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CRITIQUES DE CONCERTS |
10 janvier 2025 |
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Reprise de Parsifal de Wagner dans la mise en scène de Richard Jones, sous la direction de Simone Young à l’Opéra de Paris.
Wagner dans les maïs
Étrenné il y a quatre ans avec un tout petit nombre de représentations, Parsifal selon Richard Jones fait son retour à la Bastille, avec un mélange d’idées valables sur le papier mais plutôt mal réalisées en raison d’une direction d’acteurs en roue libre. Dans la fosse, Simone Young dirige un ouvrage impressionniste qu’une belle distribution vient fleurir.
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En mars 2018, ce nouveau Parsifal était donné pour quatre soirées seulement dans le grand vaisseau de Bastille. Le revoilà ce printemps pour sept représentations, avec une équipe musicale entièrement renouvelée. À Philippe Jordan succède la cheffe australienne Simone Young, qui balise le terrain d’une gestique de sémaphore recadrant chaque imprécision du plateau (et de chœurs puissants mais un peu trop vibrés chez les dames) avec un vrai métier.
L’Orchestre de l’Opéra a sorti pour l’occasion ses plus belles sonorités, cordes éthérées et bois transparents (les mixtures flûte-clarinette-hautbois, de toute beauté) mais aussi des cuivres un peu fragiles sur leurs attaques. C’est que la direction fait le choix de lisser de bout en bout le festival scénique sacré wagnérien, dilué dans une pâte vaporeuse voisine du Requiem de Fauré. Certaines pages y gagnent (la Cène), mais l’ensemble nivelle nuances et contrastes au profit d’une continuité un peu morne sinon statique.
Kwangchul Youn, qui chante Gurnemanz partout depuis vingt ans, a l’exacte couleur du doyen des Chevaliers, une autorité naturelle sans vraie bonté sous-jacente, et affiche une fatigue audible au Baptême, où l’émission commence à bouger. Après un trajet de Kurwenal à Wotan, Falk Struckmann incarne aujourd’hui les rôles noirs, dont ce Klingsor au bel impact, toujours un peu surarticulé, dont la ligne large connaît parfois quelques trous.
En Kundry, Marina Prudenskaya offre une matière lumineuse, jamais artificiellement gonflée, et attaque les aigus avec prudence, privilégiant souplesse et homogénéité sur les effets expressionnistes. La soirée est pourtant dominée par l’Amfortas mordant de Brian Mulligan, timbré clair, et par le Parsifal jeune et franc de Simon O’Neill, graine de Heldentenor un peu nasal (c’est toujours mieux qu’engorgé) aux excellentes réserves de puissance.
La mise en scène reste le point faible du spectacle, transposition sans en être, qui démissionne purement et simplement sur le grand duo du II et l’Enchantement du Vendredi saint, et se perd dans une direction d’acteurs outrée, les personnages roulant par terre, se poussant et jouant les grands sentiments avec maladresse et moult clichés – les jeunes recrues de la confrérie en jogging, chaussettes de tennis dans les Birkenstock.
Le décor, vue en coupe des pièces de cette école du Graal, tourne vite court, Titurel en minuscule vieillard racorni et alité, à qui un chevalier-kiné dérouille les hanches avant de le lever, Parsifal en boy scout bouboule. Quant aux Filles-fleurs en épis de maïs OGM, frétillant de la croupe et des grandes lèvres pour aguicher le chaste fol, elles finiront calcinées à la défaite de Klingsor. On ne sait que trop gré au metteur en scène britannique de nous avoir épargné l’explosion de pop corn transitoire.
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Opéra Bastille, Paris Le 24/05/2022 Yannick MILLON |
| Reprise de Parsifal de Wagner dans la mise en scène de Richard Jones, sous la direction de Simone Young à l’Opéra de Paris. | Richard Wagner (1813-1883)
Parsifal, festival scénique sacré en trois actes (1882)
Livret du compositeur
Chœurs et Orchestre de l’Opéra national de Paris
direction : Simone Young
mise en scène : Richard Jones
décors & costumes : ULTZ
éclairages : Mimi Jordan Sherin
préparation des chœurs : Ching-Lien Wu
Avec :
Brian Mulligan (Amfortas), Reinhard Hagen (Titurel), Kwangchul Youn (Gurnemanz), Falk Struckmann (Klingsor), Marina Prudenskaya (Kundry), Simon O’Neill (Parsifal), Neal Cooper (Erster Gralsritter), William Thomas (Zweiter Gralsritter), Tamara Banješević, Marie-Andrée Bouchard-Lesieur, Tobias Westman, Macieij Kwaśnikowski (Vier Knappen), Tamara Banješević, Marie-Andrée Bouchard-Lesieur, Ramya Roy, Ksenila Proshina, Andrea Cueva Molnar, Claudia Huckle (Blumenmädchen), Claudia Huckle (Eine Stimme aus der Höhe). | |
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