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CRITIQUES DE CONCERTS |
21 décembre 2024 |
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Requiem de Verdi par l’Orchestre national de France sous la direction de Riccardo Muti à la Philharmonie de Paris.
L’art de célébrer
À quatre-vingt-trois ans, le maestro Muti n’a rien perdu de sa superbe détermination. La Messa da Requiem de Verdi donnée avec son cher Orchestre national de France, les chœurs de la radio et un quatuor de très bons solistes capte toute l’attention d’une salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris pleine à craquer et silencieuse.
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Riccardo Muti ne laisse pas grand-chose au hasard. Cette litote s’illustre une nouvelle fois avec l’interprétation donnée ce soir du Requiem de Verdi. Aux côtés de l’Orchestre national de France qu’il dirige à présent régulièrement depuis quarante-quatre années, viennent s’adjoindre tout naturellement les forces du Chœur de Radio France.
Si cette formation trouve un renouveau et un regain salutaires depuis l’arrivée à sa tête de l’excellent Lionel Sow, Muti a confié la préparation des choristes à Alessandro Di Stefano, chef des chœurs adjoint à l’Opéra national de Paris, qui avait déjà préparé les mêmes forces pour la même œuvre dirigée par Daniele Gatti en 2022. Le résultat confond tant les chœurs montrent une justesse parfaite dans tous les registres, des basses aux sopranos. Une cohésion retrouvée qui s’accompagne aussi de belles couleurs et d’une réactivité réelle à la main gauche du maestro.
Toutefois, le travail effectué à l’orchestre impressionne encore plus. Muti revendique une approche non opératique, religieuse. Pour cela il demande et obtient des musiciens nombre de nuances piano, dose les équilibres entre les pupitres de manière à obtenir un sfumato orchestral du plus bel effet. Ses phrasés d’une précision de tous les instants construisent des piliers, ouvrent des arches, dressent des tentures. Chaque section de la liturgie bénéficie d’une approche particulière et l’ensemble suit une progression dans l’émotion qui gagne toutes les forces. À ses côtés, les quatre solistes s’intègrent parfaitement dans ce cadre sophistiqué.
Muti ne les quitte jamais, et de sa main gauche dessine des inflexions qui se traduisent aussitôt dans leur phrasé. Il faut entendre par exemple la basse Maharram Huseynov prononcer Mors stupebit pour réaliser le soin maniaque apporté par le chef aux mots du rite romain. Voix magnifique, le timbre de l’Azerbaïdjanais rappelle le granite du Bulgare Boris Christoff. Certes, le ténor Giovanni Sala n’a pas la même envergure mais sa relative fragilité n’empêche pas une musicalité jamais prise en défaut.
Figée dans une attitude d’adoration du chef comme s’il était la sainte Vierge, Marie-Nicole Lemieux incarne la douleur avec une ferveur contenue. Enfin, remplaçant la soprano initialement prévue, Iwona Sobotka subjugue par l’égalité et la puissance de sa voix. Présence sage dans les ensembles, la Polonaise s’expose crânement dans un Libera me bouleversant. L’aigu sûr et glorieux, le médium soutenu et quelques graves joliment poitrinés : sa maîtrise est totale, et son dialogue a cappella avec le chœur constitue l’un des sommets d’une soirée de grand style.
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Philharmonie, Paris Le 04/10/2024 Thomas DESCHAMPS |
| Requiem de Verdi par l’Orchestre national de France sous la direction de Riccardo Muti à la Philharmonie de Paris. | Giuseppe Verdi (1813-1901)
Messa da Requiem (1874)
Iwona Sobotka, soprano
Marie-Nicole Lemieux, contralto
Giovanni Sala, ténor
Maharram Huseynov, basse
Chœur de Radio France
Orchestre national de France
direction : Riccardo Muti | |
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