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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Troisième concert de l’Orchestre symphonique de San Francisco, sous la direction d’Esa-Pekka Salonen et avec le concours de la pianiste Yuja Wang à la Philharmonie de Paris.
Le temps de la fulgurance
Mise à part la pièce introductive gentiment prosaïque de Gabriella Smith, ce troisième concert de l’Orchestre symphonique de San Francisco appelle nombre de superlatifs. La pianiste Yuja Wang a sa part pour un Troisième Concerto de Rachmaninov brillant et deux bis mémorables, mais c’est bien l’orchestre et son chef qui se couvrent ensuite de gloire pour Bartók et Wagner.
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Écouter les bruits de la nature, en particulier les chants d’oiseaux et même les sons de la mer avec un hydrophone, sont parmi les passe-temps préférés de la compositrice Gabriella Smith. Le début de sa pièce Tumblebird Contrails illustre parfaitement la situation qu’elle décrit dans le programme de salle : le ressac au bord d’une plage, les mouettes etc.
Écouter ces percussions à peine stylisées qui figurent le martèlement des vagues, ces souffles des instruments à vent et autres éléments est amusant mais la composition développée sur une douzaine de minutes ne dépasse pas une certaine description littérale sans atteindre une dimension poétique très sophistiquée. Il n’est pas certain non plus que Smith parvienne ainsi à nous convaincre de l’urgence climatique comme elle dit le souhaiter.
Les premières mesures du Concerto pour piano n° 3 de Rachmaninov distillées avec une douceur prégnante transportent l’auditeur dans une tout autre dimension. Yuja Wang projette le son avec brillance sans devenir percussive. La vaste cadence de l’Allegro ma non tanto devient un tableau où les arpèges atteignent une perfection sidérante. À ses côtés, Salonen détaille l’orchestre avec élégance. Bien que le chef pratique cette musique depuis toujours, le détachement qu’il y met enlève une part de romantisme à ces pages.
Dans l’Intermezzo, Wang monopolise l’attention par l’égalité de ses traits ainsi que par des nuances dynamiques d’une rare subtilité. Le Finale installe définitivement l’œuvre dans une lumière radieuse, diffractée par un traitement rythmique virtuose. En contraste total, Wang revient pour deux bis où son piano chante un peu à la manière des grands anciens. Le Lied Marguerite au rouet transcrit par Liszt renouvelle la magie des notes égales de la Chinoise, tout en montrant un lyrisme étreignant. Son jeu dans la Danse des esprits bienheureux de Gluck arrangée par Sgambati bouleverse par une sensibilité hors du commun jusque dans le trille d’une beauté irréelle.
En seconde partie, Salonen présente l’un de ses chevaux de bataille, le Concerto pour orchestre de Bartók. Sombre, parfois jusqu’au désespoir, grinçante mais aussi jubilatoire, sa lecture fait feu de tout bois. L’Orchestre de San Francisco est d’une souplesse confondante et d’une richesse de couleurs sans limite, sachant varier les textures comme peu de formations. Le chef sollicite aussi beaucoup la personnalité individuelle des chefs de pupitre qui trouvent l’espace nécessaire à l’épanouissement de leur solo dans un cadre rythmique toujours évolutif.
Comme souvent avec Salonen, les harpes atteignent un summum d’expressivité, produisant des sonorités inouïes. Sans verser dans le pittoresque, gardant toute son ironie pour les fameuses citations de Chostakovitch ou Lehár, l’ensemble sonne comme le résumé poignant d’une vie. En bis, Salonen et son orchestre éblouissant entonnent le plus fulgurant prélude de l’acte III de Lohengrin de Wagner qu’on ait entendu. Les cuivres de San Francisco jamais écrasants parachèvent un triomphe sans égal.
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Philharmonie, Paris Le 11/03/2023 Thomas DESCHAMPS |
| Troisième concert de l’Orchestre symphonique de San Francisco, sous la direction d’Esa-Pekka Salonen et avec le concours de la pianiste Yuja Wang à la Philharmonie de Paris. | Gabriella Smith (*1991)
Tumblebird Contrails (2014)
Serge Rachmaninov (1873-1943)
Concerto pour piano n° 3 en ré mineur op. 30 (1909)
Yuja Wang, piano
BĂ©la BartĂłk (1881-1945)
Concerto pour orchestre (1943)
San Francisco Symphony
direction : Esa-Pekka Salonen | |
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