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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Missa solemnis de Beethoven par le Rundfunkchor Berlin et les Berliner Philharmoniker sous la direction de Christian Thielemann Ă la Philharmonie de Berlin.
Beethoven pour l’éternité
Sommet de la saison berlinoise, Christian Thielemann vient diriger les Philharmoniker pour une Missa solemnis d’exception. L’orchestre est en excellente forme, le chœur et les solistes d’une qualité rare, et sous la direction du génial Kapellmeister, un miracle intervient sous le toit de la Philharmonie de Berlin.
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Le premier accord est flou et diffus. Est-ce dû à la battue étrange et intentionnellement imprécise de Christian Thielemann, qui donne les premiers temps en haut en forçant les musiciens à s’écouter mutuellement ? Cette gestique n’a rien à voir avec la technique de Furtwängler, mais produit le même effet. Or lorsque le son vient, lentement, il grandit avec le thème du Kyrie à la clarinette (superbe Wenzel Fuchs), repris par le hautbois puis la flûte, avant que l’excellent Rundfunkchor Berlin ne lance son premier appel au tout puissant, avec une majesté qui ne quittera plus la salle jusqu’à la fin.
Certes, les conditions étaient réunies pour une exécution mémorable : les Berliner Philharmoniker, le Rundfunkchor Berlin, quatre solistes de grande classe, cet étrange et merveilleux espace de la Philharmonie et la direction de Thielemann, grand beethovénien devant l’éternel. Mais ce qui se passera au cours de ces quatre-vingt-deux minutes de concert dépassera toutes les attentes.
Pour commencer, Thielemann trouve dès le début le ton juste et la pulsation idéale, un tempo naturel et organique qui semble émaner de la musique elle-même, assurée par un pupitre des contrebasses de luxe, dont Carlos Kleiber disait qu’on pouvait reconnaître sa sonorité à l’aveugle en quelques secondes, créant une ligne directrice que le chef allemand remplit avec un souffle puissant.
Au cœur d’une soirée d’exception, quelques moments sublimes. Dans le Kyriesubito piano juste avant le quatuor des solistes sur Christe. Quand le tempo devient Andante assai ben marcato, souligné par les archets forts des cordes, le volume est soudain réduit mais l’intensité demeure, l’orchestre préparant en toute délicatesse l’entrée des solistes.
Luba Orgonášová remplace Genia Kühmeier en cultivant un chant très fin et brillant, alors qu’Elisabeth Kulman répand son alto chaleureux et séduisant. Le ténor Daniel Behle est radieux, d’émission jamais métallique, face à un Franz-Josef Selig prouvant une nouvelle fois qu’il est l’une des grandes basses d’oratorio de notre temps.
Au début de l’Agnus Dei, la couleur particulière et mystérieuse des cors et des bassons, aussitôt accompagnés par les autres bois, introduit une conclusion d’exception, culminant dans le double Dona nobis pacem du chœur. Les coups de timbale solitaires dans le silence semblent venir de l’au-delà en indiquant un autre monde, joués avec une telle finesse et une telle intensité par Rainer Seegers que la salle en a le souffle coupé.
Reste le fameux solo de violon du Benedictus, qui peut rapidement tomber dans le kitsch. Mais ce soir, le Konzertmeister Daniel Stabrawa, à l’allure modeste, presque embarrassée, et pourtant d’une musicalité à la hauteur des quatre solistes vocaux, commence à répandre un chant céleste pendant que le chœur psalmodie tout bas. L’occasion aussi de redire à quel point, contrairement à une légende infondée, Beethoven peut être, à l’égal de Mozart et Schubert, un fabuleux mélodiste.
D’une maîtrise toujours aussi absolue, Thielemann assure par cœur une volonté, une pensée et une tension de la première à la dernière mesure. Un tonnerre d’applaudissements prouve que cette impression est partagée, et une fois n’est pas coutume, lors des saluts, c’est le meilleur timbalier du monde, Rainer Seegers, qui reçoit la plus belle ovation.
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Philharmonie, Berlin Le 15/12/2017 Hermann GRAMPP |
| Missa solemnis de Beethoven par le Rundfunkchor Berlin et les Berliner Philharmoniker sous la direction de Christian Thielemann Ă la Philharmonie de Berlin. | Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Missa solemnis op. 123 (1824)
Luba Orgonášová, soprano
Elisabeth Kulman, alto
Daniel Behle, ténor
Franz-Josef Selig, basse
Daniel Stabrawa, violon solo
Rundfunkchor Berlin
préparation : Philipp Ahmann
Berliner Philharmoniker
direction : Christian Thielemann | |
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