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CRITIQUES DE CONCERTS |
30 décembre 2024 |
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Version de concert de Bérénice de Haendel sous la direction de Francesco Corti au Théâtre des Champs-Élysées, Paris.
Réjouissante Bérénice
Le retour au TCE de la rare Berenice de Haendel est marqué par une belle distribution où Sandrine Piau et Ann Hallenberg brillent, tandis que Paul-Antoine Bénos-Djian confirme son instinct dramatique et qu’Arianna Venditelli est la révélation de la soirée. La direction de Francesco Corti constitue quant à elle une nouvelle étape dans l’interprétation haendélienne.
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Bons baisers d’Eltsine
Chambre déséquilibrée
RĂ©gal ramiste
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Appartenant à la dernière veine de Haendel pour le théâtre de Covent Garden à Londres, l’opéra Berenice est souvent qualifié d’œuvre mineure, infortunée ou inégale. Son livret expose les errements politiques et sentimentaux de la reine d’Égypte. Par son accumulation d’invraisemblances et de retournements cocasses des situations les plus dramatiques, il suscite l’hilarité du public, et se compare aux pires feuilletons. L’opportune présentation en version de concert permet de se concentrer sur les subtilités musicales nombreuses de la partition. Trois personnages se taillent la part du lion au détriment des quatre autres.
Il revient à Sandrine Piau, valeureuse haendélienne, d’endosser les habits de Bérénice, l’inconséquente reine d’Égypte. Si le haut du registre a perdu un peu de son lustre, le médium possède une superbe présence. Il n’y a que le grand air avec hautbois obligé qui trouve la chanteuse un peu à court de ressources. Les duos montrent en revanche une musicalité exceptionnelle, et partout la soprano use d’un verbe précis pour un portrait aussi vivant que riche.
Passé un premier acte d’exposition, l’engagement du Démétrius de Paul-Antoine Bénos-Djian s’impose et culmine dans Selene infida où le chanteur prend des risques payants pour une invocation saisissante des Enfers. D’une rigueur exemplaire, l’Alexandre d’Arianna Venditelli en impose par un style châtié et une voix à l’égalité saisissante.
L’emploi d’Ann Hallenberg pour le rôle de Sélène ressort d’un luxe réjouissant. La mezzo virtuose se joue des difficultés de sa partie et offre un jeu de nuances qui lui permet d’habiter son personnage trop négligé par la partition. Rémy Brès-Feuillet apporte à Arsace une douceur pénétrante. Enfin, Matthew Newlin et John Chest, respectivement Fabio et Aristobolo, ne déparent nullement cette galerie de personnage très vivants sertie par une direction exceptionnelle.
À la tête des excellents musiciens d’Il Pomo d’Oro, Francesco Corti fait montre d’un instinct dramatique de premier ordre servi par une rigueur rythmique peu commune. Quinze ans après la révolution haendélienne d’Alan Curtis, il faut entendre comment le chef italien parvient à évoquer délicatement le vol de l’abeille dont il est question dans l’air Vedi l’ape ch’inegnosa pour prendre la mesure de ses capacités poétiques. La palette de couleurs et le groove général de cette direction révèlent une compréhension inouïe de cette écriture. Du grand art.
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Théâtre des Champs-Élysées, Paris Le 21/05/2024 Thomas DESCHAMPS |
| Version de concert de Bérénice de Haendel sous la direction de Francesco Corti au Théâtre des Champs-Élysées, Paris. | Georg Friedrich Haendel (1685-1759)
Berenice, regina d’Egitto, opéra en trois actes HWV 38 (1737)
Livret d’Antonio Salvi
Sandrine Piau (Bérénice)
Ann Hallenberg (Sélène)
Arianna Venditelli (Alexandre)
Paul-Antoine Bénos-Djian (Démétrius)
Rémy Brès-Feuillet (Arsace)
Matthew Newlin (Fabio)
John Chest (Aristobolo).
Il Pomo d’Oro
direction : Francesco Corti | |
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