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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Nouvelle production de Fidelio de Beethoven dans une mise en scène de Harry Kupfer et sous la direction de Daniel Barenboïm à la Staatsoper de Berlin.
Libérez Beethoven !
Avec des noms tels Harry Kupfer, Daniel Barenboïm et une distribution comprenant Andreas Schager et Matti Salminen, tout était réuni pour une grande production de Fidelio à la Staatsoper de Berlin. Mais ni l’idée du metteur en scène sur la liberté ni une direction sans nerf ne parviennent à soutenir un plateau jamais transcendant.
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Puisqu’il existe quatre versions de Fidelio, libre aux artistes d’adapter l’ouvrage à leurs idées et de choisir d’ouvrir avec Leonore II, sans approuver ensuite la tradition mahlérienne d’insérer Leonore III avant la scène finale. C’est ainsi que Daniel Barenboïm propose l’unique opéra beethovénien à Berlin, en modifiant également quelques numéros, notamment entre le duo initial et l’air de Marzelline, sans que l’on trouve une réelle valeur historique à ces options, pourtant certainement défendables face aux années d’hésitation du maître de Bonn.
Pour autant, des doutes sur la direction apparaissent dès les premières minutes. Souvent très lent, le tempo subit rallentendi et accelerandi brusques, détachés du discours dramaturgique et rarement associés à un gain de dynamique ou de tension. L’ouverture se présente alors sans réelle cohésion et comme une suite d’effets amalgamés. Les mêmes questions se posent en termes de volume, car malgré des piani souvent marqués ou à l’inverse de lourds forte suivis d’interminables silences, on peine à trouver un véritable contraste et un soutien au plateau. Le Staatsopernchor, pas toujours parfaitement en place, n’apporte pas non plus la lumière ou la vigueur escomptées.
À 81 ans, Harry Kupfer signe une mise en scène – sa cinquième de Fidelio – faible dans un décor unique de Hans Schavernoch. L’idée simpliste, annoncée dès l’ouverture par un buste de Beethoven sur un piano Bechstein, puis par les partitions en mains des protagonistes tout au long de l’opéra, est celle de la musique apportant la liberté. Pour renforcer cette notion, au tableau final revient l’image déjà vue en préambule du Musikverein de Vienne, à prendre comme une allégorie de la musique pure, choix d’autant plus surprenant que cette salle n’existait pas du vivant du compositeur. En résumé : la musique, et particulièrement celle de Beethoven, est là pour sauver l’humanité et rendre le monde meilleur.
Une idée guère suffisante pour soutenir une dramaturgie peu novatrice laissant souvent les artistes libres, habillés de costumes années 1970. Les femmes ressortent de la distribution et l’on découvre avec plaisir la belle Marzelline d’Evelin Novak, qui possède l’avantage d’une ligne de chant particulièrement bien placée et se démarque dans les ensembles, notamment dans le quintette final du I, tandis que l’on prend également plaisir à écouter son soupirant Jaquino, bien campé par le jeune ténor Florian Hoffmann.
Camilla Nylund surprend dans le rôle de Leonore, là où une Senta semble plus adaptée qu’une Elsa pour la tessiture. La voix paraît d’abord effectivement sous-dimensionnée mais finit par développer un beau médium et réussit à l’emporter dans le duo du II, face au Florestan très bien endossé par un Andreas Schager beaucoup moins à l’aise que Jonas Kaufmann dans les parties piano, mais engagé et volontaire pour lancer ses aigus sur la liberté.
Matti Salminen fait ses adieux à Rocco sans masquer un timbre autant qu’un physique fatigués, plus encore que ceux de l’autre vétéran du plateau, Falk Struckmann, surtout impressionnant dans la diction de Don Pizarro ; point d’autant plus important qu’il n’y a pas de surtitrage dans la salle. Roman Trekel en Don Fernando conclut une distribution de grands noms dont peine à se dégager un chanteur idéal pour son rôle, et d’où s’extrait finalement la belle Marzelline.
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