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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert de l’Orchestre de Paris sous la direction d’Esa-Pekka Salonen à la Philharmonie de Paris.
La Grèce rêvée
Éblouissante soirée symphonique à la Philharmonie, où l’Orchestre de Paris, transcendé par la baguette de Salonen, opère des merveilles dans l’orchestration luxuriante du Daphnis et Chloé intégral de Ravel, après la création française de Karawane, pièce roborative et plutôt bruyante du compositeur-chef-d’orchestre finlandais.
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Après une Sixième de Bruckner puis un Château de Barbe-bleue de Bartók acclamés en décembre, le Daphnis d’Esa-Pekka Salonen promettait d’être l’un des temps forts de la saison de l’Orchestre de Paris. En ouverture de programme, la création française de Karawane du Finlandais, une demi-heure de profusion sonore inspirée par le mouvement Dada, créée à Zurich en 2014.
La partition fait intervenir un chœur rivalisant d’onomatopées, d’unissons rythmiques et de scansions accelerando qui montrent la belle palette du Chœur de l’Orchestre de Paris. La musique, grouillante de mille intentions et d’une suractivité rythmique un peu fatigante, tire à hue et à dia, entre nappes de cordes post-sibéliennes et martèlements tribaux façon Carmina Burana, sans oublier la présence surexcitée d’une batterie, dans un grand melting pot bien hétérogène.
On gardera davantage en mémoire l’exécution intégrale du Daphnis et Chloé de Ravel, dont Salonen traverse l’heure de musique ininterrompue avec une facilité désarmante, en triomphant de tous les problèmes techniques (changements de tempo, de couleur), de toutes les ruptures piégeuses des deux premiers tableaux, comme certains traversent une symphonie de Mozart.
Pas une transition périlleuse ne résiste à cette battue à toute épreuve, qui met le feu à un Orchestre de Paris absolument transcendant – les envolées de cor suraiguës pianissimo de Benoît de Barsony, la flûte généreuse de Vincent Lucas, une référence aux côtés de celle, plus opalescente, de Vicens Prats avec le même orchestre et Boulez au Châtelet en 2004, le hautbois de Miriam Pastor Burgos et un piccolo d’un raffinement inouï.
La partition brille d’un bout à l’autre des mille feux des Ballets russes, après un réveil hypnotique où la harpe étonne par sa présence sonore, où le chœur moire des couleurs du plus beau scintillement. La Danse grotesque de Dorcon, le Nocturne, une Danse guerrière fascinante de lignes de fuite, l’Interlude, la Danse générale où Salonen ne fait qu’une bouchée de la mesure à 5/4 qui a empoissonné la vie de tant de ses confrères : tout concourt à une exécution à marquer d’une pierre blanche.
On peut certes préférer une approche plus chorégraphique et caractérisée, aux motifs plus incarnés, traités comme de vrais personnages, et regretter un certain manque de tendresse sur les épisodes les plus délicats de cette partition de théâtre rendue ici à une pure abstraction, mais on reste soufflé par l’évocation puissante d’une Grèce rêvée, dans ce véritable traité d’orchestration du XXe siècle.
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Philharmonie, Paris Le 13/04/2022 Yannick MILLON |
| Concert de l’Orchestre de Paris sous la direction d’Esa-Pekka Salonen à la Philharmonie de Paris. | Esa-Pekka Salonen (*1958)
Karawane (2014)
Création française
Maurice Ravel (1875-1937)
Daphnis et Chloé, ballet en trois parties (1912)
Chœur de l’Orchestre de Paris
préparation : Ingrid Roose
Orchestre de Paris
direction : Esa-Pekka Salonen | |
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