Und, une aristocrate juive, attend son amant, un militaire allemand, qui ne viendra pas. De longues heures de désespoir, de remise en question, d’accès de folie pavent le mélodrame de Daniel D’Adamo, mis en scène par Julie Delille. Le livret a été traduit en français à partir du monologue d’Howard Barker.

La chanteuse Gaëlle Méchaly, vêtue d’une tenue intégralement faite de fourrure, évolue lentement d’un bord à l’autre de la scène. S’il ne semble pas y avoir de début ni de fin à cette histoire, le personnage entre progressivement en résistance. Ne pouvant exister par elle-même, Und est un lien (et) et une question. Des statues de chien (Hund) structurent son déplacement. À son avancée linéaire sur scène correspond un cheminement psychologique tortueux et labyrinthique.

Les discrètes lumières d’Elsa Revol figurent les angoisses et accompagnent l’unique protagoniste jusqu’à ce qu’elle rencontre son reflet dans un miroir. « Quelqu’un est mort Â», est-ce lui, elle ou son dĂ©sir ? Par sa prĂ©sence et son intensitĂ© tout au long du monodrame, Mechaly incarne la parfaite Und, aux mĂ©diums et graves ronds et sombres, aux aigus souples et timbrĂ©s. Tout aussi maitrisĂ©s, les rires et les pleurs glacent le sang. La chanteuse flirte dĂ©licieusement avec les quarts de ton, tout comme les huit instrumentistes de l’Ensemble TM+.

La partie instrumentale crée une atmosphère légèrement tendue, jamais rassurante, par répétitions de courts motifs en tuilage et par des modes de jeu bruitistes. Quelques parties plus contrastantes exacerbent les états d’âme de la chanteuse. Toujours proche, le point de rupture n’est jamais atteint car Laurent Cuniot veille au grain, insufflant tension, agitation et calme insidieux. Trop parcimonieuse, la partie électronique – gérée en direct par le compositeur et Yann Bouloiseau – sert surtout à faire entendre les sons de cloche qui rythment l’attente. Pour le reste, elle soutient l’entrelacs instrumental sans jamais se rendre indispensable.

On regrette par ailleurs que le surtitrage n’ait pas été installé à la Maison de la Musique de Nanterre. Le français chanté n’étant pas toujours limpide, ce manque porte préjudice à la compréhension de l’action et du texte de Barker.