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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Nouvelle production de Beatrice di Tenda de Bellini dans une mise en scène de Peter Sellars et sous la direction de Mark Wigglesworth à l’Opéra de Paris.
Coups de sécateur
L’entrée de Beatrice di Tenda au répertoire de l’Opéra de Paris ne répond pas à tous les espoirs, en raison d’une mise en scène inaboutie de Peter Sellars et d’une direction métronomique de Mark Wigglesworth. Heureusement, les prestations de Pene Patti et de Tamara Wilson en Orombello et Béatrice comblent l’amateur d’art lyrique.
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C’est une affaire entendue : Beatrice di Tenda n’est pas le meilleur opéra de Bellini. En dépit de sa résurrection avec le concours de Joan Sutherland en 1961, l’œuvre demeure absente du répertoire de la plupart des maisons d’opéra. Si son livret d’une faiblesse insigne n’a jamais eu de grand défenseur, l’histoire violente qui en constitue la base garde encore aujourd’hui toute sa puissance.
Au début du XVe siècle, Béatrice Lascaris de Tende épouse en secondes noces Philippe Marie Visconti. De vingt ans son aîné, elle lui apporte richesses et territoires. Quelques années plus tard, le duc se débarrasse de son épouse en l’accusant d’adultère et la fait décapiter après plusieurs jours de tortures. Peter Sellars se dit obsédé par cette histoire depuis plus de vingt-cinq ans, et l’on se réjouissait qu’un metteur en scène aussi expérimenté que lui entreprenne cette gageure. S’agissait-il d’une mission impossible ?
Dans un décor unique de jardin italien Renaissance stylisé et élégamment éclairé, l’Américain se contente d’exposer la solitude des protagonistes face à la monstruosité du pouvoir. Il parvient à montrer le résultat de cette ultra violence : Orombello, l’amant présumé, sort de la torture complétement défiguré, obligé d’être soutenu pour marcher. Pourquoi alors ajouter sept soldats pointant caricaturalement leur fusil d’assaut sur lui ? Cette emphase ridicule répétée pour Béatrice, et d’autres détails comme ces jardiniers sortant des sécateurs pour couper des feuilles imaginaires renvoient à une grammaire sommaire, tarte à la crème des mises en scènes d’aujourd’hui.
Alors que la saison passée, la cheffe Speranza Scappucci avait brillamment montré des affinités électives avec le style bellinien, le choix de Mark Wigglesworth pour diriger cette délicate entrée au répertoire ne manque pas d’interroger. Le chef britannique livre une exécution d’une précision vraiment exemplaire mais l’absence désespérante de rubato et un cantabile bien trop discret vont à l’encontre de cet univers et rendent certaines scènes interminables. Heureusement, le plateau apporte davantage de satisfactions.
Les chœurs magnifiquement préparés se taillent un joli succès. Parmi les seconds rôles excellement tenus, on distingue l’Agnès de la mezzo Theresa Kronthaler, remarquée en début de saison à Bâle en Sieglinde. Dans le trio de tête, seul le Philippe Visconti de Quinn Kelsey déçoit par un style tourmenté éloigné du bel canto qui ferait presque croire qu’il est la victime de cette histoire. En Orombello, Pene Patti offre en revanche une incarnation sensationnelle de ligne et de lumière.
Mais c’est la Béatrice de Tamara Wilson qui justifie à elle seule cette soirée. Très bonne actrice, la soprano incarne une femme martyre à la grande personnalité, qui distille de fantastiques piani dans sa prière au I et dans le trio du pardon au II. Sa cabalette finale écourtée par la nouvelle édition critique de la partition ne manque pas de triompher.
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