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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Cycle Schubert du pianiste Daniel BarenboĂŻm Ă la Philharmonie de Paris.
Schubert par intermittence
Parallèlement à la sortie, chez Deutsche Grammophon, d’un coffret de cinq CD consacré aux sonates de Schubert, Daniel Barenboïm proposait les œuvres en quatre récitals à la Philharmonie de Paris, un tour de force ne dissimulant pas quelques tunnels ici ou là , y compris dans les meilleures interprétations, celles des trois dernières sonates.
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Combien d’interprètes sont capables de jouer en une semaine onze sonates de Franz Schubert, sans jamais utiliser une partition sur scène ? Ainsi en est-il de Daniel Barenboïm à la Philharmonie de Paris, assis devant son nouvel instrument, spécialement conçu pour lui d’après un piano de 1868 vu à Weimar
Le soliste débute lundi la Sonate n° 4 D.537 dans la sobriété. Il faudra attendre que passe l’Allegro, ma non troppo et une moitié de l’Allegretto pour qu’il trouve réellement ses repères, l’entrée en matière souffrant d’un léger manque de dextérité et même de quelques petits accrocs, dans une partition rarement jouée où le pianiste s’essaie à de nouvelles propositions. Le même sentiment se fera sentir le vendredi lors de la Sonate n° 9 D.575, alors que ces deux pièces de jeunesse sont plus fluides dans l’enregistrement du coffret paru chez Deutsche Grammophon.
La Sonate n° 13 en la majeur D.664 montre plus de maturité chez un compositeur qui, à tout juste 22 ans, a déjà dépassé les deux tiers de sa vie. Le son devient plus personnel et le soliste adapte les doigtés avec une extrême retenue dans un Allegro moderato modèle pour le déployer ensuite dans un Andante qui respire par lui-même. Le piano laisse découvrir un son à la fois plus modéré et plus personnel que celui des Steinway commandés par la Philharmonie de Paris, les cordes droites et non croisées comme c’est la norme aujourd’hui, lui procurant un timbre d’une grande délicatesse.
Le vendredi, la Sonate n° 18 en sol majeur D.894 jouée en deuxième position prend également de l’ampleur par rapport à la précédente mais affiche une fatigue passagère, tout comme la Sonate D.845 dimanche, dynamique quoiqu’assez appuyée dans l’Allegro vivace et étonnamment fébrile auparavant.
Après les entractes, les trois dernières sonates montent chaque soir d’un cran et ne peuvent que convaincre. Le son s’épanouit complètement dans l’Allegro de la Sonate n° 20 en la majeur D.959, où seuls quelques accords rapides sont encore négociés avec quelque difficulté. L’Andantino, si mélancolique, composé par un homme à l’aube de la mort, extériorise avec génie une douleur intérieure que Daniel Barenboïm retranscrit sans jamais rechercher ni pathos ni excès effusifs. Cette sonate sera peut-être la meilleure interprétation du cycle, suivie de peu par la Sonate n° 19 D.958, tandis que l’ultime Sonate en sib majeur D.960 déçoit dans un Andante sostenuto trop prudent dans l’expression, et ne trouve qu’un moment de grâce dans la partie lente du premier mouvement, Molto moderato.
Malgré ces limites, ce cycle de concerts aura montré la maîtrise et l’intelligence toujours impressionnante de Daniel Barenboïm, qui a largement convaincu un public debout aux applaudissements dès le premier soir, malgré les remontrances du pianiste pour limiter les quintes de toux et interdire les photos, mêmes lors des saluts.
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Philharmonie, Paris Le 24/05/2015 Vincent GUILLEMIN |
| Cycle Schubert du pianiste Daniel BarenboĂŻm Ă la Philharmonie de Paris. | Franz Schubert (1797-1828)
11 Sonates pour piano
Daniel BarenboĂŻm, piano
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