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CRITIQUES DE CONCERTS |
22 décembre 2024 |
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RĂ©cital du pianiste Jean-Philippe Collard Ă la salle Gaveau, Paris.
Splendeurs du romantisme
Dans une salle Gaveau archicomble, Jean-Philippe Collard, avec un programme purement romantique, a rappelé la place prépondérante qu’il occupe parmi les plus grands virtuoses actuels. Rapport exceptionnel avec l’instrument, vision vaste et généreuse du langage pianistique opulent de Schumann comme de Chopin, un ardent moment de bonheur pour nous.
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Il a toujours eu un dialogue instinctif et direct avec ces grands pianos de concert et leur littérature si vaste. Il en tire des sons tour à tour opulents, riches, orchestraux ou d’une sensibilité à fleur de peau, d’un lyrisme et d’un dessin d’une pureté bouleversante. On comprendra aisément que tout cela permet à des pages du plus absolu romantisme comme la Fantaisie op. 17 de Schumann ou Sonate Funèbre de Chopin, de vibrer sur toute l’étendue des sentiments, humeurs, élans, colères ou apaisements qui les structurent et s’y opposent souvent.
Après une Arabesque de Schumann fluide comme un rêve de poète avec sa nostalgie, ses teintes d’angoisses et ses harmonies subtiles, c’est la plongée dans les tumultes de la Fantaisie, univers contrasté, passant des plus ardents bouillonnements à une intériorité quasi pudique, avec ce thème central d’une nostalgie qui déchire l’âme. Du grand piano orchestral, puissant, avec ses cascades d’accords, ses traits incandescents, entrecoupé de retours à la simple mélodie.
Les sonorités trouvées par Collard sont fabuleuses de puissance quand il le faut, mais sans jamais rappeler que l’instrument frappe sur des cordes. On songe plutôt à la masse d’un orchestre et puis les doigts passent des traits vertigineux au simple phrasé épuré d’une phrase de mélodie, avec la même aisance, le même naturel. Ces pages son certes chargées de tout le contexte psychologique et de toute la culture du compositeur, mais c’est la synthèse sonore par laquelle il a voulu parler à notre sensibilité qui triomphe ici.
La Sonate Funèbre de Chopin relève elle aussi de cet univers typiquement romantique où la terreur de la mort n’a d’égale que l’angoisse de la vie, où l’on poursuit des ombres inquiétantes qui s’enfuient et vous échappent, où l’on trouve quand même quelques moments aptes au rêve qui s’évade en mélodie quasi bellinienne. La violence du désespoir, l’amertume ne sont jamais bien loin et Collard, avec des sonorités habiles, soyeuses ou plus menaçantes, un phrasé totalement intelligent et dessiné avec grand art, rend irrésistible ce voyage au fond des âmes.
L’apaisant Nocturne en ut mineur op. 48 n° 1 et la Quatrième Ballade apporte un complément d’émotions contrastées dans cet univers où la fureur n’est jamais seulement faite de bruit, s’oppose au songe teinté de paix et rayonne d’une richesse sonore que seul le piano à ce très haut niveau peut servir sans la trahir. Un CD La Doce Volta, consacré à la Fantaisie et aux Kreisleriana, permettra à ceux qui n’ont pu assister à ce concert de retrouver au moins le monde de Schumann traduit avec toute cette vérité et cette inspiration.
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Salle Gaveau, Paris Le 21/02/2017 GĂ©rard MANNONI |
| RĂ©cital du pianiste Jean-Philippe Collard Ă la salle Gaveau, Paris. | Robert Schumann (1810-1856)
Arabesque op. 18
Fantaisie op. 17
Frédéric Chopin (1810-1849)
Sonate n° 2 en sib mineur op. 35 « Funèbre »
Nocturne op. 48 n° 1 en ut mineur
Ballade n° 4 en fa mineur
Jean-Philippe Collard, piano | |
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