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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Concert de l’Orchestre philharmonique d’Oslo sous la direction de Klaus Mäkelä, avec le concours de la violoniste Lisa Batiashvili au festival de Salzbourg 2024.
Salzbourg 2024 (7) :
Le goût du risque
Parmi les orchestres invités de Salzbourg 2024, impossible de manquer le Philharmonique d’Oslo avec le jeune chef qui fait des merveilles à l’Orchestre de Paris et vient d’être nommé à Amsterdam et Chicago : Klaus Mäkelä. Une soirée à guichets fermés, et un programme Tchaïkovski-Chostakovitch plein d’électricité et de prises de risques.
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C’est dans le décor du Joueur de Prokofiev, sous les soucoupes volantes de Peter Sellars, que s’installe l’Orchestre philharmonique d’Oslo. Toujours à sa tête ainsi qu’à l’Orchestre de Paris même si l’appel du destin le mènera en 2027 à Chicago et Amsterdam, Klaus Mäkelä est LE chef que le public autrichien veut voir à tout prix cet été, d’où un Manège des rochers plein à craquer.
La soirée débute par le Concerto pour violon de Tchaïkovski, articulé d’emblée avec une confiance lumineuse que vient à peine perturber un premier tutti aux cuivres et timbales assez prosaïques. Habitués aux merveilles sonores des Wiener in loco, il faut un temps d’adaptation. Mais au moins les cordes norvégiennes jouent comme un seul homme, avec densité et présence.
L’entrée de Lisa Batiashvili fait entendre une sonorité fine, qui soigne son legato et ses glissandi, parfaitement dosés. Pendant quelques instants, on se croirait dans la contemplation sereine du concerto de Brahms, mais la violoniste géorgienne et le chef finlandais rivalisent de rubato sophistiqué, de petites retenues qui finissent par perturber l’élan de la musique.
D’ailleurs, Mäkelä doit donner ici ou là quelques coups d’accélérateur en renfort de sa conception rhapsodique pour retrouver une vraie confrontation entre soliste et orchestre. Batiashvili, qui fait joliment braire son instrument dans des graves non vibrés façon Carnaval des animaux, donne une cadence où la tension peine à ne pas retomber dans ses multiples silences.
Après une Canzonetta phrasée comme du Sibelius, le Finale voit le chef tirer tous azimuts, embardées orchestrales et pizz diaboliques déclenchés avec un geste éclair, de l’extérieur de la main, terriblement efficace. En bis, il empruntera son instrument au premier violoncelle de l’orchestre pour accompagner en pizz sa soliste dans les Gouttes d’eau de Sibelius.
Après l’entracte, changement de ton pour une Symphonie n° 5 de Chostakovitch ni dans l’héritage expressif mahlérien ni purement intellectuelle. Mäkelä, qui dirige tout le programme sans baguette, a bien compris qu’un quintette très articulé fournit le meilleur appui possible dans ce répertoire, et ne lâche à aucun moment ses cordes, d’une vitesse d’archet et d’un grain remarquables.
Et si les vents s’avèrent parfois fragiles – la trompette, le cor –, si les percussions manquent cruellement d’étagement, le chef mène sa barque en abandonnant l’arsenal de préciosités qui dénaturaient son Tchaïkovski. Avec des nuances infinitésimales, des progressions dramatiques patientes, il sert le drame de la Cinquième de mémoire avec une belle maîtrise – quel Largo !
Tout au plus peut-on regretter une coda du Finale trop middle of the road, ni lente ni rapide, sans le formidable sentiment de rouleau compresseur d’un régime oppressif. Mais n’oublions pas que ce prodige de la baguette n’a que 28 ans…
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Felsenreitschule, Salzburg Le 21/08/2024 Yannick MILLON |
| Concert de l’Orchestre philharmonique d’Oslo sous la direction de Klaus Mäkelä, avec le concours de la violoniste Lisa Batiashvili au festival de Salzbourg 2024. | Piotr Illitch Tchaïkovski (1840-1893)
Concerto pour violon et orchestre en ré majeur op. 35
Lisa Batiashvili, violon
Dmitri Chostakovitch (1906-1975)
Symphonie n° 5 en ré mineur op. 47
Orchestre philharmonique d’Oslo
direction : Klaus Mäkelä | |
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