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CRITIQUES DE CONCERTS |
30 octobre 2024 |
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La TĂ©tralogie au Festival de Bayreuth
Waltraud et Placido raflent l'anneau
Pour cette Tétralogie du millénaire, Bayreuth a invité le chef Giuseppe Sinopoli et le metteur Jürgen Flimm. Si leur contribution n'entrera sans doute pas dans la légende d'ici le crépuscule de la Mecque des wagnériens, on gardera un excellent souvenir des prestations de Waltraud Meier et Placido Domingo.
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Festival de Bayreuth,
Le 01/08/2000
Antoine Livio (1931-2001)
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Complicité artistique
Sombre Volga
Hommage au réalisme poétique
[ Tous les concerts ]
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Chaque metteur en scène peut lire cette oeuvre fleuve (quatorze heures de musique) selon ses options. Jürgen Flimm a situé l'action au début de l'expansion industrielle américaine. Ainsi une certaine mythologie des pionniers, à travers la production cinématographique, annule l'importance de l'espace-temps wagnérien (des siècles s'écoulent entre le prologue l'Or du Rhin et les trois journées la Walkyrie, Siegfried et le Crépuscule des dieux). Pour Flimm, l'action se resserre en trois générations, entre la construction des buildings de New-York et le " far-west ". De cette option découle une accumulation d'accessoires anecdotiques, allant de la crème à épiler les jambes des Filles du Rhin à l'ordinateur de Wotan.
Si l'Or du Rhin a toujours paru s'approcher de la comédie musicale, la tragédie wagnérienne s'instaure dès la Walkyrie, avec une dimension mythique indéniable. Or Flimm est plus à l'aise dans la parodie et la satire. Son sens du théâtre l'autorise à restructurer le livret, soit en faisant revenir sur scène des personnages qui n'y sont plus, mais dont la présence soudain éclaire l'action, soit en prévenant la suite des événements : tel personnage exécute sur scène ce qu'il chantera plus tard. Cet éclairage convient au mystère de ce drame du pouvoir entre les dieux, les nains (ou Nibelungen) et les géants. Car Flimm réutilise des éléments de décors, plaçant certaines actions dans le souvenir de lieux du passé. Ce jeu de la mémoire correspond tout à fait à l'esprit de Wagner et aux leit-motifs. Mais il manque pourtant de souligner une dimension essentielle : le mythe.
Tout n'est pas aussi bien structuré dans la direction d'orchestre de Giuseppe Sinopoli. S'il réussit à traduire avec subtilité les épisodes de l'Or du Rhin et la caractérisation des personnages, il devient imprévisible dans la tragédie, ralentissant à l'extrême les tempi au risque de mettre à mal les voix, ce qui fut le cas aussi bien pour Brünnhilde (Gabrielle Schnaut) que pour Siegfried (Wolfgang Schmidt, supérieur à sa prestation dans la précédente Tétralogie, mais pas encore à la hauteur du rôle !). Cette façon d'étirer les sons ralentit l'action et a détruit les effets comiques de la mise en scène du premier acte de Siegfried, où le jeune héros insupportable fait tout pour agacer le nain Mime afin d'être présent, quand Siegfried sera capable de tuer le dragon Fafner et s'emparer ainsi de l'Anneau qui confère le pouvoir absolu. Anneau que Mime a forgé sur l'ordre d'Alberich, son frère, mais que Wotan a subtilisé, puis dû remettre aux géants pour prix de la construction de son inexpugnable Walhalla, en l'occurrence un building impressionnant.
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Les héros de l'aventure sont les deux Albe : l'Albe noir (Alberich, le Nibelung) et Wotan. Certes Günther von Kannen campe Alberich depuis de nombreuses années, mais Flimm lui a permis de s'imposer davantage encore, en lui conférant une réelle densité psychologique. Alan Titus est un Wotan hors norme. Lui a-t-il fallu ce metteur en scène pour quitter son allure de baryton distingué ? le fait est qu'il rayonne et domine toute l'action ! L'ancien Wotan des Tétralogies de Kupfer et de Kirchner (John Tomlinson) a remporté un succès mérité dans le rôle de Hagen, le fils d'Alberich par qui le malheur final arrive.
Mais les deux triomphateurs de ce nouveau Ring sont les premiers enfants de Wotan, Sieglinde (Waltraud Meier) et Siegmund (Placido Domingo). Comédiens d'une intensité et d'une présence rares, chanteurs à la ligne vocale superbe, ils composent un duo exceptionnel qui fait de la Walkyrie - le seul ouvrage où ils apparaissent – le temps fort du Festival de Bayreuth 2000.
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L'anneau des Nibelungen de Richard Wagner
Direction musicale : Giuseppe Sinopoli
Mise en scène : Jürgen Flimm
Décors : Erich Wonder.
Costumes : Florence von Gerkan
Siegfried
Avec Wolfgang Schmidt (Siegfried), Michael Howard (Mime), Alan Titus (The Wanderer), Günter von Kannen (Alberich), Philip Kang (Fafner), Mette Ejsing (Erda),Gabriele Schnaut (Brünnhilde).
Valkyrie
Avec Placido Domingo (Siegmand), Philip Kang (Handing), Alan Titus (Odin), Waltraud Meier (Sieglinde), Gabriele Schnaut (Brünnhilde), Birgit Remmert (Fricka), Ricarda Merbeth (Gerhilde), Irene Theorin (Ortlinde), Judit Nemeth (Waltraute), Johanna Duras (Schwertleite), Eva Rydèn (Helmwige), Jane Irwin (Siegrune), Anette Jahns (Grimgerde), Yumi Koyama (Rossweisse)
lOr du Rhin
Avec Alan Titus (Odin), Hans-Joachim Ketelsen (Thor), Roland Wagenführer (Froh), Kim Begley (Loge), Johann Tilli (Fasolt), Philip Kang (Fafner), Günter von Kannen (Alberich), Michael Howard (Mime), Birgit Remmert (Fricka), Ricarda Merbeth (Freia), Mette Ejsing (Erda), Dorothee Jansen (Woglinde), Natascha Petrinsky (Wellgande), Laura Nykänen (Flosshilde)
le Crépuscule des dieux
Avec Wolfgang Schmidt (Siegfried), Hans-Joachim Ketelsen (Gunther), John Tomlinson (Hagen), Günter von Kannen (Alberich), Gabriele Schnaut (Brünnhilde), Ricarda Merbeth (Gutrune), Violeta Urmana (Waltraute), Mette Ejsing (1. Norn), Irmgard Vilsmaier (2. Norn), Eva Rydèn (3. Norn), Dorothee Jansen (Woglinde), Natascha Petrinsky (Wellgande), Laura Nykänen (Flosshilde)
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Festival de Bayreuth, Le 01/08/2000 Antoine Livio (1931-2001) |
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