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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Nouvelle production du Domino Noir d’Auber dans une mise en scène de Valérie Lesort et Christian Hecq et sous la direction de Patrick Davin à l’Opéra Comique, Paris.
Scribe et Dubois
Fidèle à son répertoire, l’Opéra-Comique remonte l’un des ouvrages les plus joués d’Auber, Le Domino Noir, sur un livret de Scribe dont plus de la moitié du texte est parlée. Le chant bénéficie de l’Horace de Cyrille Dubois et de l’Angèle d’Anne-Catherine Gillet, la fosse de la qualité du Philharmonique de Radio France dirigé par l’énergique Patrick Davin.
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Créé il y a 181 ans par l’institution alors qu’elle avait presque abandonnée la première Salle Favart – qui brûlera quelques mois plus tard au début de l’année 1838 – au profit du Théâtre des Nouveautés, le Domino noir d’Auber permet une fois de plus au public parisien de redécouvrir le répertoire qui a fait l’histoire de la ville, comme de la musique française.
La mise en scène créée en février dernier à Liège trouve avec Valérie Lesort et Christian Hecq deux artistes à même de faire rire et d’utiliser le grotesque avec un décor d’une grande qualité (Richard Peduzzi) avec des idées toujours simples, efficacement agencées pour amuser une salle comble et comblée. Le premier acte d’un bal chez la Reine d’Espagne, invisible selon les conventions de l’époque, se passe devant une horloge reproduite sur le modèle de celle de la Gare d’Orsay.
On a osé ajouter à la partition de la musique moderne, puisqu’à chaque ouverture de la porte qui donne sur l’arrière scène, de la techno se laisse entendre, sans que personne ne s’offusque, ni lorsque qu’un court ballet est dansé derrière le cadre transparent de l’horloge sur la musique d’Aquarium de Saint-Saëns. Le second acte présente un salon bourgeois, et le troisième une belle cour d’intérieur de Monastère, avec deux statues sous colonnes qui s’animeront à l’occasion, tout comme les deux gros diablotins en hauteur, alors qu’à l’acte médian un cochon sur plat roulant avait surpris le public en tentant de mordre l’un des invités affamés.
Les costumes tendent surtout vers la faune et la flore, le Lord anglais épidermique devenant porc-épic ; le Domino d’Angèle, en réalité non pas les pièces noires et blanches du jeu présentées animées dès l’ouverture, mais plutôt le nom commun d’une longue cape de bal, est surmonté d’une tête de cygne noir, quand son amie Brigitte ressemble par sa robe à un pissenlit. On regrette seulement un jeu d’acteur souvent trop appuyé pour ne pas plonger régulièrement dans le caricatural.
Le chant trouve deux des plus belles voix françaises du moment, avec tout d’abord l’Horace de Cyrille Dubois. Son timbre légèrement nasalisé convient parfaitement au texte de Scribe encensé par Auber, et dès ses premières interventions pendant le duo des deux amies, on retrouve la grâce du plus grand Nadir actuel. Auber n’est certes pas Bizet et sa fausse aragonaise n’est pas aussi célèbre que l’habanera de Carmen, mais il a composé pour Laure Cinti-Damoreau un an après la mort de la Malibran de magnifiques airs et duos ; le superbe Je suis sauvé porté aujourd’hui par Anne Catherine Gillet devient l’un des plus beaux moments de la soirée.
Le reste de la distribution trouve des acteurs coquasses, chanteurs corrects (Antoinette Dennefeld en Brigitte, Laurent Kubla en Gil Perez), ou moyens (Marie Lenormand plus à l’aise dans son costume de grosse servante que dans la tessiture de Jacinthe), et surtout une Sylvia Bergé en Ursule plus actrice que cantatrice, même s’il ne faut oublier qu’il est complexe de rester longtemps en scène sans pouvoir chauffer en coulisse la voix avant de reprendre le chant.
La réussite de cette soirée provient également de la fosse, avec un Orchestre de Radio France plus que parfait, dynamisé par les grimaces et les gestes énergiques autant que doucereux du chef belge Patrick Davin. Sans chercher jamais à intellectualiser, il livre avec brillance et clarté une partition qui n’est pas la meilleur d’Auber et a été rapidement composée en moins d’une demi-année, mais démontre le talent, l’inventivité et l’importance de ce compositeur qui a marqué par la suite tant Berlioz que Meyerbeer ou Wagner.
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Opéra Comique - Salle Favart, Paris Le 26/03/2018 Vincent GUILLEMIN |
| Nouvelle production du Domino Noir d’Auber dans une mise en scène de Valérie Lesort et Christian Hecq et sous la direction de Patrick Davin à l’Opéra Comique, Paris. | Daniel-François-Esprit Auber (1782-1871)
Le Domino noir, opéra-comique en trois actes
Livret d’Eugène Scribe
accentus
Orchestre philharmonique de Radio France
direction : Patrick Davin
mise en scène : Valérie Lesort & Christian Hecq
décors : Laurent Peduzzi
costumes : Vanessa Sannino
Ă©clairages : Christian Pinaud
chorégraphie : Glyslein Lefever
préparation des chœurs : Christophe Grapperon
Avec :
Anne-Catherine Gillet (Angèle de Olivarès), Cyrille Dubois (Horace de Massarena), Antoinette Dennefeld (Brigitte de San Lucar), François Rougier (Comte Juliano), Marie Lenormand (Jacinthe), Laurent Kubla (Gil Perez), Laurent Montel (Lord Elfort), Sylvia Bergé (Ursule), Valérie Rio (La Tourière), Olivier Déjean (Melchior). | |
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