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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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La Belle Hélène de Jacques Offenbach au théâtre du Châtelet.
À chacun son Hellène
La critique n'est pas une science exacte et altamusica aime à confronter les points de vue pour permettre à ses lecteurs de se faire une religion. Notre collaborateur Michel Parouty n'avait pas apprécié la mise en scène et avait de sérieuses réserves sur la direction musicale, Gérard Mannoni qui a sans doute gardé une âme d'enfant est en revanche un inconditionnel du spectacle.
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Pour que vive l'oeuvre d'Offenbach, il est indispensable d'en retrouver les clés, c'est-à -dire les équivalences exactes de ce qui paraissait à l'époque comique, parodique, audacieux, divertissant, satyrique. Reflets d'une société assez pourrie, dont les problèmes de fond n'étaient pas si différents des nôtres quant aux inégalités, aux guerres et aux pitreries des politiques, la plupart de ces partitions sont marquées du saut de la franche gaieté, voire du délire intégral comme Orphée aux Enfers.
Les deux approches les plus intéressantes sont celles que l'on pourrait appeler "à la Martinoty", c'est-à -dire en donnant corps à tous les symboles sociaux et politiques sous-jacents, et celle "à la Laurent Pelly", c'est-à -dire en recréant les mécanismes du rire théâtral, à la manière des branquignoles. L'essentiel est de ne pas rater son coup. Avec cette Belle Hélène, Pelly, Minkowski et leurs équipes ont prouvé qu'il était possible aujourd'hui de faire crouler une salle de rire avec ces personnages et cette histoire archi-connue, sans jamais sombrer dans la vulgarité ni dans le cliché à la mode.
Tout est complètement fou dans ce spectacle, le décor et les costumes mélangeant comme dans un cauchemar burlesque antiquités et modernité, le comportement des héros animés d'étranges mécanismes chorégraphiques, le choix de la très distinguée Dame Felicity Lott pour incarner cette coquine d'Hélène. Et quelle incarnation ! Chaque geste est juste, chaque intonation est exacte, chez cette grande fille raffinée mais tellement prête à s'encanailler. Il y a du Vacances romaines (1) dans cette débauche-là , car la vie avec un mari comme le Ménélas crampon si finement campé par Sénéchal doit être encore pire que l'étiquette de la cour d'Angleterre. Alors, tout faire pour y échapper, même en rêve, même en deux rêves superposés ! Là est vraiment le moteur de l'action et de la parodie et c'est ce que la mise en scène traduit sans relâche.
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C'est vif, rapide, malin, servi par des personnalités comiques qui se confirment comme celle de Naouri en Agamemnon, ou qui se révèlent comme celles de François Le Roux en Calchas, de Marie-Ange Todorovitch en Oreste, de Felicity Lott, en premier, et même de Yann Beuron, excellent en bellâtre rusé. On chante bien, on joue bien, on bouge comme au ballet, la musique fuse, les dialogues légèrement revisités aussi. Il faut être bien blasé et quelque peu repu pour bouder face à tant de talent et de pétillante intelligence théâtrale et musicale.
Lire aussi l'avis moins favorable de Michel Parouty
(1) Un film de William Wyler
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