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CRITIQUES DE CONCERTS |
31 octobre 2024 |
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Reprise de la Traviata de Verdi dans la mise en scène de Benoît Jacquot et sous la direction de Dan Ettinger à l’Opéra de Paris.
La Traviata des aléas
La défection de dernière minute d'Anna Netrebko ajoute à la déception pour cette reprise de la Traviata par Benoît Jacquot à Bastille, dont la mise en scène peine toujours autant à convaincre. Pas irréprochable, la direction de Dan Ettinger joue de l'urgence et du sentiment pour sauver une entreprise qui trouve dans le Germont de Plácido Domingo des raisons d'espérer.
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Pour beaucoup, Benoît Jacquot avait gagné ses galons de metteur en scène d'opéra avec Werther en 2010. Son approche néo-classique s'est heurtée dans la Traviata à une approche par trop monolithique et des décors dont l'encombrement ne permettait pas de tirer le meilleur du livret. L'Olympia de Manet sert de modèle unique à une action qui exige sans doute une récurrence moins assénée. On y gagne une Annina absurdement grimée en femme noire, histoire de correspondre exactement au tableau, et un lit dont l'immensité confine à l'absurde (le chat noir en moins).
L'extrême lisibilité se double d'une direction d'acteurs qui peine à convaincre, comme en témoignent ces choristes contraints à marcher d'avant en arrière ou les très inutiles figurants statufiés sur les marches du gigantesque escalier en attendant un bal changé en curieuse espagnolade avec bohémiennes et matadors travestis… Ni l'éclat des crinolines, ni la mise impeccable des vestons noirs et hauts de forme ne peuvent dissimuler la minceur d'un propos scénique ici réduit à de simples contours qui ne permettent pas à ce spectacle de s'élever au-delà d'un Visconti du pauvre.
Des huées (honteuses) accueillent le pauvre porte-parole de la direction, chargé d'annoncer que Plácido Domingo est souffrant. Faisant suite à la défection de dernière minute d'Anna Netrebko, la nouvelle indigne un public qui oublie un peu vite que l'opéra est un art vivant et fait d'aléas… Qu'on se rassure tout de suite : sa prestation est tout à fait honorable, malgré l'étrangeté d'un timbre mixte qui peine à faire oublier que Giorgio Germont est le père d'Alfredo. La voix du désormais baryton trouve dans le jeu d'acteur la véhémence et la fougue qui lui permet de réussir son duo avec Violetta. Seule la dernière scène le trouvera à court de moyens, la voix se dérobant dans les ultimes moments.
Disons-le tout de suite : la Violetta de Marina Rebeka ne saurait être comparée à l'illustre absente que le public pleurait avant même de pénétrer dans la salle. Si l'émission est sûre et homogène, une relative tendance à la dureté lui interdit les demi-teintes et les détails qui distinguent les grandes tragédiennes. Charles Castrovono est un honnête Alfredo mais sans le rayonnement dans le timbre qui lui permettrait faire exister son personnage au-delà d'une simple crédibilité.
Dan Ettinger dirige pour la seconde fois cette production ; sa battue engagée et volontaire se heurte à une tendance régulière à accentuer les fins de phrase, comme pour en extraire le suc et la sentimentalité. Le chœur y perd également en cohésion et en impact – une fois de plus : dommage !
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Opéra Bastille, Paris Le 25/02/2018 David VERDIER |
| Reprise de la Traviata de Verdi dans la mise en scène de Benoît Jacquot et sous la direction de Dan Ettinger à l’Opéra de Paris. | Giuseppe Verdi (1813-1901)
La Traviata, opéra en trois actes (1853)
Livret de Francesco Maria Piave d’après Alexandre Dumas fils
Chœurs et Orchestre de l’Opéra national de Paris
direction : Dan Ettinger
mise en scène : Benoît Jacquot
décors : Sylvain Chauvelot
costumes : Christian Gasc
éclairages : André Diot
préparation des chœurs : Alessandro Di Stefano
Avec :
Marina Rebeka (Violetta), Virginie Verrez (Flora Bervoix), Isabelle Druet (Annina), Charles Castronovo (Alfredo Germont), Placido Domingo (Giorgio Germont), Julien Dran (Gastone), Philippe Rouillon (Barone Douphol), Tiago Matos (Marchese d’Obigny), Tomislav Lavoie (Dottor Granvil). | |
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