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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Récital de Leif Ove Andsnes dans la série Piano aux Champs-Élysées au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
Le rêve de l’architecte
Le Norvégien Leif Ove Andsnes est un pianiste intelligent. Tout ce qu’il touche, des œuvres les plus construites comme la fugue de la Sonate n° 28 op. 101 de Beethoven ou le Liszt des Harmonies poétiques et religieuses aux plaisantes valses de Chopin données en bis lors de ce concert, est beau comme un théorème : rien ne lui échappe, tout est limpide.
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Face à une salle attentive et au début un peu sur la réserve, jouant un piano réglé pour favoriser une sonorité grasse et ample, Leif Ove Andsnes débute son récital avec la Sonate n° 22 de Beethoven, peu jouée en raison de son caractère austère, partition en deux mouvements qui sent un peu l’inachèvement. Il ne cherche pas à lui faire dire ce qu’elle ne dit pas. Dans le premier mouvement, son jeu transparent mène simplement les idées musicales à leur terme, il ne laisse rien en chemin.
Dans une pulsation inexorable, caractéristique de son jeu, il démontre la difficulté d’être de cette musique qui se fait pour mieux se défaire. Musique en devenir dont le caractère de recherche est encore plus flagrant dans le deuxième mouvement que le pianiste traite comme un diabolique perpetuum mobile irrigué d’accents.
Son art réside dans une suggestion discrète qui rend justice à une œuvre presque maladroite et difficile à rendre. L’Opus 101 s’imposait donc ensuite, qui ouvre Beethoven à lui-même, un portique pour entrer dans son ultime période de composition. Ici, la narration s’impose. Andsnes ne joue pas la poésie mais le récit, et il a raison.
Il veut faire comprendre que la fugue qui sortira de ce nœud gordien de thèmes et d’idées musicales toutes novatrices est le seul moyen d’assembler les matériaux. En adoptant une attitude rigoureuse, en registrant ses palettes de sonorité comme un organiste, le pianiste donne au discours beethovénien une solidité de roc et met à nu l’exploration de cette nouvelle planète nommée encore par défaut sonate.
Après cette première partie conçue comme une planche tracée d’architecte, l’introspection, la poésie, le lâcher prise dominent la seconde. L’attitude a changé, le pianiste ne regarde plus vers le ciel avant de jouer. Son grand corps bouge enfin et pendant l’impressionnante pièce de Liszt intitulée Pensée des morts, il donne l’impression de respirer l’air d’une autre planète.
Sa sonorité a changé, plus compacte, plus orchestrale. Les grands accords lisztiens sonnent comme des glas, en puissance et en profondeur. La salle retient son souffle. On attend Chopin comme pour se délasser et effectivement, le célèbre Nocturne en ut mineur brille d’une lumière éclatante.
Fidèle à lui même, Andsnes impose une pulsation volontaire, évite le rubato et fait entendre des détails inattendus. Chopin parle en rêvant. Dans la Quatrième Ballade, le pianiste propose une lecture objective, minutieuse où l’esprit de Beethoven semble souffler à la surface de Chopin, notamment dans sa conclusion où le compositeur concentre sans les développer ses nombreuses idées musicales comme si le temps venait à lui manquer.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 05/04/2013 Olivier BERNAGER |
| Récital de Leif Ove Andsnes dans la série Piano aux Champs-Élysées au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Sonate n° 22 en fa majeur op. 54
Sonate n° 28 en la majeur op. 101
Franz Liszt (1811-1886)
Pensées des morts
Frédéric Chopin (1810-1849)
Nocturne en ut mineur op. 48 n° 1
Ballade n° 4 en fa mineur op. 52
Leif Ove Andsnes, piano | |
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