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CRITIQUES DE CONCERTS 31 octobre 2024

Reprise de Carmen de Bizet dans la mise en scène de Calixto Bieito, sous la direction de Fabien Gabel à l’Opéra national de Paris.

Reflets dans un Ĺ“il noir
© Guergana Damianova

L’efficacité dramatique de cette reprise de la Carmen de Bieito est particulièrement bien servie par un duo de protagonistes au français d’exception. Au Don José ultrasensible de Michael Spyres répond la résolution profonde de Gaëlle Arquez. Les chœurs et le reste de la distribution font une galerie de personnages hauts en couleurs emmenés au pas de charge par le chef Fabien Gabel.
 

Opéra Bastille, Paris
Le 15/11/2022
Thomas DESCHAMPS
 



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  • La Carmen mise en scène par Calixto Bieito est peut-ĂŞtre la production d’opĂ©ra la plus donnĂ©e au monde. Depuis sa crĂ©ation au festival de Peralada Ă  la fin du siècle dernier, on ne compte plus ses apparitions europĂ©ennes et amĂ©ricaines. En tout Ă©tat de cause, c’est un excellent achat de l’OpĂ©ra de Paris. DonnĂ©e pour la première fois en mars 2017, elle a rompu le mauvais sort de Bastille avec les prĂ©cĂ©dentes rĂ©alisations peu rĂ©ussies de Beaunesne, Arias ou Gomez.

    D’une économie sobre et d’une concentration dramatique intense, le spectacle fait toujours mouche, jusqu’à la feria figurée par le seul cordon des chœurs face au public. Si toute mise en scène est périssable, il n’y a pour le moment que les clins d’œil sexuels très appuyés, moins gaillards que vulgaires, qui trahissent leur âge. Pour le reste, on admire encore comment ce travail est un cadre idéal pour les chanteurs, en leur offrant des personnages bien campés.

    Cette année, le résultat est d’autant réussi qu’une distribution bien composée s’y épanouit. Et lorsque les chanteurs y mettent un surcroît d’engagement, cela donne un portrait plein de vie. Parmi les petits rôles, on distingue le Remendado incisif de Loïc Félix et la Frasquita délurée d’Andrea Cueva Molnar. Alejandro Baliñas Vieites peut donner tout son superbe timbre à un Zuniga à l’accent prononcé mais à la présence intense.

    Plus hâbleur que jamais, Escamillo est tenu avec vaillance par Lucas Meachem, nonobstant une tendance Ă  Ă©courter certaines fins de phrases. Du rĂ´le en or qu’est MicaĂ«la, Golda Schultz fait son miel : une interprĂ©tation sans chichi de « Je dis que rien ne m’épouvante Â» et une très belle interaction avec le Don JosĂ© de Michael Spyres.

    Ce dernier montre une compréhension et une prononciation confondantes de vérité. Son personnage est le seul dont la psychologie ne cesse d’évoluer. Le ténor traduit chacune des affres amoureuses avec une palette de couleurs nuancées. Son chant manque peut-être parfois de ligne mais n’est jamais trivial et gagne une émotion déchirante dans les imprécations finales.

    Face à lui, la Carmen de Gaëlle Arquez paraît d’une détermination inébranlable avec une voix d’une égalité presque monolithique. Cette pierre au brun presque noir a les reflets profonds d’un œil de taureau. Aucune outrance dans le chant ou le jeu ne vient en ternir l’eau. On ne peut que regretter une projection trop modeste au IV qui minore l’efficacité de la scène finale.

    La direction de Fabien Gabel laisse circonspect. Sans doute la pression liée au fait qu’il débute dans la fosse où travaillèrent son père et son grand-père peut expliquer une précipitation regrettable. Dès l’ouverture où il mouline à très vive allure, il ne peut dresser de paysage ou s’abandonner à la sensualité. Si l’on admire l’articulation des interventions chorales avec notamment des chœurs d’enfants au sommet, l’absence totale de langueur, de désir et de poésie sonne comme une occasion manquée.




    Opéra Bastille, Paris
    Le 15/11/2022
    Thomas DESCHAMPS

    Reprise de Carmen de Bizet dans la mise en scène de Calixto Bieito, sous la direction de Fabien Gabel à l’Opéra national de Paris.
    Georges Bizet (1838-1875)
    Carmen, opéra en quatre actes (1875)
    Livret de Henri Meilhac et Ludovic Halévy d’après Mérimée

    Maîtrise des Hauts de Seine
    Chœurs et Orchestre de l’Opéra national de Paris
    direction : Fabien Gabel
    mise en scène : Calixto Bieito
    décors : Alfons Flores
    costumes : Mercè Paloma
    Ă©clairages : Alberto RodrĂ­guez Vega
    préparation des chœurs : Ching-Lien Wu

    Avec :
    Gaëlle Arquez (Carmen), Michael Spyres (Don José), Lucas Meachem (Escamillo), Golda Schutlz (Micaëla), Andrea Cueva Molnar (Frasquita), Adèle Charvet (Mercédès), Marc Labonette (Le Dancaïre), Loïc Félix (Le Remendado), Alejandro Baliñas Vieites (Zuniga), Tomasz Kumięga (Moralès), Karim Belkhadra (Lillas Pastia).

     


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