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CRITIQUES DE CONCERTS |
31 octobre 2024 |
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Récital du baryton Simon Keenlyside accompagné au piano par Malcolm Martineau à l’auditorium du musée d’Orsay, Paris.
So British !
Programme original pour ce récital du grand baryton britannique Simon Keenlyside devant l’auditoire peu pléthorique de l’auditorium du musée d’Orsay avec un ensemble de mélodies elles aussi anglaises, de compositeurs plus ou moins connus et sur des textes reliés au mouvement préraphaélite. Voix superbe, grand tempérament et répertoire original.
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Complicité artistique
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Hommage au réalisme poétique
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Simon Keenlyside est, aux côtés des Thomas Hampson, Bryn Terfel et Ludovic Tézier par exemple, l’un des grands barytons du monde lyrique actuel. Aussi présent et efficace au concert qu’au théâtre, c’est un homme de scène dont les qualités d’acteur sont bien utiles pour nous aider à cheminer dans un programme de cette nature où se côtoient compositeurs célèbres comme Britten, connus comme Holst ou à peu près inconnus chez nous comme la plupart des autres.
Il a précisément ce qui manquait à Stéphane Degout : l’art de donner physiquement vie à ce qu’il chante, sans excès, mais avec un comportement scénique accompagnant le mot et la musique. Il ne s’agit pas de jouer des personnages, mais d’être spontanément habité par l’œuvre, de manière à ne jamais laisser l’auditeur indifférent.
Keenlyside, comme Terfel ou Hampson, excelle en ce domaine et il a de plus une diction absolument intelligible en anglais bien sûr, mais aussi en français comme il l’a prouvé en bis. Dommage donc que le public parisien, décidément de plus en plus routinier et intéressé surtout par les stars hyper médiatisées, n’ait même pas pu emplir vraiment l’auditorium d’Orsay qui n’est pourtant pas gigantesque.
C’est donc sur des poèmes pouvant être reliés par leur forme ou leur thème au mouvement pictural des préraphaélites dont l’esthétique, née au milieu du XIXe siècle et développant des ramifications jusqu’au début du XXe, et qui se référait aux primitifs italiens, que ces mélodies étaient écrites, à l’exception toutefois des textes de Fletcher, beaucoup plus anciens.
On connaît naturellement en France Benjamin Britten, un peu Gustav Holst, un tout petit peu John Ireland, mais quasiment pas Peter Warlock (1894-1930), Percy Grainger (1882-1961), Herbert Howells (1892-1993), Ned Rorem (né en 1923) ou George Butterworth (1885-1916). Par le choix des textes et leur écriture musicale, ils peuvent de manière généralement plausible être considérés comme héritiers des idées initiées par Rosetti et Millais. Ce sont des musiques d’une expressivité sage, aux belles phrases mélodiques sans être sirupeuses, fidèles aux textes en majorité sombres et nostalgiques qui les inspirent.
La voix si chaleureuse et bien timbrée de Keenlyside, presque trop grande pour le lieu, leur apporte mille couleurs, mille inflexions, une musicalité constante et beaucoup d’intelligence en tous domaines. Rien ne laisse indifférent, même si se détache nettement le grand cycle de Britten Songs and Proverbs of William Blake, rencontre entre un compositeur et un poète de génie.
Cette succession de très courts proverbes et de poèmes plus longs, est d’une écriture très moderne, flirtant parfois avec le dodécaphonisme. Et comment résister au sublime poème de Blake, l’un des plus célèbres de la langue anglaise : Tyger tyger burning bright in the forests of the night, what immortral hand or eye could frame thy fearful symmetry ?, dont aucune traduction autre que musicale ne peut rendre les rythmes, les allitérations et les mots colorés.
Un programme donc passionnant par son caractère inhabituel, servi avec autant de foi et de talent par le pianiste Malcolm Martineau que par Simon Keenlyside, décidément l’une des personnalités exceptionnelles de la vie lyrique d’aujourd’hui.
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Auditorium du Musée d'Orsay, Paris Le 10/02/2011 Gérard MANNONI |
| Récital du baryton Simon Keenlyside accompagné au piano par Malcolm Martineau à l’auditorium du musée d’Orsay, Paris. | John Ireland (1879-1962)
Sea fever
Peter Warlock (1894-1930)
My Own Country
Sleep
Percy Grainger (1882-1961)
The Spring of Thyme
Herbert Howells (1892-1983)
Little Boy Lost
Gustav Holst (1874-1934)
Betelgeuse, op. 48 n° 12
Benjamin Britten (1913-1976)
Songs and Proverbs of Wiliam Blake op. 74
Sweeter than roses
Ned Rorem (*1923)
Root Cellar
Oh You Whom I Often and Silently Come
My Papa’s Waltz
Youth, Day, Old Age and Night
George Butterworth (1885-1916)
Six songs from A Shorpshire Lad
Bredon Hill and other songs
Simon Keenlyside, baryton
Malcolm Martineau, piano | |
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