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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concerts de l’Orchestre philharmonique de Berlin sous la direction de Sir Simon Rattle et du Konzerthausorchester Berlin sous la direction d’Ilan Volkov aux Berliner Festspiele 2013.
Berliner Festspiele 2013 (2) :
Deux orchestres berlinois
Une semaine après les avoir entendu à la salle Pleyel dans deux programmes très différents, c’est une autre facette de leur talent qu’ont montré les Berliner Philharmoniker dirigés par Simon Rattle pour leur deuxième programme de rentrée qui s’inscrivait dans la programmation des Berliner Festspiele avec trois œuvres du XXe siècle.
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Dans leur propre écrin à l’acoustique miraculeuse, les Berliner ont l’avantage sur tous les autres orchestres entendus pendant ces quelques jours d’en user à la perfection. C’est flagrant dans la virtuosissime Symphonie n° 2 de Lutoslawski (1967) qui joue énormément du contrepoint entre groupes instrumentaux et manie les contrastes sonores de façon extrême.
La partie concerto était remplie par les Chants d’un compagnon errant de Mahler joués dans l’adaptation de Schoenberg. Rattle en donne une interprétation extrêmement bien ciselée, équilibrant parfaitement ses forces pour souligner l’orchestration simple et chatouillante de Mahler. Comme dans son enregistrement tout récent avec Kent Nagano, Christian Gerhaher nous semble un peu monotone dans son expression et quelque peu à distance du texte.
La Messe Glagolitique de Janáček compte au rĂ©pertoire des Berliner Philharmoniker, qu’ils l’ont enregistrĂ©e avec Rattle. C’est une Ĺ“uvre riche et qui met Ă l’épreuve un immense chĹ“ur et quatre solistes dans une rĂ©partition assez peu traditionnelle des phrases de ce rituel slavon du IXe siècle. On ne peut imaginer une plus belle interprĂ©tation mĂŞme si l’orchestre a parfois tendance Ă couvrir un peu trop les solistes (sauf la soprano japonaise Mihoko Fujimura, douĂ©e d’une prodigieuse projection). L’excellence du chĹ“ur tchèque, le ChĹ“ur philharmonique de Brno, est l’atout suprĂŞme de cette rĂ©alisation.
L’alternative à la Philharmonie est le Konzerthaus situé dans la partie médiane de la ville. Chargé d’histoire, l’ancien Schauspielhaus construit par Schinkel en 1821 vit pour son inauguration la première mondiale du Freischütz de Weber et plus tard celle posthume de l’adaptation scénique de la Penthésilée de Kleist.
Le concert du Konzerthausorchester Berlin, du temps de la DDR le Berliner Sinfonie Orchester (alors la phalange de Kurt Sanderling) rebaptisé après la Réunification, n’était de loin pas le plus fréquenté de ce festival, un dimanche soir pluvieux et soir de la répétition du concert des Berliner.
C’est cependant un de ceux au programme le plus attractif, et qui a bien tenu ses promesses. Le chef israélien Ilan Volkov était certainement le meilleur choix, (et une rupture dans le culte des chefs) pour donner une unité à ce concert qui commençait par une des pièces les plus modernes de Lutoslawski, ses Jeux vénitiens, créée à la Biennale de Venise de 1961, qui comporte une part importante de notation aléatoire particulièrement pour le rythme laissé à l’appréciation de l’orchestre.
L’unique Concerto pour piano de Britten qui suit, œuvre de jeunesse révisée plus tardivement et très évidemment influencé par Ravel et Prokofiev, tranche singulièrement. Le jeune pianiste virtuose britannique Benjamin Grosvenor, actuellement le vent en poupe, ne fait qu’une bouchée de cette pièce virtuose et démontre aussi des qualités de sonorités certaines.
C’est une excellente occasion d’entendre ce prodige de vingt ans en dehors du répertoire soliste dans lequel on peut surtout l’entendre actuellement sur les scènes européennes après sa rapide promotion à la suite d’un excellent premier enregistrement paru chez Decca.
Beaucoup plus personnelle de style et intéressante est la Sinfonia de Requiem (1940) qui, pour l’anecdote, avait été commandée pour une commémoration de l’Empire japonais et payée par le gouvernement, au plus fort des hostilités diplomatiques de la Seconde Guerre mondiale, et ensuite refusée.
Avec ses trois mouvements qui empruntent leurs titres Ă la liturgie du Requiem, c’est une Ĺ“uvre très Ă©mouvante par son recueillement qu’Ilan Volkov imprime Ă cette excellente phalange. Mais c’est avec la grande virtuositĂ© du Taras Bulba de Janáček qu’il aura mis en valeur toutes ses qualitĂ©s instrumentales et narratives.
Signalons pour finir que quoiqu’excellente, la fréquentation de ce festival laisse un assez grand nombre de places libres, sauf pour les concerts (répétés deux fois) des Berliner eux tout à fait complets.
Reformulons par ailleurs un souhait déjà exprimé lors de précédentes éditions des Berliner Festspiele, que les programmes de salle, si bien réalisés, soient édités de façon bilingue, compte tenu de la forte présence de spectateurs étrangers (les asiatiques prédominant cette année) à un moment de forte fréquentation touristique de la capitale allemande.
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Philharmonie, Berlin Le 08/09/2013 Olivier BRUNEL |
| Concerts de l’Orchestre philharmonique de Berlin sous la direction de Sir Simon Rattle et du Konzerthausorchester Berlin sous la direction d’Ilan Volkov aux Berliner Festspiele 2013. | 07 septembre (Philharmonie) :
Witold Lutoslawski (1913-1994)
Symphonie n° 2 (1967)
Gustav Mahler (1860-1911)
Lieder eines fahrenden Gesellen (1884)
Christian Gerhaher (baryton)
Leoš Janácek (1854-1928)
Messe glagolitique (1926)
Luba Orgonášová (soprano)
Mihoko Fujimura (mezzo-soprano)
Stuart Skelton (ténor)
Christian Gerhaher (baryton)
Chœur tchèque philharmonique de Brno
préparation : Petr Fiala
Christian Schmitt, orgue
Berliner Philharmoniker
direction : Simon Rattle
08 septembre (Konzerthaus) :
Benjamin Grosvenor, piano
Witold Lutoslawski (1913-1994)
Jeux vénitiens (1961)
Benjamin Britten (1913-1976)
Concerto pour piano et orchestre op. 13 (1938, rév. 1945)
Sinfonia da Requiem op. 20 (1940)
Leos Janácek (1854-1928)
Taras Bulba (1918)
Konzerthausorchester Berlin
direction: Ilan Volkov | |
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