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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert de l’Ensemble Intercontemporain avec le concours des danseurs Saburo Teshigawara et Rihoko Sato à la Cité de la Musique, Paris.
Dans la lune
Scindé en deux, le plateau de la Salle des concerts de la Cité de la Musique place à jardin les musiciens de l’Ensemble Intercontemporain et à cour les deux danseurs, Saburo Teshigawara et Rihoko Sato, pour un programme danse et musique autour du Pierrot lunaire d’Arnold Schoenberg et de la Suite lyrique d’Alban Berg. Ou comment décrocher la lune.
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La scénographie de Pierrot lunaire comprend des miroirs au sol, un miroir suspendu et un autre droit posé sur scène. Ce dispositif permet de transporter les danseurs sur la lune ou d’en évoquer les rayons. Un habile jeu de lumière projette l’ombre des personnages se promenant sur l’astre mystérieux. Il symbolise le cimetière par une croix au sol puis les vautours tournoyants par des projections abstraites de lumière. Noir et blanc dominent l’éclairage et la tenue des danseurs jusqu’à ce que le texte évoque le sang, les rubis ou la Messe rouge.
À l’écoute de la partition de Schoenberg, les deux danseurs interagissent, figurent et soulignent la musique des mélodrames tantôt fugue, canon ou passacaille. Leur chorégraphie est fluide et semble inventée dans l’instant tant elle est naturelle. Les corps ne se touchent jamais mais s’étirent, s’élancent et s’écartent pour figurer les aventures de Pierrot et Cassandre, comme une pantomime infinie. L’EIC cisèle la partition en en déployant tout le lyrisme attendu dans un équilibre digne de funambules.
La chanteuse Salomé Haller opte pour un Sprechgesang plus chanté que parlé et met parfaitement en avant, par l’intonation et l’implication, toute la théâtralité des poèmes d’Albert Giraud traduits en allemand. Ainsi, le chant donne à entendre la poésie tandis que la danse donne à voir la musique. Il résulte de cette mise en scène transdisciplinaire une fascinante atmosphère rêveuse et délicate plongeant le spectateur dans un songe.
Le dispositif pour la Suite lyrique d’Alban Berg se fait plus sobre puisqu’il ne nécessite que l’éclairage. Cette fois, Rihoko Sato passe plus de temps sur scène et apparaît parfois seule dans certaines parties. Saburo Teshigawara, lui, devient une ombre. Toute la symbolique se focalise sur un manteau long porté et échangé tour à tour par les deux danseurs. Quand le manteau est revêtu, la personne ne danse plus et sort de la lumière tandis que l’autre redevient libre de tout mouvement. Alors, pourquoi briser cette règle tacite dans le Largo desolato final ?
Dans cette Suite, le lien avec la musique est moins clair. La danse semble simplement obéir à la vélocité de la partition plutôt qu’à son contenu. Seule la troisième partie, Andante amoroso, remplie de pizzicati, donne lieu à une désarticulation progressive des mouvements de la danseuse, très connectée à la texture sonore. La pièce se conclut sur l’étreinte ratée des deux personnages, l’un d’eux étant véritablement une ombre.
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Cité de la Musique, Paris Le 11/05/2023 Chloë ROUGE |
| Concert de l’Ensemble Intercontemporain avec le concours des danseurs Saburo Teshigawara et Rihoko Sato à la Cité de la Musique, Paris. | Arnold Schoenberg (1874-1951)
Pierrot lunaire
Alban Berg (1885-1935)
Suite lyrique
Solistes de l’Ensemble Intercontemporain
Saburo Teshigawara, danse et chorégraphie
Rihoko Sato, danse | |
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