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CRITIQUES DE CONCERTS 21 novembre 2024

Nouvelle production de Roméo et Juliette de Gounod dans une mise en scène d’Éric Ruf et sous la direction de Laurent Campellone à l’Opéra Comique, Paris.

Ah, lève-toi Pati !
© Thomas Deschamps

Miraculée de la pandémie, la nouvelle production de Roméo et Juliette de Charles Gounod à la salle Favart, dans une mise en scène d’Éric Ruf située dans l’Italie du sud plutôt qu’à Vérone constitue au-delà de sa réussite un triomphe pour le jeune ténor samoan Pene Pati qui brille par son engagement et l’art de son chant.
 

Opéra Comique - Salle Favart, Paris
Le 16/12/2021
Thomas DESCHAMPS
 



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    Ruf sait aussi donner à chaque protagoniste une épaisseur scénique qui n’est pas si commune au monde lyrique. L’équipe de chanteurs joue avec un engagement qui fait mouche même pour les plus petits rôles. Dans la fosse, Laurent Campellone insuffle lui aussi beaucoup d’énergie. D’une partition sans secret pour lui, il parvient à faire oublier la composition sous forme de numéros. Le continuum dramatique qui s’en dégage a aussi l’avantage d’emporter avec lui un orchestre de Rouen Normandie enthousiaste mais fragile dans ses détails. Il laisse en revanche peu de place aux rêves des deux amants et certains climax sont amoindris par l’agitation permanente qui les précède.

    Sur le plateau, les chœurs font montre d’une belle diction en dépit des masques – adéquats du moins pour le bal chez les Capulet ! Des petits rôles bien tenus, on distingue particulièrement les ténors : le Benvolio de Thomas Ricart et le Tybalt de Yu Shao brillent par des voix bien menées et homogènes. Adèle Charvet est un impeccable Stéphano, Philippe-Nicolas Martin un virevoltant Mercutio. Le frère Laurent de Patrick Bolleire est classiquement bonhomme tandis que le très bon Jérôme Boutillier souffre un peu avec la tessiture du comte Capulet.

    Mais comme on le sait, le succès de l’opéra de Gounod repose entièrement sur le couple des amants. Perrine Madoeuf assume crânement Juliette par un engament scénique formidable. Ses aigus très sûrs imposent un personnage très fort dramatiquement. Son médium de qualité discutable, qu’elle ne ménage pas pour autant, donne une image trop mûre pour une adolescente. Par bonheur, sa voix se marie fort bien dans les quatre duos avec celle du Roméo incarné par Pene Pati, sensation de la soirée.

    Comme à Bastille dans L’Élixir d’amour, le ténor est un acteur généreux. Le chanteur trouve ici un espace musical d’une autre dimension, au français châtié dans le madrigal, immense de souffle dans l’air du balcon, capable partout de piani du plus beau style. Mais à la fin du III, lorsque Roméo crie sa crainte de ne pas revoir Juliette, Pati ose prolonger son éblouissant contre-ut au-dessus des chœurs et de l’orchestre jusqu’à la dernière mesure de l’acte. Ce tour de force évoque irrésistiblement celui de Montserrat Caballé face au tombeau de Charles Quint à la fin d’une représentation de Don Carlo de Verdi en 1969… à Vérone !




    Opéra Comique - Salle Favart, Paris
    Le 16/12/2021
    Thomas DESCHAMPS

    Nouvelle production de Roméo et Juliette de Gounod dans une mise en scène d’Éric Ruf et sous la direction de Laurent Campellone à l’Opéra Comique, Paris.
    Charles Gounod (1818-1893)
    Roméo et Juliette, opéra en cinq actes (1867)
    Livret de Jules Barbier et Michel carré d’après la tragédie de Shakespeare

    Orchestre de l’Opéra de Rouen Normandie
    Chœur de l’Opéra de Rouen Normandie & Accentus
    direction : Laurent Campellone
    mise en scène et décors : Éric Ruf
    costumes : Christian Lacroix
    Ă©claairages : Bertrand Couderc

    Avec :
    Pene Pati (Roméo), Perrine Madoeuf (Juliette), Patrick Bolleire (Frère Laurent), Adèle Charvet (Stéphano), Philippe-Nicolas Martin (Mercutio), Jérôme Boutillier (Comte Capulet), Marie Lenormand (Gertrude), Yu Shao (Tybalt), Thomas Ricart (Benvolio), Arnaud Richard (Pâris), Yoann Dubruque (Grégorio), Geoffroy Buffière (Duc de Vérone), Julien Clément (Frère Jean).

     


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