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CRITIQUES DE CONCERTS |
31 octobre 2024 |
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Version de concert d’Ariodante de Haendel sous la direction de William Christie à la Philharmonie de Paris.
Douche Ă©cossaise
Pari raté pour cet Ariodante de concert assorti d’une mise en espace fluide. William Christie pas toujours très concerné a appelé à ses côtés nombre d’anciens chanteurs de son Jardin des voix. Le choix de Lea Desandre pour le rôle-titre tient de l’erreur de casting et se double d’un manque d’implication dramaturgique de la part de la chanteuse.
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William Christie paraît toujours aussi sémillant mais force est de constater que l’orchestre des Arts florissants et lui ont perdu quelque connexion. L’ouverture de cet Ariodante montre un ensemble peu focalisé et malgré les efforts du premier violon, Hiro Kurosaki, et de Thomas Dunford à la basse continue pour animer le propos, toute la première partie souffre d’une ligne évanescente et de manque de cohésion. De manière heureuse, les musiciens et le chef retrouvent leurs marques après l’entracte.
L’autre fait saillant et pour le moins étonnant de la part d’un tel Haendélien réside dans le nombre de coupes effectuées dans le chef-d’œuvre. Nombre d’airs sont privés de leur da capo, en particulier ceux du rôle principal. Quant aux ballets évoqués avec ravissement par le programme de salle, il n’en subsiste que la moitié au I tandis que les deux suivants sont passés à la trappe. Soit près de quarante minutes de musique manquant à l’appel.
La distribution apporte des satisfactions variées. Le choix de l’excellent Krešimir Špicer en Lurcanio pose question : à part la fidélité, rien ne permet de justifier l’emploi d’un chanteur dont l’ampleur est sans commune mesure. On a souvent l’impression de l’intrusion d’un Heldentenor dans un magasin de porcelaine de Saxe. Heureusement, le ténor croate essaie d’alléger au maximum pour les duos.
Le rôle de Polinesso permet de retrouver une découverte récente du Jardin des voix, Hugh Cutting. L’émission est toujours aussi plaisante et la présence indéniable. Toutefois, le bas de la tessiture pose parfois problème et, surtout, le chanteur fait fi de toute la méchanceté du rôle. Du reste, il se permet même de ressusciter pour venir chanter le chœur final.
Pas de réserve en revanche pour la Dalinda d’Ana Viera Leite. La soprano passe de l’ingénuité à la repentance en passant par la crédulité avec un charme contagieux. Dans le rôle du roi d’Écosse, Renato Dolcini semble tout avoir : la beauté du timbre et l’élégance de la ligne. Les duos avec sa fille Ginevra sont parmi les meilleurs moments de la soirée. Car Ana Maria Labin lui apporte une réplique de premier choix. La soprano se révèle tragédienne à partir du II, distillant des nuances sur le souffle particulièrement émouvantes. Les vocalises la montrent tout autant artiste. Ce point n’est pas le fort du rôle-titre tenu par Lea Desandre.
La mezzo faisait un pari en abordant Ariodante. Sa tessiture très centrale assortie d’un joli médium ne se révèle pas suffisante pour donner la pleine mesure d’un emploi sollicitant de très nombreuses facettes. L’amoureuse du I est un peu lisse. Faute de ressources expressives, la chanteuse esquisse des pas de danse. La jalousie ne s’entend nullement au II, quant au désespoir du fameux Scherza infida, il se résume à un chant prudent sur fond de bassons trop flous pour émouvoir.
L’absence d’instinct dramaturgique se confirme hélas au III, la mezzo franco-italienne qui reste certes élégante en toute circonstance ne changeant jamais sa façon de chanter malgré l’évolution psychologique de son personnage. Enfin, on regrette que pour Doppo notte, elle ne dépasse pas une vocalisation sage et cherche à compenser en entraînant le chef dans une danse pour le moins racoleuse. Un triomphe s’ensuit dans la salle.
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Philharmonie, Paris Le 02/10/2023 Thomas DESCHAMPS |
| Version de concert d’Ariodante de Haendel sous la direction de William Christie à la Philharmonie de Paris. | Georg Friedrich Haendel (1685-1759)
Ariodante, opera seria en trois actes (1735)
Livret anonyme, adapté de Ginevra, principessa di Scozia d’Antonio Calvi
Lea Desandre (Ariodante)
Ana Maria Labin (Ginevra)
Hugh Cutting (Polinesso)
Ana Vieira Leite (Dalinda)
Renato Dolcini (le roi d’Écosse)
Krešimir Špicer (Lurciano)
Moritz Kallenberg (Odoardo)
Les Arts Florissants
direction : William Christie
mise en espace : Nicolas Briançon | |
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