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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Récital d’Olga Peretyatko accompagnée par l’Accademia Bizantina sous la direction d’Ottavio Dantone dans la série des Grandes voix au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
Cocottes à la russe
La très jolie Olga Peretyatko est venue, dans le cadre des Grandes Voix au TCE, donner une démonstration de chant orné rossinien. Avec une tendance à en faire un peu trop en tous domaines, la soprano russe nous a quand même éblouis par la facilité de sa technique et par les possibilités d’une voix exceptionnelle à certains égards.
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Dès son entrée en scène, Olga Peretyatko, que n’a précédée aucune introduction orchestrale comme c’est rarement le cas dans ce genre de concert, annonce la couleur. Robe rouge et révérence comme à la cour d’Angleterre, elle s’empare d’un micro habilement dissimulé sur son pupitre. Dans un excellent français, elle sacrifie d‘emblée à la tradition de cette sympathique série qui veut que les Grandes Voix montrent qu’elles savent aussi parler.
Petite introduction gentille et on passe aux choses sérieuses. En l’occurrence, l’air « très difficile » comme elle nous en a prévenu, du Voyage à Reims : Partir, o ciel desio. Et les merveilles pyrotechniques vont fuser toute la soirée, à l’exception d’un air de Tancredi, moins agité et où la cantatrice révèle en fait ses meilleures qualités.
Le Voyage à Reims, le Turc en Italie, Sémiramis, Tancrède, et pour finir en apothéose, Mathilde de Sabran, autant d’occasions pour Peretyatko de justifier la place avantageuse qu’elle tient en tête du box office lyrique dans ce répertoire et dans celui de son propre pays aussi. Née à Saint-Pétersbourg, c’est à Berlin qu’elle a peaufiné son art, ce qui explique peut-être l’impression de posséder deux voix qu’elle nous a donnée.
Cette voix est très longue, aussi aisée et présente du suraigu au grave où elle n’a même pas besoin de poitriner pour se faire entendre. Elle est d’une souplesse parfaite, vocalisant à ravir, même si on ne pratique plus aujourd’hui le style instrumental mis en valeur dans les années 1950 et 1960 par les Berganza, les Sutherland ou un peu après par June Anderson, technique où chaque note des vocalises était distinctement audible. Un souffle, aussi, quasi inépuisable, comme elle se plaît à l’accompagner d’un charmant moulinet de la main pour le souligner au cas où on ne s’en apercevrait pas.
En faire toujours un peu trop, voilà sans doute le défaut majeur de cette belle artiste. En effet, on retrouve dans sa voix, quand elle force le son, ce qui arrive souvent, ou quand elle veut trop balancer ses aigus, la traditionnelle stridence des voix et de la technique russe. Dommage, d’autant que le timbre n’a pas lui-même une douceur exceptionnelle ! En revanche, soudain, c’est une autre voix que l’on entend, avec des sons filés, mezza voce, d’une limpidité et d’une lumière admirables, qu’un phrasé modelé justement par ce souffle alors bien utilisé met en valeur.
Il est possible que ce soit le résultat de deux enseignements différents, même si l’école russe a bien évolué elle aussi vers plus de douceur que jadis. Ou bien cette voix est peut-être simplement en pleine évolution. Trente-cinq ans est un âge souvent critique pour ce genre de voix. Les vrais lyriques de naissance en sont à leurs plus belles années, mais les sopranos plus légers se dirigent souvent vers des emplois plus lourds quand les moyens veulent bien s’alourdir un peu. Une Lucia Popp a réussi le passage de la Reine de la Nuit à la Maréchale et à la Comtesse qu’une Natalie Dessay ou une Rita Streich n’ont pu franchir.
À suivre, car l’artiste en vaut la peine, même si elle devrait calmer un peu ses gestes mélodramatiques et ne pas multiplier les volées de baisers envoyés sans cesse à la ronde. Sympathique, mais un peu cabotin quand même. Parvenue sans doute au bout de son répertoire rossinien, Olga Peretyatko, après un premier bis voué à l’air de Rosine du Barbier de Séville, ne put, devant l’insistance du public, que reprendre en deuxième bis le deuxième partie dudit air… avant de se retirer après une ultime révérence encore plus profonde mettant en valeur sa ligne dans la deuxième robe rouge portée après l’entracte.
La partie orchestrale était assurée par l’Accademia Bizantina et Ottavio Dantone, avec finesse et des sonorités que l’on n’entend pas toujours dans ce répertoire. Du goût et un joli style.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 11/01/2016 Gérard MANNONI |
| Récital d’Olga Peretyatko accompagnée par l’Accademia Bizantina sous la direction d’Ottavio Dantone dans la série des Grandes voix au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Gioacchino Rossini (1792-1868)
Le Voyage à Reims, Il Signor Bruschino, le Barbier de Séville, le Turc en Italie, Semiramide, Tancrède, Mathilde de Sabran, extraits
Olga Peretyatko, soprano
Accademia Bizantina
direction : Ottavio Dantone | |
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