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CRITIQUES DE CONCERTS |
31 octobre 2024 |
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Nouvelle production de Wozzeck dans une mise en scène de Krzysztof Warlikowski et sous la direction de Marc Albrecht à l’Opéra d’Amsterdam.
Wozzeck et ses tourments
Revenant à Berg après l’une des plus belle Lulu jamais vue, Krzysztof Warlikowski réitère l’exploit avec une mise en scène d’une force et d’une intelligence incroyable pour Wozzeck. La distribution met en avant la prise de rôle de Christopher Maltman et la superbe Marie d’Eva-Maria Westbroek, avec en fosse un Marc Albrecht très attentif à l’action dramatique.
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Genève il y a quelques semaines, Francfort ou Zurich la saison passée, Paris prochainement, Salzbourg cet été, depuis sa création en 1925 à Berlin, Wozzeck est devenu un incontournable pour lequel plusieurs nouvelles productions apparaissent dans le monde chaque année. Krzysztof Warlikowski s’y intéresse pour une première collaboration avec le Dutch Opera d’Amsterdam, après être déjà passé à la Monnaie de Bruxelles par Lulu, dans une mise en scène qui a fait exploser Barbara Hannigan aux yeux du grand public.
Sa proposition sur le premier opĂ©ra de Berg suit les fantasmes et les tourments de l’artiste polonais, avec toujours des dĂ©cors sublimes d’onirisme de Małgorzata Szczȩśniak, assistĂ©s par les Ă©clairages de Felice Ross et les vidĂ©os de Denis GuĂ©guin. Ses dĂ©tracteurs seront contents de la lignĂ©e d’urinoirs Ă cour, seulement lĂ pour contrebalancer une rangĂ©e de fauteuils de salon de coiffure Ă jardin. Warlikowski applique d’autre part ce qu’il utilise dans chaque mise en scène, tĂŞtes de Mickey sur corps d’enfants, poupĂ©es vivantes au brushing volumineux façon Tim Burton, ou enfants Ă la scène finale costumĂ©s avec les habits colorĂ©s identiques Ă ceux du final de sa Femme sans ombre de Munich.
Pour autant rien n’est gratuit et l’on s’enfonce avec un suivi rigoureux du livret dans les méandres des visions maladives de Franz Wozzeck, de son vrai nom Johann Christian Woyzeck, pendu en 1824 après avoir été reconnu sain d’esprit par le docteur Clarus, et donc coupable et responsable du meurtre de sa femme en 1821. Le metteur en scène polonais développe toujours la même démarche syllogistique dans son travail, alliage d’une culture cinématographique et d’intérêt pour les éléments et sensations malléables de notre monde.
Quand Wozzeck rase son capitaine, les costumes font référence au film des frères Cohen The Barber, l’histoire d’un homme trompé. Le Docteur de Willard White est de couleur noire, donc on retrouve la robe rouge de Marie pour un rapport de force blanc-noir tiré du film Far from Heaven de Todd Haynes, histoire d’une crise maritale au milieu de tension raciale. Des dizaines d’autres références seraient analysables, mais nous retiendrons tout particulièrement la danse des enfants par deux en costumes de gala à l’ouverture de rideau, avant que la musique de Berg ne commence, et l’image de l’aquarium dans lequel Wozzeck s’ouvrira les veines à rougir l’eau de sang, et son fils jetant des morceaux d’organes dedans, prélevés à un mannequin en plastique pour finir par lancer le cœur.
En fosse, Marc Albrecht accompagne le drame consciencieusement, avec un son clair qui recherche tout de même un fondu des masses, sauf lors de soli très bien mis en avant, notamment au premier alto dès la cadence de la scène I. Il sait maintenir un rythme rigoureux même lors des marches militaires (scène III) ou passacailles (scène IV) et se servir de percussions explosives, enfoncées tout à jardin, quand on soulignera également la justesse des cuivres et les superbes interventions du célesta et du basson.
Sur le plateau, Christopher Maltman ne réinvente pas un rôle tenu par les plus grands barytons depuis près d’un siècle, mais traite son personnage malade avec brio tant dans la nervosité des gestes que dans l’élocution et la dynamique vocale. À ses côtés ressort la Marie d’Eva-Maria Westbroek, d’abord en retrait puis impressionnante. Son mari dans la vie de tous les jours est ici son amant, un Frank van Aken bien présent et précis en Tambourmajor, supérieur dans les seconds rôles au Capitaine de Marcel Beekman, en difficulté dans l’aigu. Ursula Hesse von den Steinen campe une Margret exubérante et Jason Bridges un Andres stable et bien adapté aux variations de situations face à Wozzeck. Enfin, on retiendra Willard White, passionnant sur la scène d’Amsterdam pour porter avec clarté et gravité un docteur sûr de lui devant ses patients, moins confiant devant les problèmes.
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De Nederlandse Opera, Amsterdam Le 21/03/2017 Vincent GUILLEMIN |
| Nouvelle production de Wozzeck dans une mise en scène de Krzysztof Warlikowski et sous la direction de Marc Albrecht à l’Opéra d’Amsterdam. | Alban Berg (1885-1935)
Wozzeck, opéra en trois actes et quinze scènes (1925)
Livret du compositeur d’après la pièce de Büchner
Nieuw Amsterdams Kinderkoor
Koor van De Nationale Opera
Nederlands Philharmonisch Orkest
direction : Marc Albrecht
mise en scène : Krzysztof Warlikowski
dĂ©cors & costumes : Małgorzata Szczȩśniak
Ă©clairages : Felice Ross
vidéo : Denis Guéguin
chorégraphie : Claude Bardouil
préparation des chœurs : Ching-Lien Wu & Eline Welle
Avec :
Christopher Maltman (Wozzeck), Frank van Aken (Tambourmajor), Jason Bridges (Andres), Marcel Beekman (le Capitaine/ l’Idiot), Sir Willard White (le Docteur), Eva-Maria Westbroek (Marie), Ursula Hesse von den Steinen (Margret), Scott Wilde, Franz Morschi (Compagnons), Richard Prada, Livio Gabrielli (Soldats). | |
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