Les Kindertotenlieder siéent parfaitement au timbre de Marianne Crebassa. De Nun will die Sonn' so hell aufgehn ressort une mélancolie incarnée avec beaucoup d’introspection. La suspension du temps aurait pu encore mieux prendre effet si Mikko Franck n’avait pas pressé pas le tempo. Dans l’économie de moyens de ce premier Lied, la petite harmonie et les cors montrent une grande qualité de timbre et de conduite de la phrase.

Dans Wenn dein Mütterlein, Crebassa poitrine joliment les graves puis déploie une mélodie poignante dans laquelle point une touche d’espoir. Par sa ductilité, elle capture chaque variation du sentiment et garde l’homogénéité dans le médium comme dans l’aigu. Dans Oft denk' ich, le dialogue avec l’orchestre prend toute son ampleur. Franck développe la richesse de l’orchestration avec lyrisme tout en restant attentif à sa soliste. In diesem Wetter parachève ce cycle aussi juste qu’émouvant. La mezzo embrasse le tumulte de sa voix puissante passant de graves insondables à des aigus ronds et éplorés, parfois fragiles dans les piani.

Si elle s’affirme comme superbe mahlĂ©rienne, on ne peut en dire autant de Melody Louledjian, qui peine Ă  convaincre dans le Sehr behaglich final de la Symphonie n° 4 oĂą elle passe Ă  peine l’orchestre. Le dernier mouvement doit se contenter des couleurs et de la vivacitĂ© de l’Orchestre Philharmonique de Radio France. Ă€ la demande de Mahler, la soprano doit avoir « une expression joyeuse et enfantine Â» partielle ce soir, avec un timbre trop lĂ©ger qui ne permet pas de remplir les graves en plus de bruyantes respirations qui cassent la ligne mĂ©lodique.

Le chef se présente moins en retenue que dans les Kindertotenlieder, profitant de la masse orchestrale avec entrain. Pour autant, sa direction manquant parfois de précision amène des décalages sur les départs des bois et des changements de tempi instables. Les chefs de pupitre des cordes font un prodigieux travail d’homogénéité qui profite à l’équilibre de l’ensemble. Tout au long du mouvement lent, les contrebasses bercent l’orchestre de pizzicati au velouté exceptionnel.

De l’autre côté de la scène, la harpe de Nicolas Tulliez les accompagne en ouvrant la sonorité du Philhar’ jusque dans les dernières notes d’extase de la coda. Tout aussi brillants dans les mouvements extrêmes, les cors s’illustrent par leur homogénéité. Au même titre, la petite harmonie fait des merveilles dans les associations de timbres mahlériennes. Une minute de silence savourée par le public suit la fin apaisée de cette Symphonie n° 4 transcendée par les instrumentistes.