|
|
CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
|
Nouvelle production de Guercœur de Magnard sous la direction d’Andreas Hotz et dans une mise en scène de Dirk Schmeding au Théâtre d’Osnabrück.
Guercœur enfin de retour
Première production scénique depuis 1931 du Guercœur d’Albéric Magnard, le petit théâtre d’Osnabrück réussit son pari sous la direction magistrale d’Andreas Hotz, avec une belle distribution dominée par Lina Liu et dans une mise en scène proposant quelques images superbes. Justice est rendue à cet ouvrage magistral pourtant bien trop rare.
|
|
Bons baisers d’Eltsine
RĂ©gal ramiste
L'Étrange Noël de Mrs Cendrillon
[ Tous les concerts ]
|
C’est en Basse-Saxe qu’il aura fallu se rendre pour assister enfin à une production scénique du chef-d’œuvre d’Albéric Magnard, Guercœur, jamais monté sur scène depuis sa création en 1931. L’œuvre nécessite des forces considérables, et c’est tout à l’honneur du théâtre d’Osnabrück d’avoir tenté un pari aussi fou pour une si petite structure. Commençons pourtant par une réserve de taille : un certain nombre de coupures aux I et III, dont un des plus beaux passages de la partition, la plainte du rôle-titre.
Mais la plus belle réussite de la production réside dans la magnifique direction d’Andreas Hotz qui a su mettre en valeur la splendeur de l’orchestration, le dramatisme et le lyrisme d’un opéra très symphonique. L’Osnabrücker Symphonieorchester surprend par la densité de sa sonorité malgré son faible effectif, mais également par sa rondeur et ses couleurs. On reste stupéfait de retrouver toute l’ampleur de la partition et d’être ainsi submergé par de si belles sonorités, très équilibrées, dans une salle aussi petite.
La distribution mélange membre de la troupe du théâtre et invités. On n’y entendra pas un français irréprochable, mais au moins y trouvera-t-on des formats adéquats pour les différents rôles, à commencer par une stupéfiante Lina Liu qui campe une Vérité parfaite. La beauté de la voix, son égalité sur tous les registres avec des aigus splendides rendent pleinement justice à ce rôle impossible. L’aspect marmoréen du personnage est compensé par une émotion sensible, notamment dans le monologue du III ou le sublime quatuor final.
Du côté des personnages humains, on distinguera particulièrement la Giselle de Susan Vent-Wunderlich, voix moirée et incarnation vibrante. Le Heurtal de Costa Latsos se tire avec les honneurs d’un rôle très difficile et affiche un héroïsme de bon aloi. Reste le Guercœur de Rhys Jenkins décevant non par la voix, solide et puissante, mais par l’aspect monolithique et monochrome qu’il donne au personnage. Bien peu de variété, d’émotion dans un rôle qui s’y prête pourtant beaucoup.
La mise en scène de Dirk Schemeding quant à elle alterne sublime et prosaïque. Le premier acte est absolument superbe, l’étrangeté du royaume céleste joliment évoqué avec trois ronds de lumière évoluant au-dessus de la scène tandis que des projections évoquent la résurrection de Guercœur. Le II est ancré dans le monde contemporain et se distingue par une belle direction d’acteurs entre Heurtal, Giselle et Guercœur. Le III, plutôt que de revenir clairement au royaume céleste, montre malheureusement la dépouille de Guercœur prise en charge par des infirmiers puis des employés des pompes funèbres qui finissent par incinérer le cercueil puis en ramasser les cendres pour les mettre dans une urne.
Pour autant, la soirée reste d’un excellent niveau et ravit un public visiblement captivé et reconnaissant. De quoi prouver que l’ouvrage est bien viable scéniquement. Mesdames et messieurs les directeurs d’opéra, à commencer par le futur patron de l’Opéra national de Paris, de grâce, programmez rapidement le chef-d’œuvre qu’est le Guercœur d’Albéric Magnard !
| | |
|
Theater, OsnabrĂĽck Le 26/06/2019 Pierre-Emmanuel LEPHAY |
| Nouvelle production de Guercœur de Magnard sous la direction d’Andreas Hotz et dans une mise en scène de Dirk Schmeding au Théâtre d’Osnabrück. | Albéric Magnard (1865-1914)
Guercœur, tragédie en musique en cinq actes
Livret du compositeur
Chor und Extrachor des Theaters OsnabrĂĽck
OsnabrĂĽcker Symphonieorchester
direction musicale : Andreas Hotz
mise en scène : Dirk Schmeding
décors : Martina Segna
costumes : Frank Lichtenberg
vidéo : Roman Kuskowski
préparation des chœurs : Sierd Quarré
Avec :
Rhys Jenkins (Guercœur), Lina Liu (Vérité), Susan Vent-Wunderlich (Giselle), Costa Latsos (Heurtal), Katerina Morfa (Bonté, L’ombre d’une femme), Erika Simons (Beauté, L’ombre d’une vierge), Nana Dzidziguri (Souffrance), Daniel Wagner (L’ombre d’un poète). | |
| |
| | |
|