chef ossète au travers d’enregistrements publics à la tête du London Symphony Orchestra publiés par la firme LSO Live. Intégrale inégale comme l’est cette série de trois concerts. Inégalité d’inspiration principalement, d’une symphonie à l’autre et parfois même d’un mouvement à l’autre dans une même œuvre.
Constante indéniable, la qualité de l’orchestre, dominée par la suprématie de ses instruments à vent. De plus, cette formation à dominante masculine joue sur de très bons instruments, ce qui est plutôt rare dans la Russie d’aujourd’hui. Autre constante, la prudence avec laquelle Gergiev choisit ses tempi. Sa réputation étant de ne pas s’attarder aux répétitions, le chef qui jongle avec les concerts et les avions adopte-t-il ainsi une attitude sans prise de risque ?
Le résultat est que certaines parties semblent peu habitées. Le premier soir, l’orchestre, « retardé à l’arrivée à Paris par les conditions climatiques aériennes », répète encore alors que les spectateurs s’entassent dans le vaste hall de Pleyel, créant beaucoup de confusion, un retard au placement et au début du concert.
Est-ce la raison pour laquelle la Symphonie Résurrection restera le meilleur de cette série, avec un orchestre bien chauffé par la dite répétition enchaînée au concert ? Cette œuvre de vastes proportions qui convoque un chœur et deux solistes vocaux, donnée seule et enregistrée par France Musique, aura été un parcours d’une grande égalité, techniquement comme par l’inspiration du chef basée sur un respect total de la partition.
On n’oubliera pas de sitôt l’Urlicht d’une belle concentration chanté par Olga Borodina, dont le timbre reste somptueux et le volume remarquable (les deux solistes sont placées sous le chœur), ni ses couplets avec le magnifique Chœur de Radio France ainsi que ceux du soprano Anastasia Kalagina, elle aussi impeccable. Des trois concerts, c’est celui qui a reçu le triomphe public le plus éclatant.
Même ambiance de retard pour le deuxième concert commençant par une Titan presque parfaite, avec la réserve faite sur les tempi, suivie d’une Cinquième Symphonie assez inégalement habitée mais d’une finition admirable dans les détails. Le plus dense des trois, le troisième programme couple Quatrième et Sixième. La Quatrième Symphonie est le maillon faible de l’ensemble, avec de la façon la plus évidente, cette prudence qui étire totalement l’œuvre et lui fait perdre beaucoup de sa saveur.
Autre inégalité flagrante, Anastasia Kalagina ne retrouve pas l’état de grâce du premier soir et son Das himmlische Leben se cherche d’un bout à l’autre, dans la prononciation la plus incompréhensible. Avec la noire Tragique enfin, Gergiev est sur son terrain favori et malgré un envol un peu similaire à celui de la précédente, il joue sur du velours avec l’épique Finale aux proportions démesurées et désolées.
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Salle Pleyel, Paris Le 13/12/2010 Olivier BRUNEL |
| Suite de l’intégrale Mahler de Valery Gergiev à la salle Pleyel, Paris. | 11 décembre :
Gustav Mahler (1860-1911)
Symphonies n° 2 en ut mineur, « Résurrection »
Olga Borodina, alto
Anastasia Kalagina, soprano
Chœur de Radio France
préparation : Matthias Brauer
12 décembre :
Symphonie n° 1 en ré majeur, « Titan »
Symphonie n° 5 en ut# mineur
13 décembre :
Symphonie n° 4 en sol majeur
Anastasia Kalagina, soprano
Symphonie n° 6 en la mineur, « Tragique »
Orchestre du Théâtre Mariinski
direction : Valery Gergiev | |
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