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CRITIQUES DE CONCERTS |
22 novembre 2024 |
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Fantasio de Jacques Offenbach à l'Opéra de Rennes.
Offenbach taquine Musset
L'Opéra de Rennes vient d'orchestrer la résurrection d'une oeuvre rare d'Offenbach qui n'était plus entendue depuis 1872. Si dès sa création à l'Opéra-Comique, ce Fantasio s'est soldé par un échec, la partition ambitieuse méritait d'être soustraite à l'oubli. La dynamique production rennaise lui a rendu un peu de son panache.
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Avec Fantasio, tous ceux qui ne voyaient en Offenbach qu'un pourvoyeur en divertissements délurés en furent pour leur frais. Il adapte ici Musset (probablement avec l'aide de Paul, le frère du poète) et quitte sa défroque d'amuseur pour une parure plus légère, teintée de mélancolie et d'une vision de la vie qui n'est pas sans amertume. Fantasio rêve, donc, jeune bourgeois munichois qui, sous le vêtement d'un bouffon décédé, vient en aide à une princesse menacée d'un mariage sans amour. C'est peu de dire que la partition est un ravissement ; on y retrouve, bien sûr, la gouaille offenbachienne, dans certaines marches ou quelques choeurs et duos, mais le plus souvent une délicatesse qui n'a d'égale que l'invention mélodique. Qu'on ne s'en laisse pas conter : cette musique, sous des apparences faciles, exige beaucoup des interprètes.
La première qualité de l'équipe rennaise, outre sa jeunesse, c'est son élocution : on perd rarement un mot, une syllabe. Qui plus est, tous savent chanter, et bien. Iane Rouleau (la princesse Elsbeth) fait crânement face aux moments les plus virtuoses ; on regrette, pourtant, que son timbre soit parfois strident, et qu'elle impose constamment à son personnage une retenue qui frise l'effacement. Christophe Crapez évite de charger inutilement le rôle de Marinoni, et Franck Leguérinel, qui maîtrise le style français avec franchise et subtilité, campe un Prince drôle et léger, ridicule et touchant. Offenbach avait d'abord conçu le rôle de Fantasio pour le ténor Victor Capoul ; c'est finalement une mezzo-soprano, Célestine Galli-Marié, qui l'avait créé mais à Vienne, trois jours après la première parisienne, il était revenu à un ténor.
Martial Defontaine l'incarne avec un timbre clair et doux, une grande aisance dans les notes piano, et une profonde compréhension d'un héros habile à manier les masques. Jean-Yves Aizic a élaboré une reconstitution orchestrale à partir d'une partition piano-chant ; Claude Schnitzler la dirige avec une certaine sécheresse ; il est vrai que l'Orchestre de Bretagne est plutôt avare d'homogénéité sonore. Philippe Léonard a imaginé des costumes aux couleurs acidulées et un décor tournant, efficace (mais pas très beau !) dans lequel s'inscrit la mise en scène intelligente et élégante de Vincent Vittoz. Une redécouverte au charme certain, et un pas de géant vers Les Contes d'Hoffmann.
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Opéra, Rennes Le 23/10/2000 Michel PAROUTY |
| Fantasio de Jacques Offenbach à l'Opéra de Rennes. | Fantasio de Jacques Offenbach)
Orchestre de Bretagne
Direction musicale : Claude Schnitzler
Mise en scène : Vincent Vittoz.
Avec Iane Rouleau (Elsbeth), Martial Defontaine (Fantasio), Franck Leguérinel (le Prince), Christophe Crapez (Marinoni). | |
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