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CRITIQUES DE CONCERTS |
31 octobre 2024 |
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Première aux Fesstage 2011 de l’Opéra de Berlin de la Walkyrie de Wagner mise en scène par Guy Cassiers et sous la direction de Daniel Barenboïm.
Festtage Berlin 2011 (2) :
Le Dieu Pape
René Pape (Wotan)
Après Wozzeck, la Walkyrie est la deuxième première des Festtage 2011, dans la même mise en scène de Guy Cassier présentée à la Scala en décembre dernier, mais avec une distribution renouvelée dans ses rôles principaux, présentant notamment les débuts tant attendus de René Pape dans le Wotan du second volet du Ring.
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Complicité artistique
Sombre Volga
Hommage au réalisme poétique
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Dans une conférence de presse, Daniel Barenboïm explique que la double première de Wozzeck et de la Walkyrie n’a été rendue possible que par la coproduction avec la Scala de Milan, l’Opéra de Berlin ne pouvant préparer deux premières consécutives, comme c’est le cas à l’Atelier Bayreuth. Pourtant, dans la Walkyrie, c’est bien le Festspielhaus que le chef aura imité en couvrant d’une plaque de bois la fosse d’orchestre pour tenter d’obtenir la même pâte sonore que dans l’abîme mystique.
Soit, mais d’abord, Wagner n’a pas élaboré la coque de Bayreuth pour des raisons acoustiques comme il a été trop souvent dit, mais pour éliminer la lumière de la fosse afin d’atteindre à une obscurité totale évoquant aujourd’hui une salle de cinéma : l’attention entièrement focalisée sur le visuel.
Deuxièmement, le Schillertheater n’est pas le Festspielhaus. Ce théâtre mythique de Berlin-ouest dans un bâtiment de la modernité rouvert en septembre 1951 sert de lieu de repli au Staatsoper Unter den Linden (Berlin-est) qui doit subir une vaste rénovation étalée sur trois saisons.
Seulement, la délocalisation ampute la jauge de presque quatre cents places, le plafond de la salle est bas, son acoustique sèche. Dans de telles circonstances, avec une fosse plus abaissée qu’à l’ordinaire, le son ne ressemble en rien à celui de Bayreuth, mais devient encore plus sec et lointain que l’original déjà médiocre du Schillertheater.
Au moins, consolons-nous par le fait que nous est épargné le rituel de l’arrivée du chef d’orchestre : la musique commence sans applaudissements, soudainement, et l’on est plongé subitement en plein orage du I, comme à Bayreuth. Quant à Barenboïm, il est aujourd’hui plus que jamais un grand wagnérien, maître incontesté de Tristan et du Ring en particulier – surtout à la tête de son orchestre préférée, la Staatskapelle Berlin.
Les cordes sont d’un lyrisme envoûtant, la douceur du solo violoncelle touche au plus profond de l’âme, les couleurs des bois et des cordes sont uniques parmi les orchestres d’opéra en Allemagne. L’Annonce de la mort émerge dans une lenteur absolue, qui maintient la tension jusqu’à la culmination du Ring entier – la pitié de Brünnhilde. La façon dont Barenboïm traite ce moment-clé est un art en soi.
La mise en scène de Guy Cassiers ne propose rien de surprenant ou d’inattendu : dans la droite ligne de l’Or du Rhin, l’esthétique est belle, la dramaturgie bien illustrée. On y trouve des symboles pertinents comme le pendule qui s’arrête lors du deuxième Das Ende de Wotan – principe emprunté clairement à Chéreau –, ou encore une forêt de lances anticipant la mort incontournable de Siegmund à la fin du II. L’action présentée de manière aussi illustrative, sans interprétation, reste le fruit d’un travail théâtral bien maigre.
L’interprétation semble le fait des seuls chanteurs. En Sieglinde, Anja Kampe touche par son lyrisme comme par sa souffrance, tour à tour femme malheureuse et sœur passionnée. Son partenaire Simon O’Neill est un vrai Siegmund, qui projette des aigus héroïques avec une aisance admirable, et on espère le réentendre très vite à Bayreuth, où il a assuré un brillant Lohengrin de remplacement en août dernier.
Mikhaïl Petrenko n’arrive pas à remplir le rôle de Hunding, car il lui manque une vraie noirceur et une stature d’authentique brute haineuse. Iréne Theorin montre qu’elle est l’une des héroïnes wagnériennes les plus sérieuses du moment : sa Brünnhilde excelle d’éclat, qui darde ses aigus avec une rare violence, et de puissance. La Fricka d’Ekaterina Gubanova est froide, claire, terrifiante, ensorcelante : tout y est. La meilleure prestation vocale de la soirée.
Reste René Pape. La grande basse dresdoise présente pour la première fois le Wotan de la Walkyrie, ce qui peut être considéré comme le couronnement de toute carrière de baryton-basse. Les wagnériens attendaient ces débuts depuis bien dix ans, et ils n’ont pas espéré en vain : Pape est un Wotan unique.
Les aigus dans les grandes éruptions du monologue du II et la fin du III sont bien dignes d’un dieu, ses nuances sont sublimes et électrisantes – als mir göttliche Not nagende Galle gemischt – ; du grand art ! Seulement, en dehors du fait qu’il ne maîtrise pas encore son texte, il ne fait aucun effort pour travailler en profondeur la psychologie du personnage, à qui il se contente pour l’heure de prêter sa voix divine.
S’il parvient à développer une vraie vision de ce rôle immense, il pourrait devenir sans peine le meilleur Wotan de notre époque.
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Schillertheater, Berlin Le 17/04/2011 Hermann GRAMPP |
| Première aux Fesstage 2011 de l’Opéra de Berlin de la Walkyrie de Wagner mise en scène par Guy Cassiers et sous la direction de Daniel Barenboïm. | Richard Wagner (1813-1883)
Die Walküre, Première journée du festival scénique Der Ring des Nibelungen (1870)
Livret du compositeur
Coproduction avec la Scala de Milan
Staatskapelle Berlin
direction : Daniel BarenboĂŻm
mise en scène : Guy Cassiers
décors : Guy Cassiers & Enrico Bagnoli
costumes : Tim van Steenbergen
Ă©clairages : Enrico Bagnoli
vidéo : Arjen Klerkx & Kurt D’Haeseleer
choréographie : Csilla Lakatos
dramaturgie : Michael P. Steinberg & Detlef Giese
Avec :
Simon O’Neill (Siegmund), Anja Kampe (Sieglinde), Mikhail Petrenko (Hunding), René Pape (Wotan), Iréne Theorin (Brünnhilde), Ekaterina Gubanova (Fricka), Danielle Halbwachs (Gerhilde), Carola Höhn (Ortlinde), Ivonne Fuchs (Waltraute), Anaïk Morel (Schwertleite), Erika Wünscher (Helmwige), Leann Sandel-Pantaleo (Siegrune), Nicole Piccolomini (Grimgerde), Simone Schröder (Rossweisse). | |
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