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CRITIQUES DE CONCERTS 31 octobre 2024

Version de concert d’Hippolyte et Aricie de Rameau sous la direction de Sir Simon Rattle à la Philharmonie de Paris.

L’harmonie des Enfers
© Jim Rakete

Avec la version révisée d’Hippolyte et Aricie, Simon Rattle se montre à l’aise dans les pages tragiques et fantastiques de l’œuvre, moins dans les pages galantes ou pastorales. Les forces du Freiburger Barockorchester et du chœur du Staatsoper Berlin le suivent jusqu’aux Enfers, tandis que des solistes inégaux laissent globalement de belles incarnations.
 

Philharmonie, Paris
Le 09/11/2021
Thomas DESCHAMPS
 



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  • Entre deux reprĂ©sentations au Staatsoper de Berlin, Simon Rattle prĂ©sente Ă  Paris Hippolyte et Aricie en version de concert. Des considĂ©rations dramaturgiques et acoustiques ont sans doute pesĂ© dans le choix de donner la version rĂ©visĂ©e de 1757 plutĂ´t que l’originale de 1733. Le spectacle crĂ©Ă© en 2018 se trouve ainsi allĂ©gĂ© du prologue, solution de facilitĂ© pour la mise en scène, mais le dernier acte restructurĂ© gagne certainement en efficacitĂ©. L’orchestration renforcĂ©e devient un atout pour la salle de 1800 places Ă  Berlin, tout aussi pertinent pour le très vaste volume de la Philharmonie de Paris. Moins de musique pour les ramistes donc, mais un impact renforcĂ©.

    Cherchant continuellement des contrastes, Rattle traque le drame partout, avec des accents et des phrasés plus sombres que ceux de Marc Minkowski, William Christie ou Raphaël Pichon. L’acte II est un abîme de nuances dignes des Enfers qu’elles dépeignent. De même que les épisodes maritimes trouvent une puissance d’évocation jamais atteinte, au-delà du pittoresque de leurs effets musicaux superbement réalisés par un Freiburger Barockorchester au meilleur de sa forme. La partie de chasse a des saveurs de terroir avant que la mort d’Hippolyte n’apporte la plus grande des désolations. Le chef britannique semble moins à l’aise dans le premier acte d’exposition ou dans les longues réjouissances du V où l’accentuation devrait être plus fine.

    Si le chœur du Staatsoper est irréprochable et brille par la qualité de sa prononciation, la distribution souffre de quelques déséquilibres dont un seul atteint le concert. Face à l’inextinguible chant sublimement racé de l’Hippolyte de Reinoud van Mechelen, l’Aricie d’Anna Prohaska, non seulement d’un format plus modeste, sombre dans de sérieux problèmes d’intonation. Cela grève leurs duos et rend l’épisode du rossignol interminable.

    Magdalena Kožená étreint les cœurs dans sa contrition après la disparition de l’être adoré mais auparavant la jalousie la fait poissarde – on pense même à la parodie de Phèdre par Pierre Dac ! Le roi Thésée de Gyula Orendt sert toute l’ambivalence du personnage, pivot du II et témoin horrifié du III. La force de son incarnation déborde parfois du cadre du concert. En 2018, en scène, l’acteur brûlait les planches comme en témoigne une vidéo publiée depuis.

    Mention spéciale à Jérôme Varnier qui campe le plus beau des Pluton. Son air Vous, qui de l’avenir percez la nuit profonde évoque un instant l’âge d’or des nobles basses françaises, avant que le style ogre slave prenne le dessus. La Diane d’Ema Nikolovska, aux interventions amputées, brille quand même par sa rondeur et son éclat. Les autres rôles sont satisfaisants à quelques fautes de prononciation près. Quant aux trois parques, parfaitement assemblées, elles donneraient presque l’envie de ne pas remonter des Enfers, d’y rester pour jouir éternellement des harmonies étranges de Rameau.




    Philharmonie, Paris
    Le 09/11/2021
    Thomas DESCHAMPS

    Version de concert d’Hippolyte et Aricie de Rameau sous la direction de Sir Simon Rattle à la Philharmonie de Paris.
    Jean-Philippe Rameau (1683-1764)
    Hippolyte et Aricie (1733, troisième version de 1757)
    Reinoud van Mechelen (Hippolyte)
    Anna Prohaska (Aricie)
    Magdalena Kožená (Phèdre)
    Adriane Queiroz (Oenone)
    Ema Nikolovska (Diane)
    Evelin Novak (la grande prĂŞtresse de Diane, une matelote)
    Slávka Zámečníková, Liubov Medvedeva (une bergère)
    Gyula Orendt (Thésée)
    Benjamin Chamandy (Tisiphone)
    JĂ©rĂ´me Varnier (Pluton)
    Michael Smallwood (Mercure)
    Magnus Dietrich (première parque)
    Arttu Kataja (deuxième parque)
    Frederic Jost (troisième parque)
    Staatsopernchor Berlin
    Freiburger Barockorchester
    direction : Sir Simon Rattle

     


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