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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Reprise de Madama Butterfly dans la mise en scène de Robert Wilson, sous la direction de Speranza Scapucci à l’Opéra de Paris.
En recherche d’équilibre
Pour sa dixième reprise, la Butterfly du grand Bob perd peu de son efficacité. Pour ses débuts à l’Opéra de Paris, Eleanora Buratto privilégie l’art des nuances sur l’impact. Plus expérimentés, Aude Extrémo et Christopher Maltman dominent le plateau alors que la direction très personnelle de Speranza Scapucci use d’une disposition contrariante pour les musiciens.
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Pour cette 111e représentation de sa Madama Butterfly créée en novembre 1993, Bob Wilson se présente une nouvelle fois aux saluts. Un spectacle dont la critique et une partie du public ont sans doute fait le tour mais qui affiche tout de même un joli taux de remplissage en ce début de saison. Il faut reconnaître que cette scénographie chromatique porte son effet jusqu’au dernier rang de l’Opéra Bastille, et paraît de fait particulièrement adaptée à la vastitude des lieux.
Sur le plateau quasiment nu, les déplacements minutieusement chorégraphiés restent intemporels mais leur frugalité relève en partie d’une vision fantasmée de l’Extrême-Orient typiquement occidentale, alors que de nos jours la civilisation japonaise fait l’objet d’un intérêt plus abouti. Ainsi la scène de mariage avec ses personnages compassés ou truculents parfaitement croqués par la musique de Puccini est-elle stylisée de manière excessive. Les scènes dramatiques conservent heureusement toute leur efficacité.
Le vide immense du dispositif scénique n’aide en rien la réfraction des voix des chanteurs vers la salle : il s’agit là du piège récurrent et bien connu de cette production, d’autant que les artistes ne s’approchent que très rarement de la fosse. Pour ses débuts, Eleonora Buratto multiplie les nuances piano : elle n’est pas la première à cherche à alléger Cio-Cio San mais, un peu trop souvent, la projection reste confidentielle.
Sans doute, un équilibre qui pourra être corrigé dans les représentations suivantes car la soprano italienne dispose indéniablement des ressources nécessaires. En attendant, on se régale de ce timbre typiquement latin aux couleurs cuivrées et aux registres fluides. La ligne très élégante gagnerait juste en émotion à prolonger un rien les fins de phrase au lieu d’éteindre trop nettement l’émission. À ses côtés les autres chanteurs ont l’avantage de connaître l’acoustique des lieux.
En Suzuki, Aude Extrémo assoie une très forte présence rien que par la beauté sombre de son timbre et quelques inflexions tragiques. Christopher Maltman apporte à Sharpless une humanité déchirante. Stefan Popp fait un Pinkerton sans surprise, son ténor est lumineux, le personnage peu développé. Petits rôles et chœurs ne déparent en rien ce plateau alors que depuis la fosse Speranza Scapucci use de tempos contrastés.
Souvent très allante, sa direction recourt parfois à des ralentis presque belliniens comme autant de marque-pages. La cheffe a demandé une disposition inusitée dans la fosse en disposant les contrebasses en une seule rangée face à sa main droite. Cette spatialisation viennoise permet de manière audible un assombrissement opportun des dernières pages mais en ce soir de première, la séparation des cuivres en deux groupes, et la perte de certains repères provoquent chez les musiciens quelques hésitations. Là aussi un équilibre est à trouver.
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Opéra Bastille, Paris Le 14/09/2024 Thomas DESCHAMPS |
| Reprise de Madama Butterfly dans la mise en scène de Robert Wilson, sous la direction de Speranza Scapucci à l’Opéra de Paris. | Giacomo Puccini (1858-1924)
Madama Butterfly, tragédie japonaise en trois actes (1904)
Livret de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica d’après David Belasco
Chœur et Orchestre de l’Opéra national de Paris,
direction : Speranza Scapucci
mise en scène & décors : Robert Wilson
costumes : Frida Parmeggiani
Ă©clairages : Heinrich Brunke & Robert Wilson
chorégraphie : Suzshi Hanayagi
préparation des chœurs : Alessandro Di Stefano
Avec :
Eleonora Buratto (Cio-Cio San), Aude Extrémo (Suzki), Stefan Pop (F. B. Pinkerton), Christopher Maltman (Sharpless), Carlo Bosi (Goro), Andres Cascante (Il principe Yamadori), Vartan Gabriellan (Lo zio bonzo), Sofia Anisimova (Kate Pinkerton), Young-Woo Kim (Yakusidè), Bernard Arrieta (Il commissario imperiale), Hyunsik Zee (L’offocale del registro), Marianne Cahndelier (La madre di Cio-Cio San), Liliana Faraon (La zia), Stéphanie Loris (La cugina). | |
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