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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Version de concert de l’Orfeo de Monteverdi sous la direction de John Eliot Gardiner à la Galerie des Glaces du Château de Versailles.
Un Orfeo majeur
Dernier volet du voyage d'automne à Versailles de John Eliot Gardiner avec un inoubliable Orfeo de Monteverdi dans le cadre somptueux de la Galerie des Glaces. Instrumentistes des English Baroque Soloists, Monteverdi Choir et d’exceptionnels solistes magnifient l'ouvrage fondateur de l'opéra moderne au point de faire oublier l'absence de mise en scène.
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Favola in Musica ? L'invention du poème lyrique qui, sous la plume de Monteverdi, accède pour la première fois au rang d'art majeur. L'œuvre (opera) change le mot en sons et transforme les vers de Striggio en matière musicale, étoffe l'imaginaire de l'auditeur de décors fantasmés et mystérieux. En élargissant l'univers du madrigal à la dimension du théâtre musical, Monteverdi donne au chant soliste une fonction dramatique tout à fait inouïe.
Si le Palais ducal de Mantoue servait d'écrin à la création de l'ouvrage en 1607, c'est aujourd'hui la Galerie des Glaces de Versailles, cadre tout aussi émouvant et symbolique, qui accueille les représentations en version concert de cet Orfeo. Tout juste remis des émotions des Vêpres à la Chapelle Royale, le public se presse sous les plafonds peints de Charles Le Brun pour venir écouter John Eliot Gardiner à la tête du Monteverdi Choir et des English Baroque Soloists.
Palliant l'absence de mise en scène par une subtile mise en espace, les chanteurs organisent un jeu d'entrées et sorties hors champ avec les coulisses adjacentes. Les célèbres miroirs permettent de garder un œil sur la battue du chef même si celui-ci tourne le dos aux chanteurs. À cette alternance s'ajoute le fait qu'à l'exception des rôles principaux, les solistes sortent successivement du chœur et y retournent, créant une sensation d'unité de style et d'interprétation.
Peu importe au fond que Mariana Flores ne soit pas l'Eurydice la plus incarnée, ou qu’Andrew Tortise (Pastore 1 et Apollon) traîne un vilain rhume. On pourrait également prendre sa loupe et ajouter çà et là plusieurs imprécisions des cornets à bouquin… rien n'y fait : on navigue ici entre ciel et terre à un niveau d'interprétation rarement atteint.
La divine fraîcheur de Francesca Aspromonte (Musica, Messagiera) contraste avec la noirceur abyssale de Gianluca Buratto (Caronte, Plutone) ou la ligne majestueuse de Francesca Boncompagni (Proserpina). L'Orfeo de Krystian Adam ajuste une projection très généreuse au soin apporté au phrasé. Cet alliage de virtuosité et de grâce convainc de bout en bout.
Tour à tour volubile ou volontiers agressive, la battue de Gardiner joue la carte d'une expressivité mise au service du sens et des effets. On reste confondu face à la grandeur et la maîtrise qui se dégagent de cette entreprise.
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Galerie des Glaces, Versailles Le 09/11/2015 David VERDIER |
| Version de concert de l’Orfeo de Monteverdi sous la direction de John Eliot Gardiner à la Galerie des Glaces du Château de Versailles. | Claudio Monteverdi (1567-1643)
L'Orfeo, favola in musica en un prologue et cinq actes (1607)
Livret d'Alessandro Striggio
Francesca Aspromonte (La Musica / la Messagiera)
Krystian Adam (Orfeo)
Esther Brazil (Ninfa)
Andrew Tortise (Pastore 1 / Apollo)
Gareth Treseder (Pastore 2)
James Hall (Pastore 3)
David Shipley (Pastore 4)
Mariana Flores (Euridice / Speranza)
Gianluca Buratto (Caronte)
Francesca Boncompagni (Proserpina)
Nicholas Mulroy (Spirito 1)
Gareth Treseder (Spirito 2 / Eco)
David Shipley (Spirito 3)
Monteverdi Choir
English Baroque Soloists
direction : Sir John Eliot Gardiner | |
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