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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Version de concert d’Alcina de Haendel sous la direction de Marc Minkowski à la Philharmonie de Paris.
Ma sorcière bien-aimée
D’une équipe de chanteurs un peu inégale, Marc Minkowski tire le meilleur pour une soirée haendélienne d’une grande musicalité et d’une force dramatique peu commune à la Philharmonie de Paris. Si Anna Bonitatibus triomphe en Ruggiero par une douceur désarmante, Magdalena Kožená fait du rôle de la sorcière Alcina un portrait déchirant.
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Loin des versions de poche habituellement proposées, cette Alcina en version de concert offre un orchestre et, globalement, des voix à la mesure des dimensions bien trop vastes de la salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris. Les Musiciens du Louvre déploient force cordes et surtout des vents plus nombreux et plus audibles qu’à l’accoutumée. Marc Minkowski peut donner libre cours à ce Haendel charnu, truculent et polymorphe qui est sa marque depuis des décennies.
La ligne brille d’un lustre chaleureux tandis que les contrastes rythmiques s’offrent comme des gourmandises. Si les ballets sont un régal, il faut aussi saluer la magnificence du violon solo d’Alice Piérot qui illumine Alma sospira, et la musicalité du violoncelle de Gauthier Broutin qui transforme Credete al mio dolore en une méditation douloureuse. Dans les deux cas, on se prend à regretter que le compositeur n’ait pas rajouté plus de couplets !
Toute cette expressivité n’empêche en rien une attention permanente apportée par le chef aux chanteurs, notamment en fonction du format et des qualités variables de leur voix. On entend avec plaisir le rôle d’Oberto souvent supprimé à la scène. Alois Mühlbacher s’y montre plus agile que séduisant. L’Oronte de Valerio Contaldo force le ton au détriment de la ligne vocale. Alex Rosen apporte le velours de son timbre et sa prononciation exemplaire au rôle trop court de Melisso. Elizabeth DeShong fait une impression mitigée en Bradamante, son contralto impressionne surtout dans le bas du registre aux notes saisissantes. La voix d’Erin Morley est bien plus égale, mais son exquise rondeur est-elle vraiment appropriée au rôle de la magicienne Morgana ? Ce sont les rôles de Ruggiero et d’Alcina qui marquent cette soirée du sceau de l’exceptionnel.
La voix d’Anna Bonitatibus nécessite souvent que le chef veille sur l’orchestre comme sur du lait frémissant mais la variété des couleurs déployées et la finesse des inflexions effectuées par la chanteuse constituent le plus beau, le plus émouvant des Ruggiero. Face à elle, d’une projection crâne, Magdalena Kožená s’abandonne en Alcina. En tragédienne consommée, en trouvant l’équilibre entre bel canto et expression, elle fait de chacun de ses airs des moments où le temps se fige comme autant d’étapes émotionnelles jusqu’au trio final résumant cette extraordinaire carte de Tendre.
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Philharmonie, Paris Le 07/02/2023 Thomas DESCHAMPS |
| Version de concert d’Alcina de Haendel sous la direction de Marc Minkowski à la Philharmonie de Paris. | Georg Friedrich Haendel (1685-1759)
Alcina, opera-seria en trois actes (1735)
Livret anonyme, adapté de L’isola di Alcina de Riccardo Broschi
Magdalena Kožená (Alcina)
Alois MĂĽhlbacher (Oberto)
Erin Morley (Morgana)
Elizabeth DeShong (Bradamante)
Anna Bonitatibus (Ruggiero)
Valerio Contaldo (Oronte)
Alex Rosen (Melisso)
Les Musiciens du Louvre
direction : Marc Minkowski | |
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