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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Reprise de Les Capulet et les Montaigu de Bellini dans la mise en scène de Robert Carsen, sous la direction de Speranza Scappucci à l’Opéra national de Paris.
La belle espérance
Le retour de la production Carsen est servi par une distribution équilibrée avec un couple Roméo-Juliette bien assorti. À la prise de rôle réussie de Julie Fuchs s’ajoutent les débuts convaincants à l’Opéra de la cheffe italienne Speranza Scappucci. Tant dans la fosse qu’en liaison avec le plateau, sa musicalité épouse l’écriture du maître de la mélancolie.
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L’élégance préside toujours à la scénographie de Robert Carsen pour Les Capulet et les Montaigu. Importée par Hugues Gall à son arrivée à Bastille, elle fut créée à Genève en 1994 ! C’est dire si elle témoigne d’une époque où l’esthétisme l’emportait encore sur le théâtre. Ce spectacle aux qualités picturales et à l’absence de direction d’acteur évoque du reste l’influence de Pier Luigi Pizzi.
Dans ce cadre inaltéré, la prise de rôle de Juliette de Julie Fuchs conduit la chanteuse à un nouveau répertoire. Habituée à un bel canto plus brillant (Rossini, Donizetti), la soprano doit se soumettre à une vocalité aux phrases beaucoup plus longues. De ce fait, le médium se trouve davantage sollicité. Il est ici chaleureux, et si le vibrato est perceptible, il est complètement maîtrisé. Quelques aigus criés ne nuisent pas à une belle incarnation, particulièrement bien préparée, jusqu’aux récitatifs très habités.
Face à elle, une complice des années zurichoises, Anna Goryachova. Les deux chanteuses ont en effet souvent chanté ensemble dans la troupe de la maison suisse. De petite taille, la mezzo russe donne vraiment l’image d’un adolescent téméraire face à tous ces hommes en armes. Au premier acte, la pugnacité de son engagement vocal concentre tout sur la projection au détriment peut-être de la prononciation et de nuances musicales. Mais dans le cadre plus intime du II, la chanteuse trouve un terrain davantage propice à son art et sa voix trouve aussitôt des couleurs étreignantes.
Autour de ce duo à l’alchimie indéniable, le reste de la distribution satisfait pleinement. Francesco Demuro orne son chant comme l’exige l’écriture et son timbre nasal correspond bien à l’agressivité de Tebaldo. Capellio rocailleux, Jean Teitgen impose son personnage en quelques mesures. À l’opposé, la basse aux sons largement ouverts de Krzysztof Bączyk fait le plus sympathique des Laurent.
Enfin, un début à l’Opéra, celui de la cheffe Speranza Scappucci, concourt au succès de la soirée. Sa direction déploie des trésors de délicatesse, tisse de riches brocards et ondoie comme de la soie. En phase complète avec la longue métrique bellinienne, elle nous guérit des horlogers étrangers à cette musique. Toujours attentive aux chanteurs et à l’action du plateau, elle sait aussi moduler le tissu orchestral et offrir un écrin à ses solistes, à l’instar du superbe clarinettiste qui ferait pleurer les pierres du plus triste des tombeaux.
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