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CRITIQUES DE CONCERTS 31 octobre 2024

Première à l’Opéra de Gand de Satyagraha de Glass dans la mise en scène de Sidi Larbi Cherkaoui, sous la direction musicale de Koen Kessels.

Transcendantal
© Rahi Rezvani

Plus qu’un spectacle, cette production de Satyagraha constitue une œuvre d’art total, une véritable expérience où les solides forces musicales de l’Opéra de Gand fusionnent avec les danseurs époustouflants de Sidi Larbi Cherkaoui. Les mouvements et les images d’une beauté suffocante hantent longtemps l’esprit tout autant que la musique de Phil Glass.
 

Opéra des Flandres, Gand
Le 01/12/2018
Pierre-Emmanuel LEPHAY
 



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  • Après Bâle et Berlin, cette production de Satyagraha faisait Ă©tape Ă  Gand. Il est Ă  espĂ©rer qu’il ne s’agissait pas lĂ  des dernières occasions de voir cette production exceptionnelle quand bien mĂŞme ce qualificatif est encore bien rĂ©ducteur par rapport Ă  ce que l’on ressent durant cette reprĂ©sentation. Car davantage qu’un spectacle, c’est bien une expĂ©rience, tant esthĂ©tique que spirituelle, qu’offre cette production.

    La réussite revient en premier lieu à une des partitions majeures de Phil Glass où l’écriture répétitive réussit l’exploit de faire oublier le temps alors que la pulsation est marquée en continu. Le compositeur parvient ainsi à traduire musicalement la conception orientale du temps, un état dans lequel on entre comme en méditation sinon en hypnose.

    On mesure à cette évocation combien ce langage nécessite une perfection de l’exécution, condition sine qua non pour parvenir à la transcendance, et c’est bien le cas ici avec la direction de Koen Kessels, aussi attentive aux instruments qu’aux chanteurs, et réussissant à faire vivre la répétition, à la renouveler par la mise en relief de détails instrumentaux, notamment par une assise impressionnante des contrebasses à des moments-clé. L’Orchestre Symphonique de l’Opéra des Flandres est à louer pour son implication et son endurance, même si on note ici ou là quelques flottements entre pupitres, voire avec la scène, ce qui reste bien peu dans une partition si exigeante.

    On retrouve les mêmes qualités d’endurance sur le plateau avec des chœurs somptueux qui marquent par un son beau et homogène, y compris dans les fortissimos des scènes les plus puissantes, mais également par un engagement scénique tel qu’on les confond parfois avec les danseurs. Parmi les solistes, on distingue le percutant Justin Hopkins en Krishna, Robin Adams en Kallenbach, le soprano affûté et puissant de Mari Moriya et le beau mezzo de Reahann Bryce-Davis. Hélas, Gandhi est tenu par un Peter Tantsits visiblement en méforme et dont la voix, peu séduisante, est trop large et vibrée pour un rôle où on attend davantage d’évanescence. Scéniquement, le ténor réussit cependant à installer le personnage avec une certaine maestria et une grande aura.

    Mais que serait cette production sans la mise en scène et la chorégraphie de Sidi Larbi Cherkauoi, fusionnant tous les acteurs au service d’une véritable œuvre d’art total ? Les qualificatifs manquent pour décrire la splendeur et la fluidité des mouvements, l’imagination perpétuelle où rien ne semble se répéter : on est stupéfait, bouleversé, tétanisé par tant de beauté et d’intelligence, par tant de communion entre ce que l’on voit et ce que l’on entend. La compagnie Eastman de Cherkaoui rassemble des danseurs tous plus époustouflants les uns que les autres avec certaines personnalités au charisme saisissant, tels Josepha Madoki ou Kazutomi “Tsuki” Kozuki.

    La scénographie, aussi simple qu’efficace, offre un plateau mobile grâce à une multitude de câbles qui ne semblent étonnamment gêner personne et qui permettent des dispositions très variées, que ce soit sur le plateau ou en dessous, jusqu’à la magnifique scène finale où l’image d’un Gandhi assis en tailleur sur le plateau penché à l’extrême et semblant léviter dans une lumière irréelle, vous hante des heures durant après la fin de la soirée, tout comme la musique de Glass qu’on imagine mal, dorénavant, associée à une autre mise en scène. Un DVD s’il vous plaît !




    Opéra des Flandres, Gand
    Le 01/12/2018
    Pierre-Emmanuel LEPHAY

    Première à l’Opéra de Gand de Satyagraha de Glass dans la mise en scène de Sidi Larbi Cherkaoui, sous la direction musicale de Koen Kessels.
    Philip Glass (*1937)
    Satyagraha, opéra en trois actes (1979)
    Livret du compositeur et de Constance DeJong

    Chœur et orchestre de l’Opéra des Flandres
    direction : Koen Kessels
    mise en scène et chorégraphie : Sidi Larbi Cherkaoui
    décor : Henrik Ahr
    costumes : Jan-Jan Van Essche
    Ă©clairages : Roland Edrich
    préparation des chœurs : Jan Schweiger

    Avec :
    Peter Tantsits (M. K. Gandhi), Mari Moriya (Miss Schlesen), Rihab Chaieb (Kasturbai), Robin Adams (Mr. Allenbach), Justin Hopkins (Parsi Rustomji/Krishna), Tineke van Ingelgem (Mrs. Naidoo), Raehann Bryce-Davis (Mrs. Alexander), Denzil Delaere (Arjuna), et la troupe de danseurs Eastman.

     


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