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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Huitième Symphonie de Mahler sous la direction de Daniele Gatti au Théâtre du Châtelet, Paris.
Intense mais frustrant
Une aberration ! Tel est le premier choc que l’on ressent à l’annonce de la monumentale Huitième Symphonie de Mahler au Châtelet. N’est-ce pas faire entrer un éléphant dans une bonbonnière ? Le résultat est à la fois frustrant et fascinant, mais pourtant musicalement accompli, et sans doute le meilleur maillon de l’intégrale Mahler de Daniele Gatti.
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Le maestro italien Daniele Gatti s’impose de plus en plus à la tête de l’Orchestre national de France. À la fin des concerts, les musiciens l’applaudissent et il esquisse un sourire qui, pour ce froid Milanais, révèle un enthousiasme exubérant. Peut-être un jour, le verra-t-on rire ?
Cet éclair de joie sur le visage de Gatti, c’était vendredi dernier à l’issue de la Huitième Symphonie de Gustav Mahler, dont le chef et sa formation étalent sur trois saisons l’intégrale de l’œuvre. Cette intégrale est d’autant plus émouvante que Mahler dirigea lui-même en 1910 sa Deuxième Symphonie au Châtelet. La gigantesque Huitième dite « des Mille », parce qu’elle pourrait être interprétée par mille instrumentistes et chanteurs, n’a évidemment rien à faire dans ce lieu destiné à l’opéra ou à la comédie musicale.
En début de saison, le 8 septembre 2010, le chef russe Valery Gergiev et sa troupe du Mariinski de Saint-Pétersbourg avaient investi la salle Pleyel avec la même œuvre qui s’y épanouit à la limite de l’asphyxie. « La prochaine Huitième de Mahler, on la donnera peut-être à l'Athénée », susurre perfidement un de nos voisins. Voilà de quoi alimenter encore les tenants de la grande salle de la Philharmonie de Paris à la Villette. Ce serait le lieu idéal pour ce genre de pièce : les fondations de la Philharmonie sont en cours de travaux…
En attendant, au Châtelet, voici étriquée cette œuvre mi-symphonie, mi-oratorio et très opératique dont Mahler souhaitait qu’elle soit dispensatrice de joie et qu’elle terrasse les auditeurs. Les interprètes sont certes moins nombreux que les spectateurs qui envahissent le Châtelet mais peu s’en faut : sur scène plus de 400 exécutants essaient de se frayer une place.
Dès les premiers accords du vibrant Veni creator, on est dans la confusion, un melting pot sonore à la limite de l’audible, surtout depuis le milieu de la salle. Sans doute les auditeurs, puisque ce concert est diffusé en direct sur France Musique, ne souffrent-ils pas de cette collision sonore. Parfois, elle va jusqu’au vacarme, notamment lorsque les cuivres placés au second balcon sont en décalage avec l’orchestre. Sans doute ce concert aurait-il mérité davantage de répétitions.
Malgré tout cela, on est emballé, subjugué par la puissance émotionnelle de l’œuvre et de ses interprètes qui, peu à peu, se familiarisent avec la salle. Gatti joue alors un rôle essentiel, blottissant cette magnificence dans un écrin qui ne lui était pas destiné. Oui, en cette avant-veille de Pentecôte, on est ému par la supplique à l’Esprit saint, par ce texte mêlant latin et poème de Goethe évoquant la quête de Faust.
Douceur expressive, fantaisie romantique, l’orchestre est admirablement dosé par Gatti à travers les formations (Orchestre national, Chœur et Maîtrise de Radio France, Sächsiche Staatsoper Dresden) qui ne sont pas habituées à travailler ensemble. Les solistes sont impeccables, l’alto Marie-Nicole Lemieux est comme d’habitude émouvante, même si elle manque d’assurance. Là encore on sent l’insuffisance des répétitions.
Plus assurées sont les magnifiques Melanie Diener et Erin Wall. Les solistes hommes sont incontestablement supérieurs, habités par l’œuvre, notamment le formidable ténor Nikolaï Andreï Schukoff qui anime son chant de mimiques irrésistibles.
Si le chef Daniele Gatti a souvent déçu lors des premiers concerts de cette intégrale Mahler, il se rachète ici au centuple. Il donne à cette pièce difficile une cohérence, une intensité, une magie qu’on peut qualifier sans hésiter de mahlériennes.
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Théatre du Châtelet, Paris Le 10/06/2011 Nicole DUAULT |
| Huitième Symphonie de Mahler sous la direction de Daniele Gatti au Théâtre du Châtelet, Paris. | Gustav Mahler (1860-1911)
Symphonie n° 8 en mib majeur
Erin Wall (Magna Peccatrix)
MĂ©lanie Diener (Mater Gloriosa)
Kerstin Avemo (Una Poenitentium)
Christine Knorren (Mulier Samaritana)
Marie-Nicole Lemieux (Maria Aegyptiaca)
NikolaĂŻ Schukoff (Doctor Marianus)
Detlef Roth (Pater Ecstaticus)
James Morris (Pater Profondus)
Chœur de Radio France
Maîtrise Radio France
Chor der Sächsische Staastoper Dresden
préparation : Matthias Brauer
Orchestre national de France
direction : Daniele Gatti | |
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