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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert de l’Orchestre symphonique de Londres sous la direction de Simon Rattle, avec le concours du pianiste Kirill Gerstein à la Philharmonie de Paris.
Contrepoint et syncopes
Sir Simon Rattle et l’Orchestre symphonique de Londres présentent un programme américain à la Philharmonie de Paris autour de Gershwin, comprenant le célèbre Concerto en fa et deux ouvertures aux rythmes entraînants. Si la création française de Frenzy de John Adams ne convainc pas, la Symphonie n° 3 de Roy Harris constitue le sommet de la soirée.
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Génie du jazz symphonique, George Gershwin n’était pourtant pas orchestrateur. L’ensemble de son œuvre a été arrangé par d’innombrables musiciens. Pour l’ouverture de Let ‘Em Eat Cake qui débute son concert avec l’Orchestre symphonique de Londres, Simon Rattle a choisi l’orchestration du mystérieux Don Rose. Usant d’un effectif plantureux, notamment aux cordes, cet arrangement hollywoodien dénature quelque peu une musique aux arrêtes d’habitude moins émoussées, composée pour les fosses étroites de Broadway. En voyant l’effectif demeurer sur scène, on s’inquiète pour le Concerto en fa qui suit.
Crainte infondée, car la version jouée est celle de la George & Ira Gershwin Edition publiée récemment par Timothy Freeze. Elle dérive de sources directes, écarte bien des ajouts posthumes, mais surtout elle donne à l’ensemble une articulation vivifiante. Du coup, tout le talent des musiciens du LSO apparaît en pleine lumière et ce dès l’impertinente ritournelle introductive. Le pianiste Kirill Gerstein trouve ici une partition idéale pour son jeu délié, alternant éclats et sonorités moelleuses. En bis, la spectaculaire étude I got rhythm le montre tout autant à son affaire.
À cette musique exubérante, Rattle fait suivre après l’entracte la beaucoup plus sombre Symphonie n° 3 de Roy Harris. En un mouvement unique, cette superbe partition tombée en désuétude offre une succession d’états contrastés et pourtant, grâce à la direction de Sir Simon, on assiste à la construction toute en finesse d’une arche impressionnante. Le chef britannique détaille les subtilités rythmiques et apporte une belle clarté à un contrepoint nourri mais jamais écrasant. Le compositeur John Adams revendique aussi une « structure symphonique hétérogène et pourtant unifiée » pour sa nouvelle pièce Frenzy créée il y a quelques jours au Barbican Centre.
L’audition de cette mini-symphonie d’une durée identique à celle de Harris se révèle beaucoup moins passionnante, peut-être parce que la succession des différents éléments sonne vraiment de manière séquentielle. En outre, cette musique bien sous tous rapports peine à dépeindre les différents états de la frénésie annoncée, que ce soit le désordre mental ou l’état de furie délirante. La bonne humeur la plus contagieuse clôt le concert avec l’ouverture Strike up the Band de Gershwin. Cette fois, l’arrangement de Don Rose atténue moins les syncopes d’un orchestre à la pétulance irrésistible.
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Philharmonie, Paris Le 09/03/2024 Thomas DESCHAMPS |
| Concert de l’Orchestre symphonique de Londres sous la direction de Simon Rattle, avec le concours du pianiste Kirill Gerstein à la Philharmonie de Paris. | George Gershwin (1898-1937)
Let ‘Em Eat Cake, ouverture
Arrangement : Don Rose (1933)
Concerto en fa (1925)
Kirill Gerstein, piano
Roy Harris (1898-1979)
Symphonie n° 3 (1939)
John Adams (*1947)
Frenzy (2023)
George Gershwin
Strike up the Band, ouverture
Arrangement : Don Rose (1927)
London Symphony Orchestra
direction : Simon Rattle | |
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