|
|
CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
|
La Passion selon St-Matthieu par Philippe Herreweghe et le Collegium Vocale de Gand Ă l'Abbaye aux Dames de Saintes
Un débordement de passion
Après deux versions de référence au disque, une exécution de la Passion selon St-Matthieu par Philippe Herreweghe est toujours un événement au concert. Mais bien qu'il soit déjà un " vieux routier " de l'oeuvre, le chef belge a profité de son passage par son fief de Saintes pour tenter de nouvelles expériences.
|
Festival de Saintes, Abbaye aux Dames, Saintes
Le 23/07/2000
Eric SEBBAG
|
|
|
|
Bons baisers d’Eltsine
RĂ©gal ramiste
L'Étrange Noël de Mrs Cendrillon
[ Tous les concerts ]
|
Le récent enregistrement discographique de la St-Matthieu par Herreweghe laissait peu présager du concert de l'Abbaye aux Dames à Saintes le 23 juillet dernier. Dès le grand choeur d'ouverture, les gémissements du disque ("Venez, filles, aidez-moi à gémir") virent à de tempétueux éclats en sanglots. Au train d'enfer qui est adopté, "l'Agneau de Dieu" lui même file au galop. Dynamiquement, on quitte rarement le forte et le choeur d'enfant régional, qui collaborait pour la première fois avec Herreweghe, a du mal à faire passer son Cantus Firmus comme autre chose qu'un éclair de plus en plein orage. On retrouve la même énergie tumultueuse et la même urgence dans les chorals. "Aie pitié de nous, Ô Jesus !" catapulté comme un cri adressé aux cieux, pourquoi pas ? Mais lorsque les chorals sont plus violents et plus véhéments que les Turbae qui mettent en scène les déicides, on peut rester coi.
À l'évidence, le projet d'Herreweghe est de privilégier l'aspect dramatique. Mais un drame est d'autant plus efficace qu'il est construit, qu'il ménage une progression où chaque nouvel épisode enfonce un nouveau clou. Ici, le marteau n'a pas cet esprit de préméditation. Jusqu'aux éclairs et au tonnerre ("Sind Blitze, sind Donner") du grand double choeur – d'une incandescence et d'une fureur magnifique-, les airs se sont enchaînés très vivement, avec peu de contrastes de tempi et de dynamique. La passion vire au tourbillon.
Entracte. À Saintes, l'atmosphère est bon enfant et au café en face, on entend Philippe Herreweghe lui-même glisser malicieusement en passant "le Christ s'est échappé
". Cette fuite lui aura été bénéfique car le Collegium Vocale un peu déboussolé dans la première partie retrouve ses marques et s'apaise franchement après de l'épisode de Barrabas. On peut alors goûter à loisir les qualités des chanteurs. Au fil de ses interventions, Sybilla Rubens confirme une saisissante empathie avec le destin christique, mais il y a surtout Christoph Prégardien qui assume à la fois le rôle de l'Évangéliste et les tous les airs de ténor : jamais depuis Kurt Equiluz on avait entendu un chantre aussi habité par la Passion. À leurs côtés, le reste de la distribution est plus pâle, l'alto Ingeborg Danz par son effacement réussit même à transformer le sublime "Erbarme dich" en concerto pour violon.
Au final, si l'on a pas entendu la St-Matthieu la plus aboutie dirigée par Philippe Herreweghe, il est remarquable de constater que ce " vieux routier " de l'oeuvre est capable de tenter une nouvelle lecture à chaque concert. Une bonne raison de penser que la prochaine sera non moins passionnante.
| | |
|
Festival de Saintes, Abbaye aux Dames, Saintes Le 23/07/2000 Eric SEBBAG |
| La Passion selon St-Matthieu par Philippe Herreweghe et le Collegium Vocale de Gand Ă l'Abbaye aux Dames de Saintes | Passion selon saint Matthieu BWV 244 de Johann Sebastian Bach
Choeurs et orchestre du Collegium Vocale de Gand
Choeur d'enfants de l'Atelier choral régional
Direction : Philippe Herreweghe
Avec Sybilla Rubens (soprano), Ingeborg Danz (alto), Christoph Prégardien (ténor, Évangéliste), Sebastian Noack (basse) et Michael Volle (baryton, Jésus).
| |
| |
| | |
|