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CRITIQUES DE CONCERTS |
26 novembre 2024 |
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Huitième Symphonie de Bruckner par l’Orchestre de Paris sous la direction d’Herbert Blomstedt à la salle Pleyel, Paris.
Une cathédrale sonore
Telle apparaît la Huitième de Bruckner érigée par Herbert Blomstedt. En symbiose mystique avec le compositeur, dont il est aujourd’hui l’un des champions, le grand chef suédois en impose l’élévation et les dimensions cosmiques avec une ferveur toute d’exigence et d’évidence devant un public religieusement silencieux.
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Le geste économe et précis, droit, les pieds enracinés dans le sol, Herbert Blomstedt, 84 ans, dirige sans partition et sans le moindre signe de fatigue la plus monumentale symphonie de Bruckner, la Huitième, dernière symphonie achevée de cette importance avant la première de Mahler dans la sphère germanique.
Quatre-vingt-cinq minutes d’un engagement absolu dès les premiers motifs des basses. Une sonorité rare où s’intègre l’expressivité des violons. Ce sont les archets de l’Orchestre de Paris qui ce soir imposent une couleur pleine, nuancée et magnifiquement homogène à ce premier mouvement d’une gravité habitée. Cors et trompettes y jettent leurs interventions avec un éclat plein de la retenue dont Blomstedt marque le recueillement de sa direction.
Les contrastes du Scherzo n’en sont pas moins des plus volontaires. L’énergie s’y propage sobrement d’un pupitre à l’autre telle une marée musicale qui monte et se soulève sans vague déferlante soudaine et excessive. Mais si les cuivres participent brillamment à l’irrésistible flot maîtrisé de main de maître, les bois souvent décalés s’y perdent parfois.
L’immense troisième mouvement, Adagio, majestueusement lent, mais sans traîner, nous élève tranquillement mais irréversiblement vers le sublime. Le chef suédois, la respiration puissante et calme, érige en visionnaire mystique la cathédrale sonore osée par Bruckner. La démesure s’exalte dans une forme d’épure dont la tension est particulièrement sensible. Cuivres et cordes échangent et unissent magnifiquement leurs sonorités.
Est-ce aussi la disposition de l’orchestre immense (les huit contrebasses, les bois par trois, la grande distribution des cuivres, trois Wagner-tuben, trois harpes…), altos et violoncelles de face et au centre encadrés à droite et à gauche par les violons, qui contribue à cette fusion des cordes rarement atteinte aussi profondément et lui donnent sa plénitude ? Le chant qui conclut les étapes gravies vers un paradis ici retrouvé n’en est pas moins radieux.
Le Finale nous empoigne immédiatement. Les cuivres marquent sa détermination. Véritable épopée, il évolue en évocations et transfigurations impressionnantes vers un contrepoint gigantesque où se retrouvent les thèmes des quatre mouvements, et cet exploit lumineux aux basses, trompettes, vents aigus, cors et trombones, aboutit à l’apothéose de l’œuvre aux dimensions cosmiques dans une clarté religieuse.
Le triomphe fait au chef et à l’orchestre, demeuré assis pour mieux applaudir le démiurge de ce grand moment, les en remercie. Après lequel point n’était besoin de donner en bis le Scherzo de la Deuxième Symphonie, un supplément inutile et incongru, quoique dans la même tonalité d’ut mineur.
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Salle Pleyel, Paris Le 27/09/2012 Claude HELLEU |
| Huitième Symphonie de Bruckner par l’Orchestre de Paris sous la direction d’Herbert Blomstedt à la salle Pleyel, Paris. | Anton Bruckner (1824-1896)
Symphonie n° 8 en ut mineur, A 117
Orchestre de Paris
direction : Herbert Blomstedt | |
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