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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concerts des quatuors Leonkoro et Modigliani à la Cité de la musique, Paris 2024.
Asphyxie et Ă©pure
Dans une même soirée de la Onzième Biennale de quatuors à cordes à la Cité de la Musique, aux antipodes du spectre interprétatif, on regrette d’abord que les Leonkoro manquent de respiration dans Brahms et surtout dans Janáček, pour admirer ensuite le lyrisme prégnant des Modigliani dans Stravinski, Chostakovitch et Beethoven.
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Les Leonkoro sont de retour à la Biennale de quatuors à cordes après un premier passage très prometteur à l’occasion de l’édition précédente. Mais alors qu’ils avaient joué dans la salle des concerts de la Cité de la Musique, ils ne donnent cette fois-ci qu’un court programme dans l’Amphithéâtre. L’acoustique de cette petite salle en gradin n’est pas des plus généreuse mais ce n’est sans doute pas la raison principale qui peut expliquer le manque de respiration de leur lecture du Quatuor n° 1 de Janáček.
Là où le compositeur fait éclater les voix du quatuor comme autant d’individualités, la jeune formation allemande cultive une coordination impressionnante qui bride la liberté. Dans ce cadre sans faille, l’évocation du langage parlé louée par tant de commentateurs ne prend pas. D’autant que les Leonkoro ne laissent aucun vide, aucun silence dans une écriture qui procède beaucoup par l’art des creux. Ils sont du reste beaucoup plus en situation dans le Quatuor n° 1 de Brahms qui suit. On admire ici la maîtrise instrumentale exceptionnelle et une lecture rythmique beaucoup plus idiomatique. Si leur interprétation ardente et sévère manque un rien de retenue dans les deux premiers mouvements, elle bénéficie ensuite de leur plein engagement.
Le contraste est presque total quarante minutes plus tard avec le concert des Modigliani dans la salle des concerts. L’ensemble qui a fêté l’année dernière son vingtième anniversaire, délivre tout d’abord Trois Pièces pour quatuor de Stravinski avec un lyrisme discret qui unifie l’ensemble. La même approche semble s’appliquer ensuite au Quatuor n° 3 de Chostakovitch.
Moins sombre que sous d’autres archets, l’œuvre retrouve ici ses racines mozartiennes et beethovéniennes. Et lorsqu’on entend la symbiose entre les quatre musiciens, on remarque qu’elle ne limite pas les individualités parce que la respiration reste la base commune. Cela se confirme dans un Quatuor n° 7 de Beethoven particulièrement éloquent.
La modernité de l’écriture de l’Allegro initial ne met jamais en danger le chant mélodique, mais bien entendu c’est l’Adagio molto e mesto qui marque la soirée d’une pierre blanche : la douleur lancinante ne déborde pas tout en se prolongeant très loin. Le développement russe du Finale joué de manière très effusive et presque décousue n’en fait pas disparaître le souvenir. Le Menuet n° 3 D. 89 de Schubert donné en bis montre encore les Modigliani à leur meilleur, dans l’élégance de l’épure mélodique.
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Cité de la Musique, Paris Le 19/01/2024 Thomas DESCHAMPS |
| Concerts des quatuors Leonkoro et Modigliani à la Cité de la musique, Paris 2024. | Amphithéâtre :
Leoš Janáček (1854-1928)
Quatuor à cordes n° 1 « Sonate à Kreutzer » (1923)
Johannes Brahms (1833-1897)
Quatuor à cordes n° 1 en ut mineur, op. 51 n° 1 (1873)
Quatuor Leonkoro
Jonathan Masaki Schwarz, violon I
Amelie Cosima Wallner, violon II
Mayu Konoe, alto
Lukas Minoru Schwarz, violoncelle
Salle des concerts :
Igor Stravinski (1882-1971)
Trois Pièces pour quatuor à cordes (1914)
Dimitri Chostakovitch (1906-1975)
Quatuor à cordes n° 3 en fa majeur, op. 73 (1946)
Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Quatuor à cordes n° 7 en fa majeur, op. 59 n° 1 « Razoumovski » (1806)
Quatuor Modigliani
Amaury Coeytaux, violon I
LoĂŻc Rio, violon II
Laurent Marfaing, alto
François Kieffer, violoncelle | |
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