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CRITIQUES DE CONCERTS |
31 octobre 2024 |
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Reprise de Lucia di Lammermoor de Donizetti dans la mise en scène d’Andreï Serban, sous la direction de Riccardo Frizza, à l’Opéra de Paris.
Lucia mon amour
Dans une mise en scène que personne ne songerait Ă huer aujourd’hui, Pretty Yende endosse le rĂ´le de Lucia di Lammermoor pour conduire le public Ă la folie. Standing ovation dès la fin de la troisième aria et applaudissements Ă n’en plus finir, tandis qu’autour d’elle ressortent surtout le frère Enrico Ashton de Artur Ruciński et un ChĹ“ur de l’OpĂ©ra de Paris en grande forme.
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Loin de la controverse subie par la mise en scène à sa création en 1995, et pour poursuivre l’analyse de Michel Parouty déjà défenseur de la reprise avec June Anderson en 2000, on trouve dans la proposition d’Andreï Serban non seulement un regard toujours aussi intelligent, mais en plus l’un des décors les plus agréables à regarder parmi les productions actuelles de Lucia sur les scènes internationales. Les idées du voile funéraire sur la robe de mariée ou des hommes en noirs parapluies ouverts, mélange de plusieurs tableaux de Magritte, accompagnent encore superbement le drame en 2016.
Intérêt principal de cette reprise, la soprano lyrique sud-africaine Pretty Yende ouvre la première distribution avant de laisser la place en novembre à la colorature Nina Minasyan. Sa présence scénique électrique ailée pourra déplaire à l’auditeur recherchant vocalises nettes, notes filées et diction parfaite, mais emportera tous les autres sur son passage. Car cette voix charnue autant que charnelle développe une fantastique émotion, ressentie dès Regnava nel silenzio et plus encore dans Quando rapito in estasi. Dans l’air de la folie, chanté pour l’occasion avec flûte et non harmonica de verre, elle met le public à genou pendant dix minutes avant qu’il ne se lève comme un seul homme dès la dernière note.
Autour d’elle ressort l’Enrico Ashton d’Artur Ruciński, intĂ©ressant par la prĂ©sence et l’engagement autant que par le chant, auquel on reprochera toutefois un caractère trop monochrome, surtout face Ă la palette de nuances dĂ©ployĂ©e par Pretty Yende. Piero Pretti est un amant vaillant, touchant mĂŞme dans Tu che a Dio spiegasti l'ali, mais manquant de finesse, sans tomber non plus dans les sonoritĂ©s ingrates du second tĂ©nor, l’Arturo d’Oleksiy Palchykov. Gemma NĂ Bhrian assez effacĂ©e en Alisa est presque inaudible dans le sextuor vocal, dans lequel se dĂ©ploient Ă l’inverse les graves bien posĂ©s du Raimondo de Rafal Siwek.
Riccardo Frizza accompagne d’une battue précise mais non exempte de lourdeur un plateau qu’il ne perd jamais. Des cordes ressortent de belles envolées lyriques comme de jolis soli, mais les attaques manquent de franchise et l’effectif orchestral peut-être suffisant pour Garnier semble trop léger à Bastille, d’autant qu’encore une fois pour ce répertoire l’orchestre est enfoncé à plus de deux mètres en fosse. Des vents se démarque forcément la flûte, dont le soutien impeccable de justesse pour l’aria principale s’accorde à la chanteuse par ses magnifiques sonorités. Enfin le Chœur de l’Opéra de Paris intervient avec chaleur ou froideur selon la partition, mais toujours dans une couleur parfaitement adaptée au bel canto italien.
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Opéra Bastille, Paris Le 17/10/2016 Vincent GUILLEMIN |
| Reprise de Lucia di Lammermoor de Donizetti dans la mise en scène d’Andreï Serban, sous la direction de Riccardo Frizza, à l’Opéra de Paris. | Gaetano Donizetti (1797-1848)
Lucia di Lammermoor, opéra en deux parties
Livret de Salvatore Cammarano, d’après une nouvelle de Walter Scott
Chœur et Orchestre de l’Opéra national de Paris
direction : Riccardo Frizza
mise en scène : Andreï Serban
décors & costumes : William Dudley
Ă©clairages : Guido Levi
préparation des chœurs : José Luis Basso
Avec :
Artur Ruciński (Enrico Ashton), Pretty Yende (Lucia Ashton), Piero Pretti (Edgardo di Ravenswood), Oleksiy Palchykov (Arturo Bucklaw), Rafal Siwek (Raimondo Bidebent), Gemma NĂ Bhrian (Alisa), Yu Shao (Normanno). | |
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