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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert du London Philharmonic Orchestra sous la direction de Robin Ticciati, avec la participation de la violoniste Anne-Sophie Mutter au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
Maturité et jeunesse
Une célébrité consacrée et un jeune chef de bel augure ont donné des bonheurs différents à une salle comble des admirateurs de la première et des attentistes du second. Pour sa première venue à Paris à la tête du grand orchestre anglais, Robin Ticciati partageait l’affiche avec l’inclassable et magnifique violoniste allemande Anne-Sophie Mutter.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris
Le 14/11/2016
Claude HELLEU
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Elle n’en fait qu’à sa tête mais le fait si bien. Anne-Sophie Mutter peut tout se permettre et ne s’en prive pas. Fascinante d’aisance, de maîtrise et d’indépendance d’esprit, la violoniste a personnalisé comme bon lui semblait le Concerto n° 2 en mi mineur de Mendelssohn. Sans trop se soucier de respecter la sobriété de son classicisme, c’est avec un parfait naturel qu’elle en a surligné certains affects, gênant en cela plus d’un amoureux du célèbre concerto.
Mais la légèreté incroyable de l’archet, la magie des aigus, la profondeur des graves, la respiration du phrasé, la sonorité étirée à l’infini, l’articulation ciselée, les accélérations folles d’une cadence unique, le vibrato à volonté idéal ou stoppé net suivent leur cours sans jamais y faillir. Que ce cours déborde en amont ou en aval relève d’une détermination superbement assumée. Karajan n’est plus là pour encadrer la belle, blonde, droite et jeune quinquagénaire moulée d’un fourreau de satin crème, épaules et bras nus libres.
Sereinement audacieuse, elle ose écarts et divergences sans jamais perdre un orchestre qui la suit idéalement. À la tête du London Philharmonic, Robin Ticciati, la jeunesse respectueuse et attentive, a choisi d’accompagner sa soliste au gré de la théâtralité de son interprétation. Passion parfois sauvage ou rêverie follement sentimentale relèvent d’une expressivité si sincère et résolue qu’elle exclut toute référence.
Est-ce pour en compenser les dĂ©bordements que Robin Ticciati dirige la Neuvième Symphonie de Dvořák avec une prĂ©cision aussi dĂ©capĂ©e ? Après Manfred, brĂ»lante ouverture de Schumann Ă la noirceur prometteuse malgrĂ© quelques dĂ©calages Ă l’orchestre, les attaques saisissantes, la souplesse aussitĂ´t revenue d’une battue dont l’ampleur s’allie Ă la rigueur servent au mieux le caractère multiple de la dernière symphonie du compositeur bohĂ©mien. Sa nettetĂ© dynamise la complexitĂ© du Nouveau Monde Ă©voquĂ© sur des thèmes dont Dvořák revendique une paternitĂ© Ă laquelle il a donnĂ© « les particularitĂ©s de la musique des Noirs et des Peaux-rouges ».
Séduction des rythmes pointés et syncopés, couleurs des harmonies, jeux des contrepoints s’éclairent sous l’engagement du chef et du London Philharmonic Orchestra. Les bois fusionnels avec les cordes qui ouvrent l’Adagio-allegro molto, le cor enchanteur y créent un climat mystérieux où l’enjouement, la danse, la fougue prennent brillamment place. Au cœur de cuivres grandioses, le cor anglais poétise un Largo au lyrisme charmeur. Le Scherzo molto vivace, tout à son allant, danse, bondit, s’excite. La vitalité puissante mais aussi parfois pensive de l’Allegro con fuoco final enchaîne ses contrastes souplement, crescendo et decrescendo d’une densité fluide.
L’entente parfaite, l’homogĂ©nĂ©itĂ© des pupitres nuancent et rĂ©vèlent la partition foisonnante. Rien ne manque au relief de la plus populaire des symphonies de Dvořák. Pourtant notre bonheur reste calme. Serait-ce justement la jeunesse de Robin Ticciati qui limite la profondeur, l’exaltation de cette parfaite sobriĂ©tĂ© ? Ă‚gĂ© de 33 ans, dĂ©jĂ chef principal du Scottish Chamber Orchestra depuis 2009, directeur musical du festival de Glyndebourne depuis 2014, tout porte Ă croire que la rĂ©ussite de son prĂ©sent ne saura que toujours mieux nourrir la transcendance de son avenir.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 14/11/2016 Claude HELLEU |
| Concert du London Philharmonic Orchestra sous la direction de Robin Ticciati, avec la participation de la violoniste Anne-Sophie Mutter au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Robert Schumann (1810-1856)
Manfred, ouverture op. 115
Felix Mendelssohn (1841-1904)
Concerto pour violon et orchestre n° 2 en mi mineur op. 64
Anne-Sophie Mutter
Antonin Dvořák (1841-1904)
Symphonie n° 9 en mi mineur op. 95 « Du nouveau Monde »
London Philharmonic Orchestra
direction : Robin Ticciati | |
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