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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Bien que champion du répertoire de clarinette, l'Octuor de France a débuté son concert par le Quatuor à cordes en fa majeur de Ravel. De la première à la dernière mesure, Yuriko Naganuma, le premier violon, a distillé un impressionnant cocktail de passion et de maîtrise instrumentale, tout particulièrement remarquable dans la section en pizzicati au début du second mouvement. Le final fut négocié avec un égal brio et Naganuma entraîna ses complices dans des méandres de rythmes changeants, de trémolos et d'arpèges vifs sans le moindre heurt. En plus d'une très grande habileté dans la section en pizzicati de l'Allegro, le violoncelliste Paul Broutin a manifesté pour sa part un merveilleux discernement dans son traitement des notes tenues du troisième mouvement, or il s'agit là d'un élément vital de l'oeuvre du jeune Ravel car emblématique de son art déjà très personnel de pétrir la pâte sonore des cordes. Globalement, l'interprétation de l'oeuvre a néanmoins fait ressortir les influences debussystes sur la composition de Ravel, avec des crescendo et diminuendo très marqués à l'alto et au violoncelle ; autant d'effets sonores qui composaient plus qu'un simple hommage au Prélude à l'après-midi d'un Faune.
Changement de siècle pour la seconde partie du programme avec le Quintette pour clarinette et cordes en si mineur op.115 de Brahms. Écrit en 1894, cette oeuvre est le fruit de la collaboration du compositeur avec le clarinettiste Richard Mühlfeld. Or l'essence du style de l'instrumentiste place l'expressivité avant la virtuosité, l'oeuvre de Brahms est par conséquent emprunte de ce même esprit. À cet égard, le phrasé sûr et l'expression chaleureuse de Jean-Louis Sajot s'est révélé en parfaite osmose, même si l'Allegro aurait gagné en cohésion avec un jeu un peu mieux lissé. L'exécution de l'Adagio fut particulièrement équilibrée grâce à une clarinette assurant avec clairvoyance la continuité des phrases relayées entre violons, alto et violoncelle. Tout aussi impressionnant, le final Con moto vit Sajot assumer avec une belle assurance les quelques passages virtuoses, soutenu avec une égale solidité et souplesse par Naganuma et Sylvie Sentenac au second violon. S'il y a une réserve à formuler, elle concerne le troisième mouvement, l'Andantino, qui parut un rien décousu, léthargique et dépourvu de l'étincelle perceptible dans les autres mouvements. Il y eut aussi un léger moment de flottement dans l'entrée des violons, mais ceux-ci rétablirent rapidement le cap.
Au final, l'Octuor de France -ici rétrécit à cinq musiciens- laisse néanmoins une impression de grande maîtrise technique alliée à une compréhension intuitive du répertoire chambriste. Autant de qualités qui font de cet ensemble un peu trop méconnu, un "calibre" en chambre.
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Orangerie du Parc de Bagatelle, Boulogne Le 06/08/2000 Linda MURRAY |
| L'Octuor de France à l'Orangerie du Parc de Bagatelle. | Octuor de France
Ravel : Quatuor à cordes en fa majeur – Brahms : Quintette pour clarinette et quatuor à cordes op.115.
visiter le site de l'Octuor de France
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