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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert du Rotterdams Philharmonisch Orkest sous la direction de Yannick Nézet-Séguin avec la participation de la pianiste Yuja Wang au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
Anxiétés diverses
Invité privilégié du Théâtre des Champs-Élysées, l’excellent Orchestre philharmonique de Rotterdam fête ses cent ans cette année. Sous la direction de Yannick Nézet-Séguin, son chef attitré depuis 2008, il y a retrouvé son public avec trois œuvres symphoniques dont la deuxième fut couronnée d’un pic absolu : les bis de Yuja Wang après le Quatrième Concerto de Rachmaninov.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris
Le 26/04/2018
Claude HELLEU
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Il déroute souvent quelque peu, ce Concerto n° 4 de Rachmaninov, son dernier. On y entre dans une tourmente orchestrale où le piano devient un instrument parmi les autres. Mais poussée à ses paroxysmes symphoniques par Yannick Nézet-Séguin, l’excellent Rotterdams Philharmonisch Orkest avale ce partenaire. Quand elle s’appelle Yuja Wang, on s’en étonne. Peu de temps. Elle réussit à émerger des pupitres mal différenciés, et le bonheur commence. La virtuosité éblouit, sa sonorité toujours aussi nuancée. Les phrasés chantent, des accords toujours aussi souples tissent leurs harmonies, les traits ravissent, le toucher s’enflamme. Le piano mène un dialogue auquel l’orchestre participe tout d’un bloc.
Un Largo délicieusement romantique naît sous les doigts de la jeune Chinoise, droite et impassible dans sa ravissante robe lamée bleue transparente, dos dénudé, aussi séduisante à regarder qu’elle est fascinante à écouter. Impossible de jouer plus Vivace l’Allegro final. Couleurs changeantes des rythmes jazzy, pénétration du clavier en des moments plus interrogatifs, dynamisme d’une intensité résolue vivent et révèlent le souffle d’une œuvre où Yuja Wang interpelle l’auditeur, cependant que derrière elle l’orchestre garde une importance massive.
Et puis, après un Andante spianato de Chopin enchanteur en bis, le Finale de la Septième Sonate de Prokofiev suffoque l’auditeur. L’élasticité, la clarté, la stupéfiante prouesse technique d’un mécanisme hallucinant sur le grave répétitif angoissant, immuable dans sa montée prépondérante, transcendent les sarcasmes et la violence d’une sonate unique en son genre protestataire.
C’est dans la Symphonie n° 4 de Tchaïkovski que l’Orchestre de Rotterdam témoigne de sa plénitude et de la qualité de ses pupitres. Sous la direction de Yannick Nézet-Séguin, dès l’Andante sostenuto saisit l’inéluctable destin. Le feu des cuivres domine, à leur brûlure répond la chaleur des bois, les cordes unies imposent leur élan vital, tout l’orchestre participe dans une magnifique densité expressive à cette lutte entre fatum et volonté de bonheur, drame et rêves plus sûrs que la vie, pénètrent Moderato con anima et exaltent l’inspiration du compositeur.
Pause de l’Andantino en modo di canzona. Sensibilité du hautbois, du violoncelle – remarquable à tout moment de la symphonie –, du basson qui l’introduisent. Moment savouré dans une douceur fragile avant l’ivresse contagieuse du Scherzo et son relief. Pizzicatos des cordes époustouflants, sifflements des bois saisissants, cuivres insolents, rythmes intrépides, l’orchestre est littéralement galvanisé par son chef. Qui pousse toujours plus loin ses défis dans un Finale à l’Allegro con fuoco exaltant d’audace et de précision. Un témoignage de ce que vivre et se dépasser permet…
La symphonie La Passione de Haydn avait ouvert le concert. Nézet-Séguin la dirige avec une amplitude du geste qui sentimentalise son Adagio initial plutôt qu’elle ne le passionne. L’extrême lenteur appuie ses nuances, alourdit l’expressivité des pupitres. Les mouvements rapides allègent le climat de plus en plus sombre, la netteté martèle certains phrasés. La symphonie n’en garde pas moins une tension quelque peu épaissie par l’insistance mise à la dramatiser.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 26/04/2018 Claude HELLEU |
| Concert du Rotterdams Philharmonisch Orkest sous la direction de Yannick Nézet-Séguin avec la participation de la pianiste Yuja Wang au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Joseph Haydn (1732-1809)
Symphonie n° 49 en fa mineur « La Passione » Hob. I-49
SergueĂŻ Rachmaninov (1873-1943)
Concerto pour piano et orchestre n° 4 en sol mineur op. 40
Yuja Wang, piano
Piotr Ilitch TchaĂŻkovski (1840-1893)
Symphonie n° 4 en fa mineur op. 36
Rotterdams Philharmonisch Orkest
direction : Yannick NĂ©zet-SĂ©guin | |
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