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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Nouvelle production de Justice d'Hèctor Parra dans une mise en scène par Milo Rau et sous la direction de Titus Engel au Grand Théâtre de Genève.
Le chant de la terre
Le compositeur catalan âgé de 47 ans Hèctor Parra présente au Grand Théâtre de Genève Justice, un drame musical luxuriant mais peu théâtral inspiré par une tragédie liée à l'exploitation minière au Congo. Le plateau fait oublier la mise en scène assez statique signée Milo Rau, avec en fosse le geste expressif de Titus Engel.
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C'est l'histoire d'un fait divers tragique qui se déroule au Congo. Un camion rempli d'acide destiné à l'industrie minière se renverse au milieu du marché de Kwabé, tuant des dizaines des personnes dans des souffrances atroces. Au drame vient s'ajouter le contexte géopolitique d'un pays où l'écocide et l'exploitation des minerais par les grandes sociétés occidentales se déroulent sur fond de perpétuel capitalisme néocolonial. Le narrateur et librettiste Fiston Mwanza Mujila est présent sur scène pour présenter l'action et les personnages, tandis que sur un grand écran défilent les images de ce qui s'apparente à un grand documentaire.
À l'arrière-plan, un camion renversé sert d'unique décor à une action qui semble elle-même figée dans un traumatisme d'où émerge une galerie de personnages avec, au-dessus d'eux, un grand écran sur lequel sont projetées des images muettes de la région de Lubumbashi. Loin de son iconoclaste Clémence de Titus, Milo Rau limite ici la direction d'acteurs à son strict minimum comme si l'enjeu principal se concentrait sur le portrait psychologique des victimes pour en souligner le caractère universel et tragique.
L'attention portée à faire intervenir des acteurs et chanteurs congolais dont certains ont réellement vécu la tragédie augmente chez le spectateur le sentiment d'un malaise que peine à dissiper la musique luxuriante et plurielle d'Hèctor Parra.
Ainsi Axelle Fanyo chantant le lamento de la mère ("Ma fille est morte, ma fille et ses rêves, fondus dans l’acide"), ou bien les mélopées du contre-ténor Serge Kakudji chantant ce "garçon qui a perdu ses jambes" que l'on voit également sur l'écran et dont le dialogue musical avec le virtuose guitariste Kojack Kossakamvwe fait partie des meilleurs moments de la soirée.
L'énergie vocale de Simon Shimbambu (le jeune prêtre), Lauren Michelle (l'avocate) ou Udunnu Münch (femme du directeur) traduisent une urgence et une incarnation qu'on peine à retrouver dans des rôles limités à la fois par une dramaturgie maladroite et des moyens expressifs limités : Peter Tantsis qui ne trouve pas dans le rôle du directeur la formidable expressivité du Maximilien Aue des Bienveillantes ou bien Katarina Bradić (chauffard) et surtout Willard White, dont le grand prêtre n'a ni la surface vocale ni surtout l'épaisseur théâtrale pour convaincre pleinement. Même constat pour un chœur gêné par l'écriture et des indications scéniques très rudimentaires.
La direction de Titus Engel souligne dans la partition les éléments de puissance et de brio qui traduisent l'acuité de l'écriture et le goût du compositeur pour les textures sonores, dont certaines lui sont directement inspirées par le répertoire traditionnel congolais – en particulier les cultures des danses et des musiques luba du sud du pays. L'ensemble traduit une approche qui penche ouvertement vers un oratorio dont les panneaux historiés se laissent observer séparément, loin de toute impression de grand flux narratif et lyrique.
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Grand Théâtre, Genève Le 24/01/2024 David VERDIER |
| Nouvelle production de Justice d'Hèctor Parra dans une mise en scène par Milo Rau et sous la direction de Titus Engel au Grand Théâtre de Genève. | Hèctor Parra (*1976)
Justice
Livret de Fiston Mwanza Mujila d’après un scénario de Milo Rau
Coproduction avec le Festival Tangente de Sankt Pölten
Chœur du Grand Théâtre de Genève
Orchestre de la Suisse Romande
direction : Titus Engel
mise en scène : Milo Rau
scénographie : Anton Lukas
costumes : Cédric Mpaka
éclairages umières : Jürgen Kolb
vidéos : Moritz von Dungern
préparation des chœurs : Mark Biggins
Avec ;
Peter Tantsits (Le Directeur), Idunnu Münch (Femme du Directeur), Katarina Bradić (Chauffard), Willard White (Prêtre), Simon Shibambu (Jeune Prêtre), Serge Kakudji (Jeune homme), Lauren Michelle (Avocate), Axelle Fanyo (Mère), Fiston Mwanza Mujila (Librettiste). | |
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