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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert de l’Orchestre de Paris sous la direction de David Zinman avec la participation du violoniste Nikolaj Znaider, salle Pleyel à Paris.
Somptueuses redécouvertes
Inspiré par le centenaire de la naissance de Benjamin Britten, David Zinman a permis au public de découvrir ou de mieux connaître, à la tête de l’Orchestre de Paris, deux œuvres magnifiques du compositeur anglais, avant une interprétation somptueuse du Concerto pour violon de Beethoven avec Nikolaj Znaider en soliste inoubliable.
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Messe de Requiem purement orchestrale, l’œuvre que Benjamin Britten compose en 1940, à 26 ans, en pleine bataille d’Angleterre, témoigne d’une gravité dont David Zinman, à la tête de l’Orchestre de Paris, aura pénétré l’expressivité sans paroles mais ô combien émouvante. La voix seule d’un Orchestre de Paris au mieux de son homogénéité donne à entendre le déchirement accablé de ce manifeste déclaré tel par son auteur contre la Seconde Guerre mondiale qui ensanglante alors l’Europe.
Dramatique, prenant, un lourd battement rythmique à la percussion ouvre le Lacrymosa. Les cordes basses émergent de ce glas. Dans ce sombre climat, le saxophone alto, désolé, précède la dramatique stridence des cors, trompettes et trombones. La tension du Dies irae tient du chaos, où les pupitres mêlés et opposés gardent leur clarté, les crescendi et arrachements de la percussion exaltant cette apocalypse d’une main de maître.
Requiem aeternam, les flûtes invitent à la paix, le doux balancement des harpes soutiennent cette prière, les violons montent vers la lumière des notes hautes. David Zinman complète son hommage à Britten avec ses Quatre interludes marins tirés Peter Grimes. De l’aube à la nuit, ils condensent la psychologie des personnages de l’opéra et le décor sous-jacent d’un petit port de pêche du Suffolk.
Le premier Interlude, Dawn, se situe après le bref prologue de l’opéra. Peinture d’atmosphère, il nous vaut une belle alliance des flûtes et des violons au mieux de leurs aigus – vol et cris des mouettes ? Les cuivres et la grosse caisse évoquent la houle qui gronde au large.
Sunday morning prélude au deuxième acte. Sonneries de cloches aux quatre cors, bois scintillants, embrasement de l’orchestre : dimanche est jour de fête. Moonlight ouvre le troisième acte. Mouvement lent, il progresse en un choral dont la direction nette, calmement impérative de David Zinman dépouille les profondeurs émotives.
Storm, situé entre les deux tableaux du premier acte, tient lieu de final à l’œuvre symphonique. Tempête des cordes, entrechocs des cuivres, les éléments toujours présents se déchaînent. À défaut de la présence de Peter Grimes, la partition livre les aspérités et la sauvagerie de son caractère.
On croit le connaître par cœur, ce chef-d’œuvre de Beethoven, unique Concerto pour violon qu’il compose en 1806, au cœur d’une période foisonnante. Mais la découverte de sa richesse est inépuisable quand ses interprètes en donnent tout à aimer. L’entente de Nicolaj Znaider et de David Zinman permet un de ces moments exceptionnels.
Dès son entrée, sur la pulsation régulière des timbales, l’orchestre chante son attente du soliste, mais une attente sereine, sûre d’elle, de son désir et de la fusion qui lui répondra. Celui-ci, grand, droit, apparemment imperturbable, entre dans la partition avec la même intériorité rayonnante.
Envol du Kreisler, un Guarnerius del Gesu de 1741. Plénitude, profondeur, assurance, unissent alors un orchestre et un violoniste aux réactions contrastés. Ce thème à l’orchestre que le violon ne joue jamais les personnalise magnifiquement. À la violence parfois du premier répond le lyrisme du second. La sobriété des nuances en éclaire la splendeur. La cadence subjugue, ses harmonies sobrement éblouissantes.
Sur des pianissimi de rêve reviennent les cordes et l’entente se renouvelle entre les deux héros du concerto. Bonheur et poésie du Larghetto. Dialogue réel avec les bois. Leur chant répond à la pureté du son, droit, effilé, au phrasé magnifiquement tenu. La verve du Rondo final s’épanouit dans la course passionnée des musiciens unis pour le meilleur de leur joie commune. Des accents de victoire concluent les défis de ce classicisme somptueux, dont l’aisance n’a d’égale que l’exigence.
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Salle Pleyel, Paris Le 09/10/2013 Claude HELLEU |
| Concert de l’Orchestre de Paris sous la direction de David Zinman avec la participation du violoniste Nikolaj Znaider, salle Pleyel à Paris. | Benjamin Britten (1913-1976)
Sinfonia da Requiem, op. 20
Quatre interludes marins, tires de l’opéra Peter Grimes, op. 33a
Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Concerto pour violon en ré majeur, op. 61
Nikolaj Znaider, violon
Orchestre de Paris
direction : David Zinman | |
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